La Bible d’une grand’mère/2

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L. Hachette et Cie (p. 6-13).

II

LES SIX JOURS DE LA CRÉATION

(4000 ans avant J.-C.)



Au commencement, Dieu créa le Ciel, avec tous les esprits ou Anges, qui sont les habitants du ciel ; et la Terre, qui devait être habitée par les êtres matériels que Dieu créa ensuite.

Paul. Qu’est-ce que c’est, matériels ?

Grand’mère. Matériel, est tout ce qui n’est pas esprit ; c’est tout ce qu’on peut voir, ce qu’on peut toucher, ce qu’on peut sentir, ce qui s’use, se décompose, se gâte, c’est-à-dire tout ce qui vit sur la terre, les arbres, les plantes, les animaux, et enfin l’homme, non pas l’âme de l’homme, qui ne meurt jamais, mais son corps, qui est matériel, qui meurt et tombe en pourriture.

La terre était nue et informe ; et il y faisait tout noir.

Paul. Qu’est-ce que c’est, informe ?

Grand’mère. Informe, veut dire qui n’a pas de forme.

Alors Dieu dit : « Que la lumière soit. » Et la lumière fut.

Dieu vit que la lumière était bonne, et il sépara la lumière d’avec les ténèbres. Il donna à la lumière le nom de Jour, et aux ténèbres le nom de Nuit. Et du soir et du matin ce fut le premier jour.

Henri. Est-ce que c’était un jour de vingt-quatre heures comme les nôtres ?

Grand’mère. On n’en sait rien ; il est presque certain que par le mot jour il faut comprendre une époque plus ou moins longue.

Dieu dit ensuite : « Que le firmament soit fait, et qu’il sépare les eaux d’avec les eaux. »

Paul. Qu’est-ce que c’est, le firmament ?

Grand’mère. C’est ce que nous appelons le Ciel.

Et Dieu sépara les eaux qui étaient sous le firmament d’avec celles qui étaient au-dessus. Et cela fut fait.

Gaston. Comment ! mais il n’y a d’eau que sur la terre, il n’y en a pas dans le ciel.

Grand’mère. Il y a de l’eau partout, cher enfant, mais divisée en si petites parcelles que nous ne la voyons pas ; il y en a dans l’air ; s’il n’y en avait pas, nous ne pourrions pas respirer ; il y en a donc dans le ciel. Avant le péché du premier homme, il ne pleuvait jamais, il faisait toujours beau ; mais depuis que le péché d’Adam a fait entrer le mal dans le monde, il y a de la pluie ; et d’où vient-elle ? du ciel, des nuages, qui ne sont pas autre chose que des petites gouttelettes d’eau qui se rencontrent, se réunissent et finissent par devenir trop lourdes pour se soutenir en l’air ; alors, elles tombent sur la terre, et font la pluie.

Dieu donna au firmament le nom de ciel. Et du soir au matin se fit le second jour.

Dieu, voyant que les eaux qui couvraient la terre ne formaient qu’un immense amas de boue, dit encore : « Que les eaux qui sont sur la terre se rassemblent en différents endroits, et que l’élément aride paraisse. » Et cela se fit ainsi.

Petit-Louis. Qu’est-ce que c’est, aride ?

Grand’mère. Aride, veut dire sec, dur. Dieu donna à l’élément aride le nom de Terre ; et il appela Mers et rivières toutes les eaux rassemblées. Et il vit que c’était bon.

Armand. Qu’est-ce que c’est, élément ?

Grand’mère. On appelle élément ce qui compose le monde, la terre l’eau, le feu et l’air, sans lesquels nous ne pourrions pas vivre : sans terre, on ne pourrait avoir rien de solide, qui porte, qui soutienne ; sans air, rien ne pourrait vivre, ni les hommes, ni les arbres, ni même les plantes ; sans feu, tout périrait par le froid ; sans eau, tout mourrait par la sécheresse.

Paul. Mais, Grand’mère, il n’y a pas de feu dehors, et pourtant il n’y fait pas froid.

Grand’mère. Il n’y a pas de feu visible comme dans nos cheminées ; mais il y a le feu du soleil, qui chauffe toute la terre ; il y a le feu du milieu, du centre de la terre, dont la chaleur se fait sentir sur le monde entier.

Valentine. Comment sait-on qu’il y a du feu dans la terre ?

Grand’mère. On le sait d’abord par les volcans.

Gaston. Qu’est-ce que c’est, les volcans ?

