L’Encyclopédie/1re édition/PRIAPE

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Priape, s. m. (Mythol.) dieu de la Mythologie, si nouveau qu’Hésiode n’en fait aucune mention. La Fable dit que ce dieu étoit fils de Bacchus & de Vénus. Junon, jalouse de la déesse des graces, fit tant par ses enchantemens, qu’elle rendit monstrueux & contrefait l’enfant que Vénus portoit dans son sein. Aussi-tôt qu’elle l’eut mis au monde, elle l’éloigna de sa présence, & le fit élever à Lampsaque, où il devint la terreur des maris, ce qui le fit chasser de cette ville ; mais les habitans affligés d’une maladie extraordinaire, crurent que c’étoit une punition du mauvais traitement qu’ils avoient fait au fils de Vénus ; ils le rappellerent chez eux ; & dans la suite, il devint l’objet de la vénération publique. Priape est appellé dans les poëtes hellespontique, parce que Lampsaque étoit située sur l’Hellespont dans l’Asie mineure.

Priape étoit le dieu des jardins ; on croyoit que c’étoit lui qui les gardoit & les faisoit fructifier. C’est pourquoi les Romains mettoient sa statue non-seulement dans leurs jardins potagers, mais aussi dans ceux qui n’étoient que pour l’agrément, & qui ne portoient aucun fruit, comme il est aisé de le voir dans une épigramme de Martial (l. III. p. 58.), où se moquant de ceux qui avoient des maisons de campagne sans potagers, ni vergers, ni pâturages, il dit qu’à la vérité, ni eux, ni le Priape de leurs campagnes, n’avoient rien dans leurs jardins qui pût faire craindre les voleurs ; mais il demande si on doit appeller maison de campagne, celle où il faut apporter de la ville des herbes potageres, des fruits, du fromage & du vin.

Priape étoit représenté le plus souvent en forme d’Herme ou de Terme, avec des cornes de bouc, des oreilles de chevre, & une couronne de feuilles de vigne ou de laurier. Ses statues sont quelquefois accompagnées des instrumens du jardinage, de paniers pour contenir toutes sortes de fruits, d’une faucille pour moissonner, d’une massue pour écarter les voleurs, ou d’une verge pour faire peur aux oiseaux. C’est pourquoi Virgile appelle Priape, custos furum & avium, le gardien des jardins contre les voleurs & les oiseaux. On voit aussi sur des monumens de Priape, des têtes d’âne, pour marquer l’utilité qu’on tire de cet animal pour le jardinage & la culture des terres ; ou peut-être parce que les habitans de Lampsaque offroient des ânes en sacrifice à leur dieu. Priape étoit particulierement honoré de ceux qui nourrissoient des troupeaux de chevres & de brebis, ou des mouches à miel.

Il est parlé de Priape en quelques endroits de l’Ecriture, où il est dit que les dames de Jérusalem lui offroient des sacrifices ; & que Maacha, mere d’Asa, roi de Juda, étoit sa principale prêtresse ; mais le prince ayant brûlé la statue de cette infâme divinité, & démoli son temple, obligea la reine Maacha sa mere, à renoncer à ce culte idolâtre, III. Rois, xv. 13. L’hébreu porte miphileseth, que quelques-uns traduisent par épouventail ; ce qui revient néanmoins à une des fonctions de Priape, celle de servir d’épouventail dans les jardins. (D. J.)