L’Encyclopédie/1re édition/RODEZ

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RODEZ, (Géog. mod.) ville de France, dans le gouvernement de Guyenne, capitale du Rouergue, sur une colline, au pié de laquelle passe l’Aveiron, à 10 lieues d’Albi, à 20 de Toulouse, & à 130 de Paris. Long. suivant Cassini, 19. 37′. 30″. latit. 44. 20′. 40″.

Il y a dans cette ville sénéchaussée, présidial, & élection ; l’évêché étoit établi dès l’an 450, & a été suffragant de l’archevêché de Bourges, jusqu’à l’érection de celui d’Albi, sous lequel il est à présent. Il vaut au-moins quarante mille livres de revenu à l’évêque, qui est en partie seigneur de la ville, & prend la qualité de comte de Rodez ; son diocèse renferme environ 450 paroisses.

La cathédrale est un édifice gothique, mais assez beau ; son clocher bâti en pierres de taille, est renommé pour sa hauteur. Le chapitre est considérable, étant composé de quatre archidiaconés, quatre personnats, & vingt-quatre chanoines ; les canonicats valent 12 à 1500 livres années communes, & les archidiaconats sont encore meilleurs.

Mais la ville de Rodez est vilaine ; les rues sont étroites, sales, & la plûpart en pente ; les maisons sont aussi fort mal bâties ; on y compte environ six mille ames. Il s’y tient quatre foires par an, où l’on vend beaucoup de mules & de mulets pour l’Espagne ; ce qui fait un commerce assez considérable, outre les toiles grises & les serges qu’on débite en Languedoc.

Rodez se nomme en latin Segodunum, Segodunum Rectenorum, Ruteni, & urbs Rutena. Ptolomée connoît le nom de Segodunum, qui est aussi marqué dans la carte de Peutinger ; & par-là on voit que ce nom étoit encore en usage au commencement du v. siecle ; mais Grégoire de Tours, & ceux qui l’ont suivi, ne se servent que du mot Ruteni, qui est le nom du peuple.

Deux jésuites, le P. Annat, & le P. Ferrier, tous deux consécutivement confesseurs de Louis XIV. tous deux auteurs de plusieurs livres contre les Jansénistes, sont nés à Rodez, ou du-moins pour ce qui regarde le P. Annat, dans le diocèse de cette ville : leurs nombreux écrits polémiques sont morts avec eux.

Mais M. Amelot de la Houssaye rapporte un trait honorable à la mémoire du P. Ferrier : un chanoine de Bourges appellé Perrot, parent du P. Bourdaloue, lui écrivit une lettre par laquelle il tâchoit de l’engager de demander au roi, que les évêques qui seroient nommés à l’avenir par sa majesté, eussent à recevoir lors de leur sacre, de la main de son confesseur, la croix pectorale & l’anneau nuptial, & à payer au confesseur une certaine somme, à proportion du revenu des évêchés.

Le P. Ferrier en donnant cette lettre à lire à M. Amelot, lui dit : « Voilà un homme qui me propose de lever une nouvelle annate sur les évêchés futurs ; je songeois à lui procurer quelque petite abbaye, mais puisqu’il a perdu l’esprit, il n’aura rien ». (Le Chevalier de Jaucourt.)