La Bible d’une grand’mère/120

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L. Hachette et Cie (p. 308-311).

CXX

DAVID À JÉRUSALEM

(Même année, 948 ans avant J.-C.)



Quand David fut proclamé roi par toutes les tribus d’Israël, il marcha vers Jérusalem, et il s’en empara facilement.

Il en chassa deux petites peuplades de Jébuséens qui l’occupaient. Cette ville, bâtie sur la montagne de Sion, devait être célèbre entre toutes les villes de la terre. David la choisit pour être la capitale de son royaume.

Hiram, roi de Tyr, voisin de Jérusalem, envoya à David des ambassadeurs avec du bois de cèdre, des charpentiers et des maçons, pour bâtir un beau palais au pauvre roi. David accepta, sachant que le Seigneur l’avait nommé roi de son peuple.

Les Philistins, ayant appris que David avait été proclamé roi par toutes les tribus d’Israël, résolurent de lui faire la guerre avant que sa puissance fût bien affermie. David consulta le Seigneur, qui lui promit la victoire ; il battit les Philistins deux fois, et les poursuivit jusque hors de son royaume.

Ensuite il rassembla trente mille hommes, de toutes les tribus d’Israël, et toute la tribu de Juda, pour aller chercher l’Arche d’alliance et l’amener à Jérusalem. Elle était encore dans la maison d’Abinadab ; c’est là que les prêtres et le roi vinrent la prendre. Ils la posèrent sur un chariot tout neuf et magnifique. Oza et Ahio, fils d’Abinadab, conduisaient les bœufs qui traînaient le chariot.

En chemin les bœufs firent un faux pas qui fit pencher et qui ébranla le chariot ; Oza, sans avoir égard à l’ordre du Seigneur, qui défendait à tout homme, excepté aux prêtres, de toucher à l’Arche, Oza avança la main pour retenir l’Arche qui penchait. À l’instant même il tomba mort.

Louis. Est-ce qu’Oza avait commis un péché ?

Grand’mère. Peut-être Oza croyait-il bien faire, et était-il innocent aux yeux de Dieu ; mais il y avait chez les Israélites une telle propension à désobéir aux lois de Dieu même les plus importantes, que Dieu voulut faire un exemple en punissant Oza de sa désobéissance devant tout le peuple. David fut très-effrayé de cette punition si terrible ; il n’osa plus, comme il en avait le désir, conserver l’Arche dans sa maison à Jérusalem, et il la fit déposer à Geth, dans la maison d’Obédédom. L’Arche y demeura trois mois ; elle y fut gardée avec le plus grand respect, et le Seigneur répandit ses bénédictions sur Obédédom et sur sa famille.

David, voyant cela, alla reprendre l’Arche, et l’amena à Jérusalem.

Tout le long du chemin, David immolait un bœuf et un bélier après chaque repas. Il revêtit un Éphod de prêtre, et il dansait et sautait devant l’Arche pour lui faire honneur ; des trompettes et des instruments l’accompagnaient tout le temps.

Henri. Grand’mère, n’était-ce pas un peu drôle de voir un roi danser et sauter en public, dans une procession ?

Grand’mère. Cher enfant, chez les Juifs comme chez tous les peuples anciens, les danses, de même que les chants et les instruments, faisaient partie de toutes les cérémonies religieuses. Les prêtres exécutaient des danses en chantant des hymnes, Mais cela ne ressemblait pas du tout à nos danses à nous ; c’était beaucoup plus grave et plus digne ; c’étaient plutôt des gestes et des balancements de corps.

Michol, femme de David, le jugea comme toi ; l’ayant vu par sa fenêtre, elle se moqua de lui, mais pas devant le peuple. Les lévites firent entrer l’Arche dans une tente magnifique que David avait fait préparer. Il offrit un grand nombre d’holocaustes ; et il donna à chaque homme et à chaque femme de toute cette foule d’Israélites une portion de viande rôtie, un pain en forme de gâteau et un tourteau de farine cuite dans de l’huile et du miel. Et chacun s’en retourna chez soi, très-content de leur bon roi David.

Quand David fut revenu dans sa demeure, Michol lui dit d’un air moqueur : « Le roi d’Israël s’est couvert d’une belle gloire aujourd’hui, en dansant et en sautant comme un bouffon devant les plus misérables de ses sujets ! »

David lui répondit gravement : « Oui, devant le Seigneur, qui m’a choisi de préférence à ton père et à toute sa maison, je danserai et je m’abaisserai plus encore que je ne l’ai fait, et j’en tirerai plus de gloire et d’honneur qu’en gagnant des batailles. »

David composa, au sujet de la rentrée de L’Arche à Jérusalem, un de ses plus beaux psaumes. Le Seigneur, pour punir Michol, lui fit connaître qu’elle n’aurait jamais d’enfants.

Henriette. C’est bien fait ! Je n’aime pas cette Michol ! Une menteuse qui dit à Saül que le bon David a voulu la tuer. Et une sotte femme qui se moque de la belle action de son mari.

Grand’mère. Elle a certainement eu tort, surtout dans sa dernière faute, car elle a prouvé qu’elle ne comprenait pas le respect qu’on doit avoir pour le bon Dieu ; aussi est-ce cette faute dont elle est punie en étant privée d’enfants, ce qui, pour les femmes juives, tu le sais, était une grande humiliation.