L’Encyclopédie/1re édition/PLEURS

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PLEURS, s. m. pl. Voyez Larme. Par les pleurs, on ne doit pas entendre de simples larmes, car outre ces larmes, il y a dans l’action de pleurer, plusieurs affections de la poitrine, avec grande inspiration ; le thorax dilaté & comprimé alternativement & promptement, à-peu-près comme dans le ris, une grande expiration aussi-tôt suivie du retour de l’air dans les poulmons. Lisez Schreiber de fletu pag. 8. Schaarsenude, Berl. Nachr. 1740, n° 46 Walther, de erubescent. pag. 4. On a donc en pleurant les mêmes anxiétés qu’en riant ; on conserve à-peu-près la même figure, si ce n’est que les yeux sont plus poussés en avant, & s’enflent en quelque sorte, à force de pleurer ; au reste on pleure un peu à force de rire.

Pleurs, (Métaphys.) voyez Larmes. Les pleurs sont l’effet de toute violente émotion de l’ame, car on pleure d’admiration, de joie, de tristesse, &c. Les plus grands héros n’étoient point honteux chez les anciens de verser des larmes. Achille, Alexandre, Scipion, Annibal ont sçu pleurer. Comment les pleurs deshonoreroient-elles un grand homme, puisque la sensibilité dont elles procedent est une vertu ? Les larmes qu’Enée versa dans le mouvement de joie qu’il ressentit de voir l’honneur qu’on faisoit à sa patrie & aux braves guerriers qui l’avoient si courageusement défendue, étoient des larmes l’une ame bien née ; sunt lachrimæ rerum, dit Virgile, locution latine qui est d’une élégance admirable.

Pleurs de terre, (Architect. hydraul.) on appelle ainsi, dit Daviler, les eaux qu’on ramasse de diverses hauteurs à la campagne, par le moyen des puisards qu’on fait pour les découvrir, & des pierres glaisées dans le fond, avec goulotes de pierre pour les découvrir à un regard commun appellé réceptacle, où elles se purifient avant que d’entrer dans un aqueduc, &c. Dans l’usage ordinaire, on nomme pleurs de terre les eaux qui coulent & qui distillent entre les terres. (D. J.)

Pleurs, (Géog. mod.) dans la langue du pays Piuri, bourg d’Italie, au comté de Chiavenne, l’une des Grisons. Je ne parle de ce bourg que parce qu’il étoit magnifique, par de somptueux édifices qui l’embellissoient, lorsqu’en 1618, le 25 d’Août, la montagne voisine se détacha, & tombant sur ce bourg, l’abima au point qu’il n’en réchappa personne pour porter la nouvelle de cet affreux désastre. On dit qu’il y périt quinze cens ames, & de-là vint le nom qu’on lui donna tiré des pleurs que sa ruine fit répandre aux habitans des environs. (D. J.)