L’Encyclopédie/1re édition/PONTIFICAL

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PONTIFICAL, s. m. pontificale, (Théologie.) livre où sont contenus les rits & les cérémonies qu’observent le pape & les évêques dans l’administration des sacremens de confirmation & d’ordre, dans la consécration des évêques & des églises, & autres fonctions réservées à leur dignité. On croit communément que le pontifical romain vient de saint Grégoire.

Pontifical, adj. se dit des choses qui concernent un pontife, comme siege pontifical, habits pontificaux, &c.

Pontifical, collége, (Antiq. rom.) le collége pontifical étoit composé chez les Romains, de ceux qui avoient la principale direction des affaires de la religion, qui connoissoient de tous les différends qu’elle occasionnoit, qui en regloient le culte, les cérémonies, & en expliquoient les mysteres.

Ce collége, dans sa premiere institution faite par Numa, ne fut composé que de quatre pontifes pris du corps des patriciens, ensuite on en adopta quatre autres choisis entre les plébéïens. Sylla le dictateur en augmenta le nombre jusqu’à quinze, dont les huit premiers prenoient le titre de grands pontifes, & les sept autres de petits pontifes, quoique tous ensemble ne fissent qu’un même corps, dont le chef étoit appellé le souverain pontife, pontifex maximus.

Ces pontifes étoient regardés comme des personnes sacrées ; ils avoient le pas au-dessus des magistrats ; ils présidoient à tous les jeux du cirque, de l’amphitéâtre, & du théâtre, donnés en l’honneur de quelques divinités. Quand il vacquoit une place dans ce collége, elle étoit remplie par celui dont le grand pontife faisoit élection à la pluralité des voix ; cependant son privilege ne dura que jusqu’au tems de la loi domitia, qui attribua au peuple assemblé le droit d’élire à la place vacante.

Mais ce droit a souffert bien des vicissitudes, selon les divers tems, & suivant la forme du gouvernement de l’état ; tantôt il a passé aux empereurs, & tantôt il a été rendu au collége des pontifes.

Anciennement le souverain pontife n’avoit dans son corps qu’une autorité à peu près pareille à celle qu’ont de nos jours les chefs des tribunaux & des cours souveraines. Il avoit à la vérité droit d’inspection & de correction sur tous les prêtres & prêtresses ; on s’adressoit à lui quand il s’agissoit de consulter le collége pontifical ; mais c’étoit au nom de ce collége qu’il en prononçoit les décisions, ce que Ciceron appelle, pro collegio respondere. S’il décidoit quelque chose de son chef, on pouvoit appeller de sa décision au collége pontifical assemblé ; & même lorsqu’il avoit prononcé à la tête du collége, la cause pouvoit encore être portée devant le peuple par appel.

Les choses changerent bien de face après que le souverain pontificat eut été uni à l’empire. Il est vrai que les empereurs avoient soin, lorsqu’ils vouloient affecter quelque apparence de modération & d’équité, de faire assembler solemnellement les pontifes, pour discuter avec eux les affaires dont la connoissance appartenoit à cet ordre, & pour prononcer comme leurs chefs les décisions faites en commun, mais le collége s’en remettoit le plus souvent à la volonté de l’empereur ; & plus souvent encore le collége pontifical s’adressoit à l’empereur pour lui demander sa décision sur les cas qui paroissoient douteux ou nouveaux.

Il est bien vrai que les empereurs laisserent au collége pontifical une autorité qui n’avoit pas toujours besoin de leur concours, pour permettre ou défendre certaines choses. C’est par cette raison qu’un affranchi de Trajan étant mort à Selinunte, ville de la Cilicie, ses os furent rapportés à Rome sur une permission accordée par les pontifes, ainsi que nous l’apprend une inscription recueillie par Gruter. L’empereur Vespasien fit aussi donner certains réglemens par le collége pontifical, & se servit du nom & de l’autorité de ce collége pour faire restituer le terrein d’une vigne publique usurpée par quelques particuliers : mais dans les mêmes circonstances on voit trop les empereurs agir uniquement de leur chef, & par conséquent on en peut conclure que le collége pontifical ne décidoit que des choses dont l’empereur vouloit bien lui laisser le soin. (D. J.)