L’Encyclopédie/1re édition/TOURNECASE Jeu du

La bibliothèque libre.

TOURNECASE Jeu du, s. m. l’étymologie du nom de ce jeu, vient de la maniere dont on le joue, puisque l’on ne prend que trois dames chacun, que l’on conduit suivant les nombres amenés, jusqu’à ce qu’on ait fait une case, c’est-à-dire, jusqu’à ce qu’on ait mis ces trois dames sur la derniere fleche du coin ; & comme cette case est faite avec trois dames, & qu’il faut pour gagner que les trois dames soient accouplées l’une sur l’autre, ainsi ce jeu se nomme tournecase, qui ne signifie autre chose, sinon le jeu de la case à trois dames. On nomme les dés à ce jeu comme au trictrac & au reversier ; il faut pousser le dez fort, afin qu’il batte la bande de votre homme. Après avoir mis trois dames à part pour jouer, si vous gagnez le dez vous jouez, & si vous faites d’abord six & cinq, vous ne pouvez jouer que le cinq, parce que c’est une regle, en ce qu’on ne peut jamais jouer que le plus bas nombre. Si vous faites sonné après avoir fait six & cinq, vous n’en pouvez jouer qu’un, & vous êtes obligé de le jouer avec la même dame dont vous avez déja joué un cinq ; parce que si vous le jouiez avec un autre dame, il faudroit passer par-dessus celle dont vous auriez joué le cinq, ce qui n’est pas permis dans ce jeu, par la raison qu’il faut que les dames se suivent & marchent l’une aprés l’autre.

Comme les deux joueurs jouent & marchent également dans la même table & vis-à-vis l’un de l’autre, chaque fois que le nombre du dez porte une dame sur une fleche qui se rencontre vis-à-vis de celle où il y a une dame de celui contre qui l’on joue, cette dame est battue, & il est obligé de la prendre & de rentrer dans le jeu.

En ce jeu l’on bat malgré soi, parce que l’on est toujours obligé de jouer le plus petit nombre, & outre cela on ne peut point passer une dame par-dessus l’autre comme nous l’avons déja dit, ce qui fait que l’on joue souvent beaucoup de coups inutiles, sur-tout quand on a amené & conduit ses dames ; savoir, l’une dans un coin, & les deux autres tout contre, de maniere qu’on ne peut les mettre sur le coin, qu’en faisant un as & puis un deux. L’on souhaite alors d’être battu pour sortir de cette gêne.

En ce jeu, le coin de repos est la douzieme case ; on le nomme coin de repos, parce que les dames qui font une fois entrées sont en sureté, & ne peuvent plus être battues. C’est un grand avantage pour celui qui y en met une le premier. Celui qui a mis le plutôt ses trois dames dans son coin, a gagné la partie ; & s’il les y mettoit toutes trois avant que son homme y en eût mis une, il gagneroit double, si l’on en est convenu.