La Bible d’une grand’mère/186

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L. Hachette et Cie (p. 465-466).

CLXXXVI

JUDITH VA TROUVER HOLOPHERNE.

(Même année, 699 ans avant J.-C.)



Après qu’ils furent partis, Judith entra dans son oratoire, et, se couvrant la tête de cendre, elle se prosterna devant le Seigneur, et lui adressa une belle et longue prière, qu’elle termina ainsi :

« Faites, Seigneur, que la tête de cet orgueilleux Holopherne soit coupée par sa propre épée ! Qu’il soit pris par ses propres yeux dans le piège de ma beauté ! Qu’il soit frappé par l’agrément des paroles qui sortiront de mes lèvres ! Donnez-moi assez de constance dans le cœur pour le mépriser, et assez de force pour le perdre. Ce sera un monument glorieux pour votre nom que ce grand guerrier périsse par la main d’une femme. »

Henriette. Comment ! elle veut aller le tuer toute seule au milieu de toute son armée ? Jamais elle ne le pourra.

Grand’mère. Elle ne le pourrait certainement pas sans la protection de Dieu. Mais sa confiance sera récompensée, comme tu vas le voir.

Judith, ayant terminé sa prière, se releva ; elle appela une de ses servantes de confiance ; elle quitta les habits de veuve qu’elle portait depuis trois ans ; elle se lava et se parfuma tout le corps ; elle frisa ses cheveux, mit une superbe coiffure, se revêtit des habits magnifiques qu’elle avait portés jadis, avant qu’elle fût veuve ; elle mit des chaussures très-riches, des bracelets, des pendants d’oreilles, des bagues et ses plus beaux ornements.

Dieu ajouta un nouvel éclat à la beauté de cette sainte femme, afin qu’elle parût à tous d’un charme incomparable. Judith fit porter avec elle, par la jeune fille qui la servait, un panier dans lequel elle mit du vin, un vase d’huile, de la farine, des figues sèches, du pain et du fromage.

Paul. Pourquoi emporte-t-elle de quoi manger ? elle en aurait trouvé dans le camp d’Holopherne.

Grand’mère. Elle ne voulait pas se nourrir de viandes consacrées aux idoles. Ensuite elle ne voulait rien recevoir des ennemis de Dieu et de son pays.

Elles arrivèrent à la porte de la ville où l’attendaient Ozias et les Anciens. Tous furent frappés d’étonnement en la voyant si admirablement belle. Ils ne lui firent pourtant aucune demande, et Ozias lui dit seulement :

« Que le Dieu de nos pères vous donne sa grâce, qu’il affermisse toutes les résolutions de votre cœur, et que votre nom soit au nombre des saints et des justes ! » Les autres répondirent : « Ainsi soit-il ! ainsi soit-il ! » Et Judith, priant Dieu, passa la porte avec la fille qui la suivait.