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L’Encyclopédie/1re édition/RÉGLISSE

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RÉGLISSE. s. f. (Botan.) glycyrrhisa, genre de plante à fleur papillionacée. Le pistil sort du calice & devient dans la suite une silique courte, qui renferme des semences dont la forme ressemble ordinairement à celle d’un rein. Ajoutez aux caracteres de ce genre, que les feuilles naissent par paires le long d’une côte terminée par une seule feuille. Tournefort, Inst. rei herb. Voyez Plante.

La réglisse, glycyrrhisa vulgaris, a des racines intérieurement jaunes, roussâtres en-dehors, de la grosseur du doigt ou du pouce, douces, succulentes, traçantes de tous côtes ; de ces racines s’élevent des tiges hautes de trois ou quatre coudées, branchues, ligneuses, garnies de feuilles arrondies, d’un verd clair, & comme visqueuses, rangées par paires sur une côte, dont l’extrémité est terminée par une seule feuille. Les fleurs sont petites, légumineuses, bleuâtres, disposées en maniere d’épi, à l’extrémité des tiges ; le pistil qui sort du calice se change en une gousse roussâtre, de la longueur d’un demi-pouce, qui s’ouvre à deux panneaux, & n’a qu’une cavité dans laquelle sont contenues de petites graines dures, applaties, & presque de la figure d’un rein. Ces gousses ne sont point épineuses ni velues, ni ramassées en une tête, mais elles sont lisses, portées chacune sur leur pédicule, & écartées les unes des autres. Cette plante vient d’elle-même en Espagne, en Italie, en Languedoc, & en Allemagne, d’où on nous en apporte la racine.

Ainsi la réglisse appellée dans les boutiques glycyrrhisa, liquiritia, dulcis radix, est une racine longue, sarmenteuse, de la grosseur du doigt, de couleur grise, ou roussâtre en-dehors, jaune en-dedans, d’une douce saveur.

Au reste, le mot latin glycyrrhisa ne signifie pas la même plante chez les anciens & chez les modernes, mais deux especes différentes, quoiqu’elles soient renfermées sous le même genre.

En effet, la glycyrrhisa des anciens, γλυκύρριζα, Diosc. Σκυθικὴ ῥίζα, Théophr. differe de notre réglisse par son fruit épineux, par plusieurs siliques ramassées en maniere de tête, & par sa racine qui est de la longueur du bras, plongée perpendiculairement & profondément dans la terre ; elle est moins agréable que la commune, dont les racines sont fort menues & fort traçantes : elle s’appelle glycyrrhisa capite echinato, C. B. P. Dioscoride rapporte qu’elle croît dans la Cappadoce & dans le Pont. C’est celle-là ou une semblable que M. Tournefort a trouvée en Orient, qu’il appelle orientalis, siliquis hirsutissimis.

Réglisse, (Mat. méd.) réglisse des modernes ou des boutiques, réglisse d’Allemagne. Ce n’est que la racine de cette plante qui est d’usage. Elle contient abondamment cette substance végétale particuliere. connue en Chimie sous le nom de corps doux, & elle ne possede véritablement que les propriétés génériques ou communes de ce corps. (Voyez les articles Doux, Chimie, & Doux, Diete & Mat. médicale.) mais quoique ce corps doux soit véritablement alimenteux dans la réglisse comme dans les autres substances végétales qui en sont pourvues, cependant il n’est usité qu’à titre de médicament. C’est un des ingrédiens les plus ordinaires des tisanes employées dans les maladies aiguës, & sur-tout dans celles de la poitrine, dans la toux, les affections des voies urinaires, &c. Il faut remarquer que la décoction de la racine de la réglisse seche est plus agréable que celle de la réglisse fraîche. Aussi est-ce toujours la premiere qu’on emploie par préférence. On a coutume de la faire bouillir jusqu’à ce que la décoction commence à jetter de l’écume. L’apparition de cette écume annonce que l’eau employée à la décoction a acquis une certaine viscosité ou ténacité, par l’extraction d’une quantité convenable de corps doux. Si on poussoit cette décoction plus loin, la liqueur se chargeroit encore d’une matiere extractive qui lui donneroit une saveur désagréable, & que d’ailleurs on ne se propose point d’obtenir : or vraissemblablement cette matiere extractive est plus soluble & plus confondue avec le corps doux dans la racine fraîche que dans la racine seche, & c’est là la raison du moindre agrément de la tisane qui est préparée avec la premiere.

