L’Exposition pour tous/V/Le Palais de l’Électricité et le Château d’Eau

La bibliothèque libre.
Montgredien et Cie Voir et modifier les données sur Wikidata (p. 59-61).

Le Palais de l’Électricité et le Château d’eau.

La Galerie des Machine et les usines de la force motrice sont masquées, du côté du Champ-de-Mars par la façade du Palais de l’Électricité, une des grandes attractions de l’Exposition.

Le mot magique : Électricité ! n’évoque-t-il pas mille merveilles[1] ?

Un palais digne d’elle a été construit pour la puissante fée. Dominant tous les édifices environnants, précédé du Château d’Eau et de deux rampes semi-circulaires, il constitue, dans le décor du Champ-de-Mars, comme une splendide toile de fond.

Entièrement constitué de fer et de verre, il se développe sur une longueur de 130 mètres, et atteint une hauteur de 70 mètres à son point culminant. Son motif central est dominé par un cartouche où brille la date de 1900, surmontée d’une figure allégorique, symolisant le Génie de l’Électricité debout sur un char qu’emportent des hippogriphes et brandissant le flambeau du Progrès.

La toiture affecte la forme d’un immense arc de cercle tréflé formé de la réunion de petits arcs de cercle accolés les uns aux autres et soutenus par des pylônes qui vont en diminuant de hauteur de chaque côté, ce qui donne au palais une forme elliptique très gracieuse.

La ligne de toiture est surmontée d’une crête à jour, formant frise, parée de milliers d’oriflammes multicolores.

La façade, en zinc repoussé et ajouré comme une dentelle se compose de neuf baies revêtues d’ornements polychromes, — vitraux et céramiques transparentes, — aux couleurs harmonieusement mélées.

Le Palais de l’Électricité, justifiant son nom, est illuminé par 5.000 lampes à incandescence de diverses couleurs, 8 lampes à arc avec projecteurs à verres colorés et 4 lampes à arc avec réflecteurs lui faisant, dès que tombe la nuit, une éblouissante parure de feu.

Le sous-sol du Palais de l’Électricité, réservé aux lourds moteurs électriques, est éclairé, jour et nuit, par des lampes. L’étage supérieur communique, par des esclaiers, avec les annexes latérales du palais, formées par deux galeries de 30 mètres de largeur.

La travée du centre se prolonge, entre les deux usines de la force motrice, par un grand vestivule, qui aboutit directement à la Salle des Fêtes de la Galerie des Machines.

Le Château d’Eau, placé en avant du Palais de l’Électricité, fait corps en quelque sorte avec ce monument, dans l’axe qui permet aux visiteurs de jouir de toutes parts du beau spectacle qu’il présente.

Il se compose d’une vaste niche hémisphérique de 30 mètres d’ouverture sur 11 mètres de profondeur, contenant une série de vasques immenses disposées en amphithéâtre, d’où tombent des nappes d’eau descendant en cascades pour rejoindre un vaste bassin au bas des larges rampes monumentales ellipsoïdales que nous avons déjà signalées. Des divinités et des génies des eaux forment la base de son ornementation, qui s’inspire un peu du style Louis XV. Au centre de la vasque inférieure se dresse, sur des roches naturelles, un groupe allégorique représentant l’Humanité, conduite par le Progrès, qui s’avance vers l’Avenir, en renversant dans l’écume deux figures de Furies qui personnifient la Routine.

Au centre de la voûte, jaillit d’une hauteur de 30 mètres une cascade plus imposante que celle de Saint-Cloud, véritable rivière de 10 mètres de largeur, déversant 1.200 litres d’eau par seconde[2].

Partout sont dispersés des groupes d’animaux chimériques vomissant de l’eau, des gerbes, des bouillons, des jets variés.

L’ensemble architectural formé par Palais de l’Électricité et par le Château d’Eau constitue, de jour et de nuit, un spectacle inoubliable.

Pendant la journée, les oriflammes, les verreries polychromes, les ciselures étincelantes, les dorures, les eaux jaillissantes réjouissent singulièrement les regards.

Le soir, les 5.000 lampes du Palais de l’Electricité et les 1.100 lampes du Château d’Eau s’illuminent de flammes multicolores d’une puissance et d’une variété fantastiques. La grotte s’embrase de rayons réfractés dans la masse liquide, dont les gerbes s’irradient des jeux d’une lumière polychrome changeante, au moyen de procédés nouveaux bien supérieurs à ceux mis en œuvre dans les fontaines lumineuses de 1889, de si célèbre mémoire. Rien n’a été négligé pour faire de ce spectacle étincelant une merveille unique au monde.

le palais de l’électricité et le château d’eau

Le Château d’Eau ne constitue pas seulement un motif décoratif. Il offre à la foule, des portiques, des promenoirs, dont quelques-uns passent sous les cascades. Ces portiques bordent toute la façade du Palais de l’Électricité, et s’infléchissent ensuite, à leurs extrémités de droite et de gauche, pour former deux vestibules donnant accès, du côté de l’avenue de Suffren, dans le Palais des Industries chimiques, du côté de l’avenue de la Bourdonnais, dans le Palais du Matériel et des Procédés généraux de la mécanique, qui sont, comme le Château d’Eau et ses larges dégagements, l’œuvre d’un seul et même architecte, M. Paulin.

la cascade du château d’eau
  1. L’électricité constitue le cinquième groupe et comporte les classes suivantes : Classe 23, Production et utilisation mécaniques de l’électricité ; Classe 24, Électrochimie ; Classe 25, Éclairage électrique ; Classe 26, Télégraphie et téléphonie ; Classe 27, Applications diverses de l’électricité.
  2. Cette eau, pompée dans la Seine par deux machines élévatoires, est amenée dans un immense réservoir placé sur la plate-forme du Château d’Eau, à 35 mètres de hauteur. Elle sert ensuite à alimenter les générateurs de vapeur des deux usines de force motrice, qui en consomment, comme nous l’avons dit, 200.000 litres d’eau par heure. Elle peut être également utilisée en cas d’incendie.