L’Encyclopédie/1re édition/VESTA

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VESTA, s. f. (Mytholog.) une des plus grandes déesses du paganisme, sans pourtant être trop connue ; c’est par cette raison qu’Ovide voulant la placer dans ses fastes, lui dit : « déesse, quoiqu’il ne soit pas permis aux hommes de vous connoître, il faut pourtant que je parle de vous ».

Ceux qui ont pénétré le plus avant dans la religion des philosophes pythagoriciens, prétendent que par Vesta ils entendoient l’univers, à qui ils attribuoient une ame, & qu’ils honoroient comme l’unique divinité, tantôt sous le nom de τὸ πὰν, qui signifie le tout, tantôt sous le nom de μόνας, c’est-à-dire l’unité. Telle étoit, disent-ils, la signification mystérieuse de Vesta, quoique le vulgaire l’adorât comme la déesse de la terre & du feu.

La fable reconnoit deux déesses du nom de Vesta : l’une mere, & l’autre fille de Saturne. La premiere étoit la Terre, & se nommoit tantôt Cibele, & tantôt Palès, & la seconde étoit le Feu ; c’est cette derniere qu’Horace appelle æterna Vesla, en l’honneur de laquelle le religieux Numa bâtit un temple à Rome, & consacra à son culte quelques vierges romaines, pour entretenir sur ses autels un feu perpétuel, afin, dit Florus, que cette flamme protectrice de l’empire, veillât sans cesse à l’imitation des astres : ut ad simulacrum cælestium siderum, custos imperii flamma vigilaret.

Anciennement chez les Grecs & les Romains, il n’y avoit d’autre image ou symbole de Vesta, que ce feu gardé si religieusement dans ses temples ; & quand on fit depuis des statues de Vesta, elles représentoient Vesta, la Terre, plutôt que Vesta, le Feu ; mais il y a beaucoup d’apparence qu’on les confondit ensuite. Une des manieres ordinaires de représenter la déesse, étoit en habit de matrone, tenant de la main droite un flambeau ou une lampe, & quelquefois un palladium ou une petite victoire. Les titres qu’on lui donne dans les médailles, & sur les anciens monumens, sont Vesta l’heureuse, la mere, la sainte, l’éternelle, &c. Nous avons parlé de ses temples, & nous nous étendrons beaucoup sur les vestales, ses prêtresses.

Le culte de Vesta & du feu fut apporté de Phrygie en Italie par Enée & les autres troiens qui y aborderent. Virgile observe qu’Enée avant que de sortir du palais de son pere, avoit retiré le feu du foyer sacré.

Æternumque adytis effert penetralibus ignem.

Æneid. l. II.

Aussi chaque particulier prit-il soin dans la suite d’entretenir le feu de Vesta à la porte de sa maison ; & c’est de-là, selon Ovide, qu’est venu le nom de vestibule. Quoi qu’il en soit, les Troïens & les Phrygiens eux-mêmes avoient reçu le culte du feu, des autres peuples de l’Orient.

Le nom de Vesta est synonyme à celui du feu appellé par les Grecs ἑσα, mutatâ aspiratione in V, par les Chaldéens & les anciens Perses, Avesta. C’est aussi sans doute, si nous en croyons le savant Hyde, ce qui engagea Zoroastre de donner à son fameux livre sur le culte du feu, le nom d’Avesta, comme qui diroit, la garde du feu. (D. J.)