La Chanson d’Ève/Et je vous salue, ô mes sons

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Société du Mercure de France (p. 179-180).

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Et je vous salue, ô mes Sons,
Ailes d’oiseaux chantants et d’abeilles,
Ailes de sylphes et de papillons,
Qui voltigez autour de mes oreilles

Anges sonores aux ailes d’or,
Sons de soleil où je m’éveille,
Sons lents et longs, Sons blancs et blonds
De harpes et de violons,
Et de violes ;
Et vous, chansons aiguës de luths
Rayons de lune et sons de flûtes
Où je m’endors sous les étoiles.


Sons de mes mains, Sons de ma bouche,
Beaux Sons des lèvres qui se touchent,
Et de mon cœur qui bat ;
Sons de mes longs cheveux qu’on dénoue,
Où d’invisibles ailes jouent,
Si doucement, si bas,
Que le silence même ne les entend pas.

Sons de la mer où chantent encore
Les mille voix claires des fontaines ;
Sons de la terre, Sons des airs ;
Sons qui portez sur vos épaules
Des urnes de fluides paroles,
Et qui allez, à petits pas,
En des touffes de fleurs où s’étouffent vos pas.