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L’Encyclopédie/1re édition/SANTAL

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SANTAL, s. m. (Botan. exot.) bois des Indes orientales, dont nous connoissons trois especes : le jaune ou le citrin, le blanc, & le rouge.

Le santal citrin, santalum citrinum J. B. est un bois pesant, solide, ayant des fibres droites ; ce qui fait qu’on peut le fendre aisément en de petites planches, d’un roux pâle ou jaunâtre, tirant sur le citrin, d’un goût aromatique un peu amer, d’une acrimonie qui remplit toute la bouche, mais cependant qui n’est pas désagréable, d’une bonne odeur qui approche un peu de celle du musc & des roses.

Le santal blanc, santalum odoratum candidum, Cæsalp. différe du citrin par sa couleur qui est plus pâle, & par son odeur qui est plus foible : au reste sa substance est la même, aussi-bien que sa tissure.

Garzias avoue qu’il y a une si grande affinité entre les arbres du santal citrin, & du santal blanc, que l’on a bien de la peine à les distinguer l’un de l’autre, & qu’il n’y a que les habitans qui les vendent aux marchands, qui sachent en faire la différence ; mais le savant botaniste P. Herman nous assure que l’un & l’autre viennent du même arbre, que l’écorce, ou l’aubier s’appelle santal blanc, & que la moëlle ou la substance intérieure, séparée de l’écorce & de l’aubier, est le santal citrin.

Cet arbre qui s’appelle sarcanda dans le pays, s’éleve à la hauteur d’un noyer ; ses feuilles sont aîlées, vertes, imitant celles du lentisque ; ses fleurs sont d’un bleu noirâtre, ses fruits ou ses baies sont de la grosseur d’une cerise, elles sont vertes d’abord, ensuite elles noircissent en murissant ; elles sont insipides & tombent aisément. Il y a certains oiseaux, dit Bontius, presque semblables aux grives, qui mangent ces fruits avec avidité, & qui les rendant ensuite avec leurs excrémens, sément les montagnes ou les champs de nouveaux arbres. Le santal vient dans les Indes orientales, & sur tout dans le royaume de Siam, & dans les îles de Timor & de Solor ; le même Bontius raconte que l’odeur de ces arbres nouvellement coupés, répand je ne sai quoi de pestilentiel, qui est très-ennemi du cerveau.

Le santal rouge, santalum rubrum, C. B. P. est un bois solide, compacte, pesant, dont les fibres sont tantôt droites, tantôt ondées ; le bois du milieu de l’arbre, dont on apporte de grands morceaux séparés de l’écorce & de la superficie ligneuse, est à l’extérieur d’un rouge brun, & presque noir, & intérieurement d’un rouge foncé ; il a un goût légerement astringent & acide, mais aucune odeur manifeste ; l’arbre du santal rouge, s’appelle pantaga ; il est siliqueux, & croît dans le Coromandel.

On substitue quelquefois au santal citrin, un certain bois compacte, pesant, résineux, de couleur d’un roux pâle ou jaunâtre, d’une odeur pénétrante, qui approche de l’odeur du citron, & que l’on appelle communément bois de citron, bois de coco, bois de jasmin. L’arbre dont on tire ce bois, est le nerium arboreum altissimum, folio angusto, flore albo, de Sloane, Cat. plant. jus. jam. nerium americanum lactescens, longissimo folio, flore albo, odoratissimo, H. Beaumont. Quoique cet arbre approche un peu du santal citrin pour la couleur, il en differe cependant beaucoup, par l’odeur, par les fibres qui sont courtes & inégales, & par la substance résineuse dont il est rempli, par le moyen de laquelle il s’enflamme aisément, & s’éteint difficilement.

On trouve aussi fréquemment chez les droguistes, deux bois rouges qu’on donne pour du santal rouge. Ces deux bois viennent des Indes, & de l’Amérique. L’un s’appelle lignum brasiliano simile, seu lignum sapou, lanis tingendis percommodum. C. B. P. L’autre se nomme Brasilium lignum, I. B. Erythroxylum brasilianum, spinosum, foliis acaciæ, Parad. Bat. Prod. mais il est facile de distinguer le santal rouge de ces deux bois, soit par l’odeur, soit par le goût : car le santal rouge est de couleur de sang obscur, & un peu austere au goût, & le bois du Bresil est d’une couleur rouge, entremêlée d’un peu de jaune, & d’un goût douçâtre.

Il est vraissemblable que les anciens Grecs & Latins n’ont pas connu les différentes sortes de santaux. Les Arabes sont les premiers qui en fassent expressément mention, sous le nom de sandal. Les nouveaux Grecs, qui ont marché sur les traces des Arabes, en ont aussi parlé ; cependant Saumaise, dans les exercitations sur Pline, croit que les bois appellés ligna sagalina, dont fait mention l’auteur du voyage autour du monde, dans le livre qui a pour titre periplus, sont les santaux, & que par conséquent ils n’ont pas été inconnus aux Grecs. Le profond silence que Dioscoride & Galien gardent sur ces bois, dont ils ne disent pas un mot, suffit pour détruire l’opinion de Saumaize.

Les santaux contiennent un sel essentiel, acide, une huile épaisse, plus pesante que l’eau, & une petite portion de sel volatil avec beaucoup de terre. L’huile que contient le santal citrin, est plus subtile & plus abondante ; elle est moins subtile dans le santal blanc, & plus épaisse encore dans le santal rouge. On attribue aux santaux la vertu incisive, atténuante & astringente ; on en prépare la décoction comme celle du gayac, & on la donne de la même maniere. (D. J.)