Aller au contenu

La Bible d’une grand’mère/96

La bibliothèque libre.
L. Hachette et Cie (p. 258-260).

XCVI

LE GRAND PRÊTRE HÉLI — LE PETIT SAMUEL

(1020 ans avant J.-C.)



Cent quarante ans après l’histoire de Ruth et de Noémi, les Israélites avaient un grand prêtre qui s’appelait Héli. Il était bon et il servait fidèlement le Seigneur : mais il était très-faible pour ses deux fils Ophni et Phinée, qui faisaient les fonctions de prêtres du Seigneur. Ces deux prêtres étaient des gens impies et mauvais.

Petit-Louis. Comment ! des prêtres mauvais ! mais c’est impossible.

Grand’mère. Hélas ! oui, mon enfant, c’est possible ; Judas, qui était bien plus qu’un prêtre, puisqu’il était apôtre, est devenu abominable, comme vous le savez tous. Il y a de mauvais prêtres, comme il y a de mauvais pères, de mauvaises mères, de mauvais fils. Ophni et Phinée volaient les dons que le peuple offrait au Seigneur ; quand on faisait des sacrifices, ils gardaient pour eux les meilleurs morceaux des bœufs, des veaux, des agneaux qu’on immolait ; ils étaient grossiers, ils s’enivraient : enfin, ils scandalisaient tout le monde, et leur père Héli recevait sans cesse des plaintes contre eux. Le Seigneur avait plusieurs fois reproché à Héli sa faiblesse envers ses fils ; au lieu de les chasser du tabernacle et de sa maison, Héli les excusait toujours, les laissait faire, et leur témoignait la même tendresse.

Neuf ou dix ans auparavant, une sainte femme, nommée Anne, et son mari, nommé Elcana, avaient remis entre les mains d’Héli, leur fils unique, appelé Samuel, pour le faire élever dans le temple et le consacrer au service du Seigneur. Ils avaient été mariés bien des années sans avoir d’enfants ; ils en étaient tout tristes, et Anne demandait instamment au Seigneur de faire cesser sa stérilité. Le Seigneur écouta ses prières, et lui donna le petit Samuel. Dans sa reconnaissance, Anne promit à Dieu qu’elle le consacrerait au service du temple.

En effet, quand le petit Samuel eut trois ans, Anne et son mari le portèrent à Héli, en lui disant qu’ils l’avaient consacré au service du temple. Héli reçut l’enfant, le garda auprès de lui, et vit que ce petit Samuel était béni de Dieu, et qu’il avait une sagesse extraordinaire. Héli s’attacha beaucoup à cet enfant, et le faisait coucher près de lui.

Samuel avait déjà douze ans. Une nuit, il s’entendit appeler : « Samuel, Samuel ! » L’enfant se leva aussitôt, et courut au grand prêtre, croyant que c’était lui qui l’avait appelé. « Ce n’est pas moi qui t’ai appelé, mon fils, lui répondit Héli. Va dormir. » Samuel se recoucha ; à peine fut-il rendormi, qu’il s’entendit encore appeler : « Samuel, Samuel !

— Me voici, » dit-il en courant de nouveau à Héli.

Le grand prêtre, étonné, lui fit la même réponse, et le bon petit Samuel se recoucha encore. Mais, une troisième fois, la même chose étant arrivée, Héli comprit que c’était le Seigneur qui l’appelait. Il lui dit :

« Va et dors ; et si tu t’entends appeler encore, réponds : « Parlez, Seigneur, votre serviteur vous écoute. »

Samuel, toujours docile, retourna dormir ; il entendit de nouveau la voix, et il répondit ce que lui avait commandé le grand prêtre. Alors le Seigneur lui parla ; il lui révéla les iniquités des fils d’Héli, la faiblesse de leur père, l’indignation qu’il en avait témoignée, et qu’Héli n’avait pas écoutée. Il lui dit que sa patience se lassait, qu’il allait punir Héli et toute sa maison, qu’il allait envoyer de grands malheurs aux Israélites, qui négligeaient son culte et qui adoraient de faux dieux.

Quand le Seigneur eut fini de parler, Samuel se recoucha et dormit jusqu’au matin. Le grand prêtre lui demanda : « Que t’a dit le Seigneur ? » Samuel ne répondit pas de peur d’affliger Héli ; mais le grand prêtre lui commanda de parler : « Si tu ne me dis pas tout ce que t’a dit le Seigneur, il te traitera toi-même avec sévérité. » Alors Samuel lui répéta toutes les paroles du Seigneur. Héli répondit humblement : « Le Seigneur est le maître. Qu’il fasse selon sa volonté. »

Pourtant le bon Dieu, dans sa miséricorde, attendit encore trente ans avant d’accomplir sa menace, et, pendant ce temps, tout le peuple d’Israël sut que Samuel était le protégé du Seigneur, et qu’il avait reçu le don de prophétie et de sagesse. Héli et ses fils continuaient à offenser le Seigneur, le père par sa faiblesse, les fils par leur impiété et leur détestable conduite.