La Marseillaise de la Courtille

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Rouget de Lisle : sa vie, ses oeuvres, la Marseillaise
Librairies-imprimeries réunies (p. 310-312).

LA MARSEILLAISE DE LA COURTILLE


I

Allons, enfants de la Courtille,
Le jour de boire est arrivé.
C’est pour vous que le boudin grille,
C’est pour vous qu’il est conservé (bis).
Entendez-vous dans la cuisine,
Rôtir ces dindons, ces gigots !
Ma foi, nous serions bien nigauds
Si nous leur faisions triste mine !
A table, citoyens ! videz tous ces flacons !
Buvez, mangez, qu’un vin bien pur humecte vos poumons.


II

Décoiffons chacun sept bouteilles
El ne laissons rien sur les plats ;

D’amour faisons les sept merveilles
Au milieu des plus doux ébats (bis).
Pour nous Français, ah ! quel outrage !
S’il fallait rester en chemin ;
Que Bacchus, par son jus divin,
Elève encor notre courage !

A table, citoyens, etc..
III

Tremblez, lapins, tremblez volailles,
Ou bien prenez votre parti !
Ne tremblez que dans nos entrailles,
Pour aiguiser notre appétit (bis).
Tout est d’accord pour vous détruire.
Chasseurs et gloutons tour à tour ;
Peut-être viendrait-il un jour
Oii c’est vous qui nous feriez cuire.
A table, citoyens, etc..

IV

Quoi ! des cuisines étrangères
Viendraient gâter le goût français !
Leurs sauces fades ou légères
Auraient le veto sur nos mets I (bis)
Dans nos festins quelle déroute,
Combien nous aurions à souffrir !
Nous ne pourrions plus nous nourrir
Que de fromage ou de choucroute !
A table, citoyens, etc..

V

Amis, dans vos projets bachiques
Sachez ne pas trop vous presser :
Epargnez ces poulets étiques
Laissez-les du moins s’engraisser (bis) ;

Mais ces chapons aristocrates,
Chanoines de la basse-cour,
Qu’ils nous engraissent à leur tour,
Et n’en laissons rien que les pattes !
A table, citoyens, etc..

VI

Amour sacré de la bombance,
Viens élargir notre estomac !
Quand on pense à panser sa panse
Faut-il consulter l’almanach ! (bis)
Du plaisir de manger et boire
Nous te devons l’invention ;
Sauve-nous d’indigestion
Pour que rien ne manque à ta gloire !
A table, citoyens ! Videz tous les flacons !
Buvez, mangez, qu’un vin bien pur hunie ;te vos poumons !