La Muse gaillarde/Aubade

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La Muse gaillardeAux éditions Rieder (p. 11-12).
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AUBADE


Ta délicieuse altesse
Veut-elle accepter mon bras ?
Nous irons où tu voudras ;
Tout avec toi m’est liesse ;
Tu verras comme aujourd’hui
Le ciel est épanoui
Et plein de délicatesse.


Tout semble bon à manger ;
Dans l’air amoureux et moite
Quelques nuages d’ouate
Floconnent, troupeau léger
Qui traîne sa marche lente
Sous la garde vigilante
D’un invisible berger.

Ouvre tes claires mirettes,
Mes deux étoiles du jour ;
Et regarde tout autour
De toi ces blanches fleurettes :
On ne sait pas tout d’abord
Si c’est de la neige encor,
Ou déjà les pâquerettes.

C’est le Printemps. Ô printemps !
Aux tempes toujours fleuries ;
Je l’entends dans les prairies
Rire avec toutes ses dents, –
Ô vieillard à barbe blonde,
Aussi ridé que le monde,
As-tu donc toujours vingt ans ?