La Fermière
LA FERMIÈRE
Étrennes à madame G***
Amour à la fermière ! elle est
Si gentille et si douce !
C’est l’oiseau des bois qui se plaît
Loin du bruit dans la mousse.
Vieux vagabond qui tends la main,
Enfant pauvre et sans mère,
Puissiez-vous trouver en chemin
La ferme et la fermière !
De l’escabeau vide au foyer
Là le pauvre s’empare,
Et le grand bahut de noyer
Pour lui n’est point avare ;
C’est là qu’un jour je vins m’asseoir,
Les pieds blancs de poussière ;
Un jour… puis en marche ! et bonsoir
La ferme et la fermière !
Mon seul beau jour a dû finir,
Finir dès son aurore ;
Mais pour moi ce doux souvenir
Est du bonheur encore :
En fermant les yeux je revois
L’enclos plein de lumière,
La haie en fleur, le petit bois,
La ferme et la fermière !
Si Dieu, comme notre curé
Au prône le répète,
Paye un bienfait (même égaré),
Ah ! qu’il songe à ma dette !
Qu’il prodigue au vallon les fleurs,
La joie à la chaumière !
Et garde des vents et des pleurs
La ferme et la fermière.
Chaque hiver qu’un groupe d’enfants
À son fuseau sourie,
Comme les Anges aux fils blancs
De la Vierge Marie ;
Que tous, par la main, pas à pas,
Guidant un petit frère,
Réjouissent de leurs ébats
La ferme et la fermière.
Envoi
Ma Chansonnette, prends ton vol !
Tu n’es qu’un faible hommage ;
Mais qu’en avril le rossignol
Chante et la dédommage.
Qu’effrayé par ses chants d’amour,
L’oiseau du cimetière
Longtemps, longtemps se taise pour
La ferme et la fermière !
janvier 1836