La Petite-Poste dévalisée/Lettre 42
À Monsieur l’Avant-Coureur.
Comme vous êtes de tous les Journalistes le plus pressé, je m’adresse à vous, parce que je le suis aussi. On dit qu’il va paroître un Dictionnaire de Cuisine ; & je tremble que le Public n’aille croire, quand il aura cet ouvrage auquel je n’ai point de part, que la matière est épuisée. Or je suis certain, Monsieur, à moins que l’Auteur du Dictionnaire ne soit sorcier (ce qui n’est pas bien ordinaire), qu’il n’aura pas deviné plus de cinquante combinaisons naturelles que j’ai faites sur les hors-d’œuvres, & plus de deux cens sur les entreméts. Ne pourriez-vous pas, Monsieur, supplier d’avance le Public de se persuader que les Dictionnaires ne contiennent pas tout. Il me semble que cela n’est pas difficile pour un homme aussi habile que vous. J’ai certainement le plus grand intérêt à me voir annoncé dans votre feuille, car on dit que c’est la seule dont on ne parle pas mal.
Je suis, Monsieur, avec respect, &c.