On trouve dans les boutiques, sous le nom de suc de réglisse, plusieurs préparations sous forme seche, dont voici les plus connues & les plus usitées : premierement, le jus ou suc de réglisse, qu’on apporte d’Espagne sous la forme de petits pains, enveloppés de feuilles de laurier, & qui est noir, sec, fragile, brillant intérieurement, soluble dans l’eau, & se fondant par conséquent dans la bouche, d’une saveur très-sucrée, mais mêlée d’un goût de brûlé ou de caramel, & d’un peu d’âpreté : ce n’est autre chose qu’un extrait ou rob préparé par la décoction des racines de notre réglisse, qu’on évapore sur le feu jusqu’à consistance d’extrait, qu’on enveloppe dans cet état de feuilles de laurier, & qu’on fait sécher ensuite autant qu’il est possible, au grand soleil d’été, selon ce que rapporte le célebre botaniste, feu M. de Jussieu.

Le jus de réglisse doit être choisi récent, pur, très doux, & se fondant absolument dans la bouche : on rejette celui qui est amer, brûlé, chargé de sable ou d’ordures.

Le jus de réglisse est un remede ancien. Dioscoride & Galien en font mention. Andromachus le fit entrer dans sa thériaque.

Secondement, le suc de réglisse en bâton ou suc de réglisse noir ou brun des boutiques : en voici la préparation tirée de la pharmacopée universelle de Lémeri. Prenez extrait de réglisse, deux livres ; sucre blanc, demi-livre ; gomme adragant & gomme arabique, de chacun quatre onces : faites selon l’art (c’est-à-dire après avoir dissout ces matieres en suffisante quantité d’eau ; avoir passé ou même clarifié la solution ; l’avoir convenablement rapprochée ; l’avoir jettée toute chaude sur une table de marbre frottée d’huile de ben, &c.) : faites, dis-je, selon l’art, une masse que vous diviserez, étant refroidie, en petits bâtons. La pharmacopée de Paris ajoute à cette composition la poudre d’aulnée & celle d’iris de Florence qui la rendent nécessairement désagréable par leur seule qualité de matiere pulvérulente & insoluble, & indépendamment du mauvais goût de la racine d’aulnée, elles l’aromatisent avec une huile essentielle, ce qui ne convient pas trop avec les qualités fondamentales toujours employées pour adoucir, pour calmer, &c.

L’extrait de réglisse, dont nous venons de faire mention se prépare quelquefois dans les boutiques, mais uniquement pour l’employer à la préparation du suc de réglisse noir ; car il ne peut pas être gardé seul & sous forme de bâtons ou de tablettes, parce qu’il s’humecte facilement à l’air. D’ailleurs le sucre & la gomme corrigent un goût âpre ou rude que cet extrait a toujours, aussi-bien que le jus de réglisse d’Espagne, que l’on emploie aussi quelquefois à la place du précédent.

Troisiemement, le suc de réglisse blanc, appellé communément de Blois, n’est autre chose qu’une quantité considérable de gomme arabique & de sucre, fondus dans une légere infusion de réglisse, qu’on rapproche d’abord presqu’à consistance d’extrait, & qu’on acheve d’évaporer en battant continuellement la matiere avec un pilon de bois, & y mêlant de tems-en-tems des blancs d’œufs battus & un peu d’eau de fleur d’orange. Lémeri observe avec raison que la réglisse ne doit presque être comptée pour rien dans cette préparation, & avec autant de raison au-moins qu’elle n’en a pas pour cela moins de vertus.

La composition qui est décrite dans la pharmacopée de Paris, sous le nom de massa liquiritia alba & mollis, est de cette derniere espece.

On trouve dans les pharmacopées un autre suc de réglisse blanc, préparé avec la réglisse en poudre, l’iris de Florence aussi en poudre, l’amidon, du sucre, une gomme, &c. auquel quelques auteurs ont donné le nom de confection de Rebecha. Ce remede est absolument inutile, & on l’a abandonné avec juste raison ; car certainement un remede destiné à être roulé dans la bouche comme tous ces sucs qui sont des especes de loocs (voyez Looc), ne doit point être pulvérulent.

La racine de réglisse entre dans la composition d’un grand nombre de remedes officinaux, béchiques ou purgatifs.

Toutes les especes de sucs, soit simples soit composés, dont nous venons de faire mention, sont d’un usage très-commun dans la toux & les maladies du gosier, étant roulés doucement dans la bouche jusqu’à ce qu’ils aient été dissous & avalés avec la salive. Ces remedes sont regardés comme éminemment pectoraux ou béchiques, incrassans & adoucissans. Voyez Incrassant & Pectoral. (b)