L’Encyclopédie/1re édition/PUNIR, CHATIER

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PUNIR, CHATIER, (Synon.) on châtie celui qui a fait une faute, afin de l’empêcher d’y retomber ; on veut le rendre meilleur. On punit celui qui a fait un crime, pour le lui faire expier ; on veut qu’il serve d’exemple.

Les peres châtient leurs enfans ; les juges font punir les malfaiteurs. Le châtiment dit une correction, mais la punition ne dit précisément qu’une mortification faite à celui qu’on punit. Il est essentiel, pour bien corriger, que le châtiment ne soit ni ne paroisse être l’effet de la mauvaise humeur. Les lois doivent proportionner la punition au crime ; celui qui vole ne doit pas être puni comme l’assassin.

Le mot de châtier, porte toujours avec lui une idée de subordination, qui marque l’autorité, ou la supériorité de celui qui châtie sur celui qui est châtié. Mais le mot de punir n’enferme point cette idée dans sa signification ; on n’est pas toujours puni par ses supérieurs ; on l’est quelquefois par ses égaux, par soi-même, par ses inférieurs, par le seul événement des choses, par le hazard, ou par les suites même de la faute qu’on a commise.

Les parens que la tendresse empêche de châtier leurs enfans, sont souvent punis de leur folle amitié par l’ingratitude & le mauvais naturel de ces mêmes enfans.

Il n’est pas d’un bon maître de châtier son éleve pour toutes les fautes qu’il fait ; parce que les châtimens trop fréquens contribuent moins à corriger du vice, qu’à dégoûter de la vertu. La conservation de la société étant le motif de la punition des crimes, la justice humaine ne doit punir que ceux qui la dérangent, ou qui tendent à sa ruine.

Il est du devoir des ecclésiastiques de travailler à l’extirpation du vice par la voie de l’exhortation & de l’exemple ; mais ce n’est point à eux à châtier, encore moins à punir le pécheur. Girard.

Châtier & punir ont à-peu-près le même sens au figuré ; mais châtier se prend aussi pour corriger, polir un ouvrage ; le style de la Fontaine n’est pas toujours châtié, mais ses négligences sont aimables.