L’Encyclopédie/1re édition/SOURIS
SOURIS, s. f. (Hist. nat. Zoologie.) mus minor ; animal quadrupede qui a environ trois pouces & demi de longueur depuis le bout du museau jusqu’à la queue ; qui est longue de trois pouces un quart. La souris ne differe du rat qu’en ce qu’elle est plus petite, qu’elle a la queue plus velue, & le poil plus court & plus doux, de couleur mêlée de jaunâtre & de cendré noirâtre sur le dessus du corps ; le dessous & les quatre jambes sont de couleur jaunâtre ; avec quelques teintes de cendré : ces couleurs varient ; & il y a des souris entierement blanches. Ces animaux produisent dans toutes les saisons, & plusieurs fois par an. Les portées ordinaires sont de cinq ou de six ; en moins de quinze jours les petits se dispersent & vont chercher à vivre ; aussi la durée de leur vie est fort courte. Tous les oiseaux de nuit, les chats, les fouines, les belettes, les rats même, leur font la guerre. L’espece des souris est généralement répandue en Europe, en Asie, & en Afrique ; on prétend que celles qui sont actuellement en grand nombre en Amérique, y ont été apportées de l’Europe. Il paroît qu’elles fuient les pays inhabités, & qu’elles suivent l’homme par l’appétit naturel qu’elles ont pour le pain, le fromage, le lard, l’huile, le beurre, & les autres alimens que l’homme prépare pour lui-même. Hist. nat. gen. & part. tom. VII. Voyez Quadrupede.
Souris, (Mat. med.) Les Pharmacologistes ont célébré comme médicamenteuses plusieurs parties & préparations de la souris, la chair, la peau, le sang, la cendre, & cela fort arbitrairement, à leur ordinaire.
La seule matiere fournie par la souris, qui a conservé jusqu’à présent le titre & l’emploi de médicament, c’est sa fiente, connue principalement chez les Pharmacologistes sous le nom de musurda, & encore sous le nom ridicule d’album nigrum, forgé apparemment en prenant pour un nom générique celui d’album, spécifié par l’épithete de græcum dans un des noms scientifiques ou mystérieux que porte la fiente de chien, voyez Chien, Mat. med.
La fiente de souris est mise au rang des purgatifs par la plûpart des auteurs de matiere médicale, & par quelques-uns, même par Juncker, par exemple, au nombre des émétiques, mais véritablement des émétiques hors d’usage. Ettmuller dit qu’elle lâche admirablement & doucement le ventre. C’est dans quelques pays un remede de bonne femme pour purger les enfans : on leur en donne depuis le poids d’un grain jusqu’à deux en substance dans de la bouillie, ou celui de cinq ou six grains broyés avec du lait, qu’on passe ensuite à-travers d’un linge. La dose pour les enfans un peu plus forts, est de sept à huit grains. Sept à huit crotins de souris sont un puissant purgatif, même pour les adultes, & qui est spécialement recommandé pour ouvrir le ventre dans la passion iliaque. Ces usages n’étant point fondés sur des observations journalieres, peuvent être regardées comme suspects ; mais on peut employer la fiente de souris avec moins de circonspection dans les suppositoires & les lavemens irritans, où elle passe pour faire très-bien. Il est encore vraissemblable qu’elle est réellement détersive, résolutive & dessicative dans l’usage extérieur. (b)
Souris d’Amérique, petit animal quadrupede. Il a environ trois pouces de longueur depuis le bout du museau jusqu’à la queue, qui est longue de trois pouces huit lignes. Le museau est un peu pointu ; les oreilles sont grandes & larges ; le poil est d’un bai-rouge clair. Regn. anim. p. 172.
Souris, s. f. (terme de Coëffeuse.) les coëffeuses ont nommé souris, une fausse coëffe qu’elles mettent sous les deux autres lorsqu’on coëffe à trois rangs ; il n’y a que deux de ces coëffes qui soient complettes & ayent des barbes ; la troisieme n’est qu’une fausse coëffe sans fond, ni barbe ; c’est celle que les lingeres & coëffeuses appellent souris : elle a seulement quelques plis sur le front comme les autres, & ses deux bouts viennent se perdre sur les tempes sous la seconde coëffure. (D. J.)
Souris, gris de souris, (Maréchallerie.) poil de cheval. C’est une nuance de poil gris, laquelle est de la couleur du poil d’une souris.
La souris est aussi un cartilage qui forme le devant des naseaux du cheval, & qui l’aide à s’ébrouer. Voyez Ebrouer.
Souris, ou Sourire, s. m. (Physiolog.) c’est un ris léger ; il se fait lorsque dans les mouvemens de l’ame doux & tranquilles, les coins de la bouche s’éloignent un peu sans qu’elle s’ouvre, les joues se gonflent, & forment dans quelques personnes, par une espece de duplicature un léger enfoncement entre la bouche & les côtés du visage, que l’on appelle la fossette, qui produit un agrément dans les jolies personnes. Le souris est une marque de satisfaction intérieure, de bienveillance, d’applaudissement. Il est vrai que c’est aussi une façon d’exprimer le mépris, l’insulte & la moquerie ; mais dans un souris malin on serre davantage les levres l’une contre l’autre par un mouvement de la levre inférieure. Le souris d’approbation & d’intelligence est un des plus grands charmes de l’objet aimé, sur-tout quand ce charme vient d’un contentement qui a sa source dans le cœur. Enfin, il y a des souris d’assurance, d’admiration, de doute. Le souris d’Abraham, quand Dieu lui promit un fils, n’étoit pas un souris de doute, mais de satisfaction, d’admiration & de reconnoissance. (D. J.)