L’Encyclopédie/1re édition/ULSTER

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ULSTER, (Géog. mod.) en latin Ultonia & Ulidia, par les Irlandois Cui-Guilly, c’est-à-dire province de Guilly ; les Gallois disent Ultw, & les Anglois Ulster, province d’Irlande, bornée au nord par l’Océan septentrional ; au midi, par la province de Leinster ; au levant, par le canal de S. George ; & au couchant, par l’Océan occidental ; de sorte qu’elle est environnée de trois côtés par la mer. Sa longueur est d’environ 116 milles, sa largeur d’environ 100 milles, & son circuit, en comptant tous les tours & retours, d’environ 460 milles.

Cette province a de grands lacs, d’épaisses forêts, un terroir fertile en grains & en pâturages, & des rivieres profondes & poissonneuses, sur-tout en saumons.

La contrée d’Ulster étoit anciennement partagée entre les Erdini qui occupoient Fermanagh & les environs ; les Venicnii qui avoient une partie du comté de Dunnagal, les Robognii qui possédoient Londonderry, Antrim & partie de Tyronne, les Volentii qui demeuroient autour d’Armaph, les Darni qui habitoient aux environs de Down & les parties occidentales.

Tir-Owen soumit tout ce pays aux Anglois, qui le divisent actuellement en dix comtés : cinq de ces comtés, savoir Louth, Down, Antrim, Londonderry & Dunnagal confinent à la mer ; les cinq autres, savoir Tyronne, Armagh, Fermanagh, Monaghan & Cavan sont dans les terres. Londonderry est regardée pour être la capitale.

Ulster donne le titre de comte au frere ou à un des fils des rois d’Angleterre, qui est d’ailleurs créé duc d’Yorck. Il y a dans cette province un archevêché, six évêchés, dix villes qui ont des marchés publics, quatorze autres de commerce, trente-quatre villes ou bourgs qui députent au parlement d’Irlande, deux cens quarante paroisses, & plusieurs châteaux qui servent à la défense du pays.

Toute la province d’Ulster étant tombée à la couronne sous le regne de Jacques I. par un acte de prescription contre les rebelles, on établit une compagnie à Londres pour former de nouvelles colonies dans cette contrée. La propriété des terres fut divisée en portions médiocres, dont la plus grande ne contenoit pas plus de deux mille acres. On y fit passer des tenanciers d’Angleterre & d’Ecosse. Les Irlandois furent éloignés de tous les lieux capables de défense, & cantonnés dans les pays plats. On leur enseigna l’agriculture & les arts. On pourvut à leur sûreté dans des habitations fixes. On imposa des punitions pour le pillage & le vol. Ainsi de la plus sauvage & la plus désordonnée des provinces de l’Irlande, l’Ulster devint bientôt celle où le regne des lois & d’une heureuse culture parut le mieux établi.

Jacques I. ne souffrit plus dans ce pays-là & dans toute l’étendue de l’île d’autre autorité que celle de la loi, qui garantissoit à l’avenir le peuple du pays de toute tyrannie. La valeur des droits que les nobles exigeoient auparavant de leurs vassaux fut fixée, & toute autre exaction arbitraire défendue sous les plus rigoureuses peines.

Telles furent les mesures par lesquelles Jacques I. introduisit l’humanité & la justice dans une nation qui n’étoit jamais sortie jusqu’alors de la plus profonde barbarie, & de la plus odieuse férocité. Nobles soins ! fort supérieurs à la vaine & criminelle gloire de conquérans, mais qui demandent des siecles d’attention & de persévérance pour conduire de si beaux commencemens à leur pleine maturité. (D. J.)