La Becquée/03

La bibliothèque libre.
Calmann-Lévy, éditeurs (p. 24-30).

Page:Boylesve - La Becquée 1910.djvu/32 Page:Boylesve - La Becquée 1910.djvu/33 Page:Boylesve - La Becquée 1910.djvu/34 Page:Boylesve - La Becquée 1910.djvu/35 Page:Boylesve - La Becquée 1910.djvu/36 Page:Boylesve - La Becquée 1910.djvu/37

Quand elle l’eut vue, elle referma l’album et elle cria :

— Philibert, fais-moi donc le plaisir de reprendre tes élucubrations…, et puis, si j’ai un conseil à te donner, c’est de ne pas laisser traîner tes paperasses !

Nous demeurâmes encore là quelque temps, car Félicie n’abandonnait cet endroit qu’à regret. Avec les premières ombres du soir, on vit courir les carrioles des fermes sur la route de Beaumont.

— Enfin ! dit Félicie, les voilà !

À tel et tel embranchement, elles quittaient la route pour s’enfoncer dans une allée de noyers. Alors, elles disparaissaient mais on les suivait à leur bruit grandissant. Et Félicie disait :

— Voilà Cornet… Ça, ce sont les gens de chez Pénilleau… Je reconnais le coup de fouet du père Moreau.

Des vols de courlis s’élevèrent, à longs cris, du côté de la rivière. Une pie attardée jacassait dans un arbre… De loin nous parvenait un bruit d’essieux : clic clac, clic clac. Un garçon de ferme sifflait. Des chiens aboyaient. Nous vîmes passer près de nous des vieilles femmes courbées sous un sac de toile bise ; elles s’arrêtaient, le temps de nous reconnaître, et murmuraient des mots inintelligibles. Philibert nous fit remarquer les troncs des sapins d’Épinay qui étaient couleur gelée de groseille et qui s’assombrirent tout à coup. Félicie me dit de mettre mon foulard, et la cloche de Courance sonna l’heure du dîner.