Grand’mère, Les volcans sont de hautes montagnes au haut desquelles il y a un énorme trou comme un puits ; et de ce trou, qu’on appelle un cratère, s’élancent presque continuellement des flammes immenses, des pierres brûlantes, du métal fondu…

Françoise. Qu’est-ce que c’est, du métal ?

Grand’mère. C’est du fer, du cuivre, du plomb, de l’argent, de l’or, etc.

Ce métal fondu s’appelle lave ; elle sort du cratère comme une rivière de feu ; elle coule le long de la montagne, et elle brûle tout ce qu’elle touche. Une autre preuve du feu qui existe au centre de la terre, ce sont les sources d’eau chaude qui se trouvent dans une multitude de pays.

Henriette. Je n’ai jamais vu cela, Grand’mère.

Grand’mère. Il va bien des choses que tu n’as pas encore vues, ma chère petite, et qui existent pourtant, mais plusieurs de tes cousins et cousines ont vu des sources d’eaux chaudes. Il y en a de fameuses dans les montagnes des Pyrénées, au midi de la France ; il y en a une très-renommée à Carlsbad, en Bohême : elle s’appelle le Sprudel ; elle est tellement bouillante qu’on y fait cuire des œufs, de la viande même.

Henriette. En êtes-vous bien sûre, Grand’mère ?

Grand’mère. Très-sûre, car j’ai vu de mes propres yeux des pauvres femmes qui faisaient cuire des œufs dans le Sprudel.

Élisabeth. Tu as l’air de ne pas croire ce que dit Grand’mère ; c’est très-mal.

Henriette. Pas du tout ; je crois tout ce que dit Grand’mère ; seulement, j’aime à avoir les preuves qu’elle me donne. Lorsque Grand’mère a vu elle-même, je crois bien plus solidement que lorsqu’on lui a dit.

Grand’mère, riant. Tu as bien raison, chère enfant, de vouloir croire solidement ; en croyant solidement, on fait mieux croire aux autres.

Une dernière preuve du feu qui est au centre de la terre, c’est la chaleur toujours croissante qu’on trouve en creusant la terre.

Louis. Est-ce qu’on a percé la terre jusqu’à l’autre côté ?

Grand’mère. Non, ce serait impossible, puisque la terre a environ trois mille deux cents lieues d’épaisseur, c’est-à-dire douze mille huit cents kilomètres ; il serait impossible de creuser jusqu’au milieu.

Valentine. Alors, comment sait-on qu’il y a du feu ?

Grand’mère. Parce qu’en creusant des puits pour avoir du charbon ou des métaux, comme le cuivre, l’argent, l’or, etc., à mesure que l’on creuse, la chaleur augmente : dans les mines d’or, d’argent, etc., il y a des puits qui ont jusqu’à un kilomètre (1000 mètres) de profondeur ; il y fait tellement chaud qu’on ne pourrait creuser plus loin sans étouffer.

Revenons à la Création. Dieu dit encore : « Que la terre produise de l’herbe verte qui ait de la graine, et des arbres fruitiers qui portent des fruits, chacun selon son espèce, et qui renferment leur semence en eux-mêmes pour se reproduire sur la terre. » Et cela se lit ainsi.

Paul. Pourquoi Dieu veut-il qu’il y ait de la semence et de la graine ?

Grand’mère. Pour multiplier les plantes et les arbres par un mystère que nous ne pouvons pas comprendre : tu sèmes un gland, l’humidité de la terre en fait un chêne ; tu sèmes un grain de blé, cette même humidité en fait du blé ; et ainsi de toutes les semences, et par la seule humidité de la terre. Cela nous montre bien clairement qu’il y a des mystères partout ; c’est-à-dire, des choses que nous ne pouvons pas comprendre, et que nous croyons pourtant, puisque nous les voyons partout et toujours.

Et Dieu vit que cela était bon. Et du soir et du matin se fit le troisième jour.

Dieu dit aussi : « Que le soleil, la lune et les étoiles soient dans le firmament, afin qu’ils séparent le jour d’avec la nuit, et qu’ils servent de signes pour marquer les temps et les saisons, les jours, les mois et les années ; qu’ils luisent dans le firmament, et qu’ils éclairent la terre. » Et cela se fit ainsi.

Valentine. Grand’mère, comment les étoiles peuvent-elles marquer les temps, les saisons, les années ?

