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La Maison aux phlox/3/16

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Texte établi par Imprimerie Populaire,  (p. 167-169).


Heureux ceux-là…

Parmi les catastrophes, les douleurs de la guerre, dans le chaos du monde, heureux ceux qui croient fermement en Dieu !

Heureux ceux qui ne perdent pas un instant confiance en Lui, en sa puissance, en sa bonté !

Heureux ceux qui comprennent que, — comme des parents justes punissent leurs enfants, ou leur font avaler, pour les guérir, d’amères pilules, — ainsi, Dieu a le droit et le devoir de rappeler à l’ordre par des douleurs le monde qu’il a créé ; le rappeler à l’ordre, à l’humilité, à la foi, au respect ; le rappeler au véritable sens de la vie.

Heureux ceux qui pratiquent les évangiles ; heureux ceux qui se répètent chaque jour avec un abandon absolu : « Pas un seul cheveu de ma tête ne tombera sans qu’Il le veuille… »

Heureux ceux qui s’inclinent devant sa volonté, et prennent dans leurs deux mains cette épreuve dont Il les afflige, et la Lui offrent de bon cœur, et la subissent de bon cœur, pour la France qu’ils aiment, parce qu’ils croient à la communion des saints, et croient aux mérites, comme s’ils en voyaient grossir le poids, — après leur offrande, — dans la balance divine…

Heureux ceux qui regardent les hommes tenter seuls d’arrêter le fléau, par leurs propres moyens matériels ; qui les regardent, les plaignent et prient pour eux ; prient pour que ceux qui gouvernent voient clair, ne commettent pas d’irréparables erreurs, et que l’Esprit-Saint vienne pour eux avec ses langues de feu.

Heureux ceux qui savent qu’ils ne recevront que ce qu’ils méritent, ou ce dont ils ont besoin pour remplir les mystérieux desseins de Dieu sur eux. Heureux ceux qui transforment en valeurs spirituelles tous les sacrifices que cette guerre les oblige à faire : sacrifices de sang, de temps, d’argent ; tous seront centuplés comme force, si c’est pour Dieu qu’on les offre, qu’on les supporte, pour l’apaiser, pour lui plaire, et parce qu’il a voulu ces choses pour nous.

Heureux ceux qui, dans l’affolement général, parmi ceux que la peur aveugle, s’en vont sans crainte extrême, la main tendue vers leur Père céleste, avec la tranquillité de l’enfant qui sait, qui croit que tant qu’il tient cette main, rien de funeste, même dans les pires catastrophes, ne l’atteindra.

Heureux ceux-là ! Ils savent que lorsque Dieu est avec l’armée, la force de l’ennemi devient nulle. Ils savent que lorsque Dieu le voudra, un contre dix, cent contre mille, pourront gagner ; les prodiges s’accompliront, la victoire étendra ses ailes.

Heureux ceux qui savent que les hommes, seuls avec leur orgueil, jamais ne réussissent définitivement, que le diable peut aider le triomphateur, mais qu’il fuira, lorsque nous aurons obtenu de Dieu qu’Il pardonne les fautes, se mette à la tête des armées, les conduise et les délivre.

Heureux ceux qui croient au surnaturel ! Heureux ceux qui ont la foi. Que tout de suite et longtemps ils se prosternent et demeurent à genoux, pour remercier de ce grand don !

Chandler, juillet 1940.