L’Encyclopédie/1re édition/REVERTIER le jeu du

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REVERTIER le jeu du, le jeu du revertier se joue dans un trictrac où chacun empile ses dames ; ensorte que celles avec lesquelles on doit jouer, soient dans le coin, à la gauche de celui contre lequel on joue, de même les siennes dans le coin de votre côté, & à votre gauche.

Il est nécessaire que le trictrac soit garni de 15 dames de chaque couleur, de deux cornets & de dés. On ne joue qu’avec deux, chacun se servant ; on ne peut jouer que deux ensemble ; l’on présente le dé à celui contre lequel on joue pour voir à qui amenera le plus gros point pour commencer.

Il faut toujours nommer le plus gros nombre, comme six quatre, quatre & as, trois & deux. Les différentes combinaisons des dés retiennent dans le jeu du révertier le même nom qu’elles ont dans le trictrac. Les deux as, par exemple, se nomment ambezas, les deux quatre, carmes, &c.

Les dés doivent être joués de maniere qu’ils touchent la bande de l’adversaire. Le dé est bon partout dans le trictrac excepté lorsque les deux dés sont l’un sur l’autre ou sur le bord du trictrac, ou quand ils sont dressés l’un contre l’autre, ensorte que tous deux ne soient point sur leurs cubes. Le dé est bon sur le tas ou la pile des dames, sur une ou deux dames, pourvu qu’il soit sur son cube, ensorte qu’il puisse porter l’autre dé. Le dé qui est en l’air, ou qui pose un peu sur une dame, étant soutenu par la bande du trictrac contre laquelle il appuie, ou contre la pile de bois, ne vaut rien. On peut voir s’il est en l’air ou non, en tirant doucement la table ou la dame sous laquelle il est. S’il tombe, c’est une preuve qu’il étoit en l’air, par conséquent le coup n’est pas bon.

On peut rompre le dé de son homme, quand on appréhende quelque coup, à moins qu’on ne soit convenu autrement ; alors on encoure la peine marquée, & outre cette amende, celui à qui on a rompu les dés, peut jouer tel nombre qu’il veut.

Quand on commence la partie, on ne peut faire aucune case, c’est-à-dire, mettre deux ou plusieurs dames accouplées l’une sur l’autre dans les deux tables du trictrac qui sont du côté du tas des dames de celui qui joue.

Il y a deux choses à remarquer : la premiere, qu’il faut faire aller ses dames qui sont empilées & à la gauche de celui contre qui l’on joue, jusqu’au coin qui est à sa droite. Ensuite vous les passez sur les lames qui sont de votre côté à votre gauche, & les faites aller jusqu’à votre droite. La seconde chose qu’il est besoin de savoir, c’est que les doublets se jouent doublement, c’est-à-dire, que l’on joue deux fois le nombre que l’on a fait, soit avec une seule dame, soit avec plusieurs.

Il arrive souvent que l’on ne peut pas jouer tous les nombres que l’on a amenés. Par exemple, lorsque du premier coup l’on fait sonné, on n’en peut jouer qu’un, par la raison que l’on ne peut mettre sur les lames du côté de son tas de bois qu’une seule dame, & que l’on ne peut jouer tout d’une dame, à cause que le passage se trouve fermé par le tas de bois de celui contre qui l’on joue ; l’on est quelquefois aussi obligé de passer ses dames de son côté, lorsqu’après avoir joué un ou deux coups, on fait un gros doublet que l’on ne sauroit jouer du côté où est son bois & pile de dames : c’est ce qu’il faut éviter avec soin, & donner, autant qu’on pourra, tous les grands doublets, comme terne, carme, quine ou sonné, afin de pouvoir, sans gâter son jeu, les jouer, s’ils viennent. Quoiqu’on ait dit qu’on ne peut mettre qu’une seule dame sur les lames ou fleches du côté de son tas, il y a cependant une fleche sur laquelle on en peut mettre tant que l’on veut. Voyez Tête.

Quand on a mené de la gauche de son homme à sa droite une partie de ses dames, & que votre tête est bien garnie, il faut alors caser du côté de la pile de bois de celui contre qui l’on joue, ou surcaser, quand on ne peut point caser, ou bien passer toujours des dames de votre tas à votre tête. Voyez Surcaser.

Quand un joueur a plus de dames à rentrer qu’il n’en a de rentrées par les passages, il perd la partie double ; & quand on joue le double, celui qui est double, perd le double de ce qu’on a joué.