Grand’mère. On compte parmi les étoiles de la création le soleil, la lune et d’autres astres (ou étoiles) que tu connaîtras quand tu seras grande. Mais tu peux déjà comprendre que le soleil, en se levant, commence les jours ; qu’en se couchant, il les finit. Tu sais que la lune apparaît nouvelle, tous les mois, c’est-à-dire qu’il lui faut un mois pour faire le tour de la terre. Il en est de même pour les étoiles ; elles apparaissent régulièrement à certaines heures, à certains temps.

Françoise. Oh ! Grand’mère, je ne sais pas tout cela ; je voudrais bien savoir.

Grand’mère. Tu le sauras quand tu seras plus grande, chère enfant, et que tu apprendras ce qu’on appelle l’Astronomie, c’est-à-dire L’étude des astres ou des étoiles. À présent, il faut me laisser continuer l’histoire de la création du monde.

Dieu vit que ce qu’il avait fait était bon. Et du soir et du matin se fit le quatrième jour.

Dieu dit encore : « Que les eaux produisent des animaux vivants qui nagent dans l’eau, et que des oiseaux vivants volent sur la terre, sous le firmament. »

Dieu créa donc les poissons et tous les animaux vivants qui vivent dans l’eau et qui volent dans les airs. Il vit que cela était bon. Et il les bénit en disant :

« Croissez et multipliez ; que les poissons remplissent les eaux, et que les oiseaux se multiplient sur la terre. »

Et du soir et du matin se fit le cinquième jour.

Dieu dit aussi : « Que la terre produise des animaux vivants, chacun selon son espèce, les animaux, les reptiles et les bêtes sauvages. »

Petit-Louis. Qu’est-ce que c’est, les reptiles ?

Grand’mère. Les reptiles sont les animaux sans pattes, qui rampent sur la terre, comme les serpents, les vers, les limaces, etc.

Et Dieu vit que c’était bon.

Gaston. Quelles sont les bêtes sauvages ?

Grand’mère. Ce sont les bêtes qui vivent dans les forêts, comme les lions, les tigres, les ours, les loups, les renards, etc.

Dieu dit ensuite : « Faisons l’homme à notre image et à notre ressemblance, et qu’il commande aux poissons de la mer, aux oiseaux du ciel aux bêtes, à toute la terre, et à tous les reptiles qui se meuvent sur la terre. »

Dieu créa donc l’homme à son image : il prit de la terre, la pétrit et en fit un homme ; ensuite il souffla dessus, et lui donna par ce souffle la vie et une âme immortelle et intelligente, le rendant ainsi semblable à son Créateur. Dieu appela cet homme Adam. Il lui présenta les animaux qu’il avait créés pour lui ; les arbres, les fruits, et tout ce qui avait été créé. Adam vit tous les animaux vivants ; ils étaient deux par deux de chaque espèce, et il leur donna à tous un nom. Mais lui était seul de son espèce.

Le Seigneur envoya à Adam un profond sommeil, et pendant ce sommeil. Dieu tira d’Adam une de ses côtes, et il en fit une femme.

Jeanne. Pauvre Adam ! Cela a dû lui faire très-mal.

Grand’mère. Non, il ne l’a pas senti, puisqu’il ne s’est réveillé que lorsque le Seigneur lui présenta la femme qu’il avait créée pour être sa compagne et son amie. Dieu, qui avait fait le monde de rien, avait certainement la puissance de prendre une côte d’Adam sans le faire souffrir.

Marie-Thérèse. Mais pourquoi Dieu n’a-t-il pas fait la femme avec de la terre, comme il avait fait pour Adam ?

Grand’mère. Pour montrer l’union intime qui devait exister entre l’homme et la femme.

Dieu les bénit et leur dit : « Croissez et multipliez ; remplissez la terre, dont vous serez les maîtres ; commandez aux poissons de la mer, aux oiseaux du ciel et à tous les animaux qui vivent sur la terre. Je vous ai donné toutes les herbes, toutes les plantes, tous les arbres et tous les fruits de la terre, pour qu’ils vous servent de nourriture. Et à tous les animaux du monde, à tout ce qui vit sur la terre et dans le ciel, j’ai donné de quoi se nourrir.

Valentine. Est-ce qu’Adam pouvait commander même aux bêtes féroces ?

Grand’mère. Oui, mon enfant. Ce n’était pas alors comme maintenant. Depuis le péché, dont je vous parlais tout à l’heure, l’homme a perdu sa puissance ; il n’a plus le pouvoir qu’il avait alors.

Dieu vit que toutes les choses qu’il avait faites étaient très-bonnes. Et du soir et du matin se fit le sixième jour.