L’Encyclopédie/1re édition/VADIMONIS-LACUS

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VADIMONIS-LACUS, (Géog. anc.) lac d’Italie, dans l’Hétrurie, au voisinage d’Améria, & près de la maison de plaisance de Calpurnius Fabatus, appellée Amerina-Prædia. Pline le jeune, l. VIII. epist. 20. nous a donné la description de ce lac. Il est, dit-il, dans un fond, & sa figure est celle d’une roue couchée. Il est par-tout égal, sans aucun recoin, sans aucun angle ; tout y est uni, compassé, & comme tiré au cordeau. Sa couleur approche du bleu, mais tire plus sur le blanc & sur le verd. Ses eaux sentent le soufre ; elles ont un goût d’eaux minérales, & sont propres à consolider les fractures.

Ce lac n’est pas fort grand, continue Pline, mais il l’est assez pour être agité de vagues quand les vents soufflent. On n’y trouve point de bateaux, parce qu’il est consacré : mais au-lieu de bateaux, vous y voyez flotter au gré de l’eau plusieurs îlotes chargées d’herbages, couvertes de joncs, & de tout ce qu’on a coutume de trouver dans les meilleurs marais & aux extrémités d’un lac. Chaque île a sa figure & sa grandeur particuliere ; chacune a ses bords absolument secs & dégarnis, parce que souvent elles se heurtent l’une l’autre, & heurtent le rivage. Elles ont toutes une égale légereté, une égale profondeur ; car elles sont taillées par-dessous, à-peu-près comme la quille d’un vaisseau. Quelquefois détachées, elles se montrent également de tous côtés, & sortent autant hors de l’eau qu’elles y entrent. Quelquefois elles se rassemblent, se joignent, & forment une espece de continent. Tantôt le vent les écarte ; tantôt elles flottent séparément dans le lieu où le calme les a surprises ; souvent les plus petites suivent les plus grandes, & s’y attachent comme de petites barques aux vaisseaux de charge. Quelquefois vous diriez que les grandes & les petites luttent ensemble, & se livrent combat. Une autre fois poussées au même rivage, elles se réunissent & s’accroissent : tantôt elles chassent le lac d’un endroit, tantôt elles l’y ramenent, sans lui rien ôter quand elles reviennent au milieu. Il est certain que les bestiaux, suivant le pâturage, entrent dans ces îles comme si elles faisoient partie de la rive, & qu’ils ne s’apperçoivent que le terrein est mouvant que lorsque le rivage s’éloignant d’eux, la frayeur de se voir comme emportés & enlevés dans l’eau qu’ils voient autour d’eux les saisit. Peu après ils abordent où il plaît au vent de les porter, & ne sentent pas plus qu’ils reprennent terre, qu’ils avoient senti qu’ils la quittoient.

Ce même lac, ajoute Pline, se décharge dans un fleuve, qui, après s’être montré quelque tems, se précipite dans un profond abîme. Il continue son cours sous terre, mais avec tant de liberté, que si, avant qu’il y entre, on y jette quelque chose, il la conserve & la rend quand il sort.

Divers autres auteurs ont parlé de ce lac, entr’autres Polybe, l. II. c. xx. qui le nomme Ὀάδμονα. Tite-Live, l. IX. c. xxxix. Florus, l. I. c. xiij. & Pline, l. II. c. xcv. On l’appelle aujourd’hui Lagodi Bessanello, selon le p. Hardouin, qui le met dans le patrimoine de S. Pierre environ à trois milles du Tibre. (D. J.)