L’Encyclopédie/1re édition/SALASSES, les

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SALASSES, les, (Géog. anc.) Salassi, ancien peuple d’Italie, dans les Alpes. Strabon, liv. IV. p. 205. en décrit aussi le pays. Le canton des Salasses, dit-il, est grand, dans une profonde vallée entre des montagnes qui l’enferment de tous côtés, quoiqu’en quelques endroits le terrein s’éleve un peu vers les montagnes au-dessous desquelles est cette vallée. Il dit encore que la Doria traverse ce pays-là, & qu’elle est d’une grande utilité aux habitans pour laver l’or. C’est pour cela qu’en quelques endroits ils l’avoient partagée en quantité de coupures, qui réduisoient presqu’à rien cette riviere.

Lorsque les Romains furent une fois maîtres des Alpes, les Salasses perdirent leur or, & la jouissance de leur pays ; l’or fut affermé ; & les Salasses qui conserverent encore les montagnes, furent réduits à vendre de l’eau au fermier dont l’avarice donnoit lieu à de fréquentes chicanes.

De cette maniere ils furent tantôt en paix, tantôt en guerre avec les Romains ; & s’adonnant au brigandage, ils faisoient beaucoup de mal à ceux qui traversoient leur pays, qui est un passage des Alpes. Lorsque Decimus Brutus, s’enfuyant de Modene, faisoit défiler son monde, ils lui firent payer tant par tête ; & Messala, hivernant dans le voisinage, fut obligé d’acheter d’eux du bois de chauffage & des javelots de bois d’orme, pour exercer ses soldats.

Ils oserent même piller la caisse militaire de César, & arrêterent des armées auprès des précipices, faisant semblant de raccommoder les chemins, ou de bâtir des ponts sur les rivieres. Enfin César les subjugua, & les vendit tous à l’encan, après les avoir menés à Ivrée, où l’on avoit mis une colonie romaine pour s’opposer aux courses des Salasses. On compta entre ceux qui furent vendus, huit mille hommes propres à porter les armes, & trente-six mille en tout. Terentius Varron eut tout l’honneur de cette guerre.

Auguste envoya trois mille hommes au lieu où Terentius Varron avoit eu son camp. Il s’y forma une ville qui fut nommée Augusta Prætoria ; c’est aujourd’hui Aoste ou Aouste, qui donne le nom à la vallée qui appartient à la maison de Savoie. (D. J.)