L’Encyclopédie/1re édition/RIDE

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RIDE, s. f. (Physiolog.) espece de pli ou de sillon qui se forme sur le visage, sur la peau, & généralement sur presque tout le corps des hommes, dès qu’ils commencent à vieillir.

La peau s’étend, & croît à mesure que la graisse augmente ; ce gonflement produit le blanc par la tension de la peau, & le rouge par la plénitude des vaisseaux sanguins. Voilà les lits & les roses du bel âge ; tous les fards n’en sont qu’une vaine représentation. Dès que le gonflement diminue, la peau qui n’est plus remplie, se plisse, & les sillons commencent à se former ; ensuite, à mesure qu’on avance en âge, les cartilages, les membranes, la chair, la peau, & toutes les fibres du corps, deviennent plus solides, plus dures, & plus seches ; alors toutes les parties se retirent, se resserrent ; la circulation des fluides se fait avec moins de liberté, la transpiration diminue, les sucs nourriciers sont moins abondans, & ne pouvant être reçus dans la plûpart des fibres devenues trop solides, ils ne servent plus à leur nutrition ; delà vient que ces fibres se retirent, & se plissent. Voilà l’accroissement journalier des rides.

La peau peut toujours s’étendre, tant que le volume du corps augmente ; mais lorsqu’il vient à diminuer, elle n’a point le ressort qu’il faudroit pour se rétablir en entier dans son premier état. Ajoutez à cette raison, les autres causes dont nous venons de parler, & vous verrez sans peine qu’il doit rester alors nécessairement des rides & des plis qui ne s’effaceront jamais.

Les rides du visage dépendent en partie de toutes ces causes ; mais il se trouve encore dans leur production, une espece d’ordre relatif à la forme, aux traits & aux mouvemens habituels du visage ; c’est une remarque fort ingénieuse de M. de Buffon : si, dit-il, on examine bien le visage d’un homme de vingt-cinq à trente ans, on pourra déja y découvrir l’origine de toutes les rides qu’il aura dans sa vieillesse ; il ne faut pour cela que voir le visage dans un état de violente action, comme est celle du ris immoderé, des pleurs, ou seulement d’une forte grimace ; tous les plis qui se formeront dans ces différentes actions, seront un jour des rides ineffaçables ; elles suivent la disposition des muscles, & se gravent plus ou moins par l’habitude plus ou moins répétée des mouvemens qui en dépendent.

Non-seulement le tems produit des rides au-dehors, mais il en produit de semblables au-dedans ; il ride toutes les glandes conglobées, & parmi les conglomerées, le thymus, la glande surrénale, la glande thyroïde, les glandes mammaires, & tant d’autres qui deviennent très-petites, changent leur couleur rougeâtre en couleur brune & noirâtre, perdent leur suc gras, semblable à une espece de crême, se déssechent, & disparoissent enfin tellement avec l’âge, qu’on n’en voit plus que de légeres traces par l’ouverture des cadavres.

L’art le plus savant n’a point de remedes contre ce dépérissement du corps. Les ruines d’une maison peuvent se réparer, mais il n’en est pas de même de celles de notre machine. Les femmes, qui trop éprises de leurs charmes, se sentent finir d’avance par la perte de leurs agrémens, desireroient avec passion de reculer vers la jeunesse, & d’en emprunter les couleurs. Comment ne chercheroient-elles pas à tromper les autres, puisqu’elles font tous leurs efforts pour se tromper elles-mêmes, & pour se dérober la plus affligeante de toutes les idées, celle qu’elles vieillissent ? Combien y en a-t-il qui voudroient placer les rides de leur visage dans cette partie du corps où les dieux avoient caché l’endroit mortel du fils de Thétis & de Pelée ? Mademoiselle Lenclos, plus éclairée que la plûpart des personnes de son sexe, n’avoit garde de prendre à la lettre les cajoleries de l’abbé de Chaulieu, qui prétendoit que l’amour s’étoit retiré dans les rides du front de cette belle personne. Elle nommoit elle-même ses rides le départ de l’amour, & les marques de la sagesse. Elles devroient l’être sans doute pour nous fortifier dans la philosophie, & pour nous aguerrir par de bonnes réflexions contre les frayeurs de la mort. (D. J.)

Rides, (Conchyl.) en latin rugæ ; les rides forment des ondes un peu élevées sur la superficie de la robe d’une coquille ; elles sont différentes des stries par leur irrégularité. Elles empêchent les coquillages de sortir de leurs coquilles au premier effort qu’ils font, ou au moindre obstacle qu’ils rencontrent en leur chemin. (D. J.)

Ride, (Marine.) corde qui sert à roidir une plus grosse.

Rides d’étai, (Marine.) rides qui servent à joindre l’étai avec son collier.

Rides de haubans, (Marine.) ce sont des cordes qui servent à bander les haubans, par le moyen des cadenes & des caps de mouton, qui se répondent par ces cordes. Celles qui sont entre les haubans de stribord & de bas-bord, s’appellent pantocheres. Elles bandent ces haubans & les soulagent, lorsque le vaisseau tombe de côté, en allant à la bouline ; car à mesure que les haubans de stribord se lâchent, ceux de bas-bord se roidissent & les tiennent en état.

On appelle aussi rides, les cordes qui amarrent le mât de beaupré à l’éperon.