L’Encyclopédie/1re édition/SLAVE, la

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SLAVE, la, (Géog. mod.) riviere de la Dalmatie. Elle passe à Castelnovo, & se jette dans le golfe de Venise, au-dessous de la ville de Raguse. (D. J.)

Slaves, les, (Géog. anc.) Slavi, anciens peuples de la Sarmatie, qui avec les Venedes, s’établirent dans la Germanie, entre l’Elbe & la Vistule ; les peuples de ces quartiers ne se trouvant pas en état de leur faire tête, à cause qu’ils étoient épuisés par les grandes migrations qui s’étoient faites.

On ne sait pas au juste le tems où les Slaves s’emparerent des terres des Germains. Jornandes & Procope sont les premiers auteurs qui ayent parlé des Slaves. On lit dans le premier auteur, que l’invasion des Venedes se fit à la fin du cinquieme siecle, & l’on apprend par Paul Diacre qu’à la fin du sixieme siecle, les Slaves avoient pénétré dans l’intérieur de la Germanie. Du tems de Dagobert I. roi des François, les Slaves firent irruption dans la Thuringe & dans la France Trans-Rhénane, où ils mirent tout à feu & à sang. Il paroît qu’alors ils habitoient dans la Lusace, & dans les terres du haut & du bas-Elbe.

Nous avons les noms d’une partie des peuples qui composoient la nation des Slaves. De ce nombre sont les Antes, les Slavi Behemani (Bohemes), les Maharenses (le duché des Bohemes) & les Slaves Sorabes, qui habitoient entre l’Elbe & la Sala, aux confins des Thuringiens & des Saxons. Enfin, les annales de l’empereur Louis le Débonnaire nous apprennent, qu’à la diéte de Francfort, ce prince reçut les ambassadeurs & les présens que lui envoyoient les Slaves orientaux ; savoir, les Obotrites, les Sorabes, les Wilzes, les Béhémans, les Marnani, les Prædenecenteni & les Avares de la Pannonie. On met encore au nombre des Slaves, les Luciziens, les Rédariens, les Silésiens, les Polonois, les Havelliens, les Poméraniens, les Cassubiens, les Wagriens, les Rugiens.

Les Antes & les Sclavons, dit Procope, Bell. goth. l. III. c. xiv. n’obéissent pas à un roi : mais ils vivent depuis long-tems sous un gouvernement populaire, & déliberent publiquement de tout ce qui concerne leurs intérêts. Ces deux peuples observent les mêmes mœurs ; ils ne reconnoissent qu’un seul Dieu qui a créé le monde, & qui lance le tonnerre : & ils lui sacrifient des bœufs & d’autres victimes. Bien loin de faire dépendre la vie des hommes de la destinée, ils n’avouent pas seulement qu’il y en ait ; mais lorsqu’ils se voient en quelque danger, soit par la violence d’une maladie ou par le sort des armes, ils promettent d’immoler une victime quand ils en seront échappés, & ils ne manquent pas d’y satisfaire ; alors ils croient tenir leur vie de la mort de la victime. Ils rendent aussi des honneurs aux rivieres, aux nymphes & à d’autres divinités, & ils leur présentent des sacrifices, d’où ils tirent des présages de l’avenir. Ils habitent dans de misérables chaumieres, éloignées les unes des autres, & dont ils changent souvent ; ils font la guerre à pié, tenant en leurs mains de petits boucliers, & de petits dards ; ils ne portent point de cuirasses, quelques uns mêmes ne portent ni tunique, ni manteau : mais ils se couvrent d’un haut de chausse, lorsqu’ils marchent contre l’ennemi. Ils parlent tous la même langue, & ont une taille & une mine toute semblable. Ils sont grands & robustes ; la couleur de leur visage n’est pas fort blanche, ni celle de leurs cheveux fort blonde : elle ne tire pas aussi sur le noir, mais plutôt sur le roux. Leur maniere de vivre est misérable comme celle des Massagetes, toujours dans la crasse. Leur esprit tient beaucoup de la simplicité des Huns, aussi-bien que du reste de leurs mœurs ; tel est le recit de Procope, mais il se trompe s’il a cru que tous les Slaves vivoient sous un gouvernement populaire ; car les Slaves Maharenses, les Slaves Bohêmes, les Slaves Wilzes, & les Slaves Obotrites étoient soumis a des rois ou chefs.

Les Slaves ou Sclavons passerent le Danube sous l’empire de Justinien, & inonderent l’Illyrie, où ils prirent des forts, qui jusqu’alors avoient été estimés imprenables. Ils se bornerent quelque tems à des courses passageres ; mais à la fin ils établirent dans l’Illyrie une demeure plus stable que dans leur propre pays. Ils donnerent entr’autres leur nom à cette partie de la Pannonie, qui est entre la Save & la Drave, qui fut appellée de-là, Pannonie Slavienne, & qu’on nomme encore présentement Esclavonie. (D. J.)