L’Encyclopédie/1re édition/SUCEMENT, SUCER

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SUCEMENT, SUCER, (Gram.) termes qui désignent l’action d’attirer à soi, par le moyen de la bouche, des levres & de l’haleine. On les dit aussi des plantes ; & au figuré, des opinions que nous avons reçues de bonne heure, sucées avec le lait.

Sucement des plaies, ou Succion des plaies, (Médec.) la réputation où étoient autrefois les psylles pour guérir la morsure des serpens par la succion, fit que quand les personnes d’un autre pays avoient été mordues d’un serpent, on employoit par préférence un psylle lorsqu’il s’en trouvoit quelqu’un sur le lieu pour sucer la plaie, & en épuiser le venin.

C’est ce qu’on pratiqua néanmoins sans succès par rapport à Cléopatre, qui, au rapport de quelques historiens & poëtes, Velléïus, Paterculus, Florus, Properce, Horace, &c. dont je ne garantis point le témoignage, s’étoit fait piquer par des aspics, pour ne point paroître au triomphe d’Auguste.

Celse remarque judicieusement que quiconque auroit eu la hardiesse d’un psylle pour tenter la même épreuve, auroit également réussi, & que même toute personne peut sans danger sucer une plaie produite par la morsure d’un serpent, pourvu que cette personne-là n’ait point d’ulcere ou d’excoriation dans la bouche. Cette remarque de Celse est confirmée par un grand nombre d’expériences que l’on a faites dans le siecle passé sur le venin des viperes, qui n’est nuisible qu’autant qu’il se mêle immédiatement avec la masse du sang.

Les femmes & les meres des Germains suçoient les blessures de leur maris & de leurs enfans, & tâchoient ainsi de les guérir. Cette méthode de panser les blessures est assez naturelle, & son origine se perd dans l’antiquité la plus reculée. Homere en fait mention au quatrieme livre de l’Iliade. (D. J.)