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La Physique/Livre II (traduction Hamelin)

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Physique, II
Traduction et commentaire
Traduction par Octave Hamelin.
Texte établi par Octave HamelinFélix Alcan.

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Ce travail peut être considéré comme un spécimen d’une édition de la Physique d’Aristote que nous avons longtemps songé, que nous ne nous engageons pourtant pas à publier.

Mais ce n’est qu’un spécimen imparfait. Car si les trois commentateurs grecs de la Physique : Thémistius, Simplicius et Philopon, ont été dépouillés d’une manière assez complète, il resterait encore beaucoup à faire pour mettre le présent fragment d’édition au courant de l’érudition contemporaine.

Réserve faite des corrections qu’on trouvera indiquées, chacune à sa place, dans le commentaire, on s’est servi du texte donné par Prantl en 1879.

ARISTOTE
PHYSIQUE II
TRADUCTION


CHAPITRE PREMIER


Parmi les êtres, les uns existent par nature, les autres en vertu d’autres causes. [Ceux qu’]on déclare exister par nature, [ce sont] les animaux et leurs parties, les plantes et les corps simples, tels que la terre, le feu, l’eau et l’air.

Or, tous les êtres dont nous venons de parler présentent une différence manifeste avec ceux qui n’existent point par nature : chacun des premiers, en effet, a en soi-même un principe de mouvement et de fixité, les uns quant au lieu, les autres quant à l’accroissement et au décroissement, d’autres quant à l’altération. Au contraire un lit, un manteau et tout autre objet de cette espèce, en tant que chacun mérite son nom et dans la mesure où il est un produit de l’art, sont dépourvus de toute tendance naturelle au changement ; [s’]ils en ont une, c’est en tant qu’ils offrent cet accident d’être en pierre, en terre ou en quelque mixte et sous ce rapport seulement ; car la nature est un principe et une cause de mouvement et de repos pour [la chose] en quoi elle réside immédiatement [et à titre d’]attribut essentiel et non pas accidentel de cette chose.

Je dis [à titre d’attribut] non accidentel parce qu’il pourrait arriver qu’un homme, étant médecin, fût lui-même la cause de sa propre santé ; et cependant ce n’est pas en tant que recevant la guérison qu’il possède l’art médical ; mais, par accident, le même homme est un médecin et le sujet d’une guérison : aussi ces deux [qualités] se séparent-elles l’une de l’autre. Même observation relativement à toutes les autres choses artificielles : aucune n’a vraiment en elle-même le principe de sa production, les unes l’ont en d’autres choses et hors d’elles, tels une maison et tout objet fait de d’homme ; les autres l’ont bien en elles-mêmes, mais ce n’est pas par essence, [savoir] toutes celles qui peuvent être par accident causes d’elles-mêmes.

La nature est donc ce que nous avons dit. Par conséquent ont une nature toutes les choses qui possèdent un tel principe. Or toutes ces choses sont des substances : en effet, ce sont des sujets, et la nature réside toujours dans un sujet. Sont [choses] conformes à la nature et toutes ces substances et tous leurs attributs essentiels, par exemple pour le feu, la translation vers le haut ; car ce n’est pas là une nature ni une chose qui ait une nature, mais c’est quelque chose qui arrive par nature et conformément à la nature. Nous venons de dire ce qu’est la nature et ce que c’est que d’être par nature et conformément à la nature. Quant à essayer de démontrer que la nature existe, ce serait ridicule. Il est manifeste en effet qu’il y a beaucoup d’êtres tels [que ceux à qui nous avons attribué une nature]. Or démontrer ce qui est manifeste par ce qui est obscur, c’est le fait d’un homme incapable de discerner ce qui est connaissable par soi de ce qui ne l’est pas. C’est [une maladie] dont on peut être affligé, cela est clair : il peut arriver en effet qu’un aveugle de naissance raisonne sur les couleurs. [Mais] on voit que de tels gens sont forcés de discourir sur les mots sans avoir d’idées.

Selon l’opinion de quelques hommes, la nature et l’essence des choses naturelles consistent dans leur sujet prochain et informe par lui-même : ainsi la nature du lit est le bois, celle de la statue l’airain. La preuve, dit Antiphon, c’est que si l’on enfouit un lit et que la putréfaction ait la force de faire pousser un rejeton, il se produira non un lit, mais du bois ; ce qui montre que la façon conventionnelle et artificielle [donnée à la chose] n’existe [en elle] que comme accident, tandis que l’essence est ce qui présente une durée continue et reçoit tout cela. Si ces [sujets] à leur tour se trouvent relativement à d’autres dans le même rapport [où la forme était relativement à eux], comme il arrive par exemple pour l’airain et l’or relativement à l’eau, pour les os et le bois relativement à la terre ou encore dans tout autre cas, [alors, dit-on], les nouveaux sujets constituent la nature et l’essence des premiers. C’est pourquoi d’après les uns le feu, d’après les autres la terre, d’après d’autres l’air ou l’eau et d’après d’autres encore plusieurs de ces [corps] ou tous [ensemble] constituent la nature de l’univers. Car celui ou ceux de ces corps qu’on regarde comme étant le sujet des choses, on le présente comme faisant l’essence de tout, tandis que le reste ne serait, à leur égard, qu’affections, habitudes et dispositions. Et chacun d’eux serait éternel (car il n’y aurait point de changement pour le faire sortir de sa manière d’être), tandis que tout le reste subirait à l’infini la génération et la corruption.

En un sens donc on appelle nature la matière qui sert de sujet immédiat à chacune des choses qui ont en elles-mêmes un principe de mouvement et de changement ; mais, en un autre sens, c’est le type et la forme telle qu’elle est dans le concept. De même, en effet, qu’on appelle art [dans les choses] ce qu’il y a [en elles] de conformité à l’art et de technique, de même on appelle nature [ce qui constitue dans les choses] la conformité à la nature et le caractère naturel. Or là, [c’est-à-dire dans le domaine des choses artificielles], nous ne dirons pas d’un objet qu’il est conforme à l’art, qu’il y a en lui de l’art, s’il n’est [par exemple] qu’un lit en puissance et ne possède pas encore la forme du lit ; [193b] [ne disons donc] pas non plus [l’équivalent] à propos des choses naturelles [dans le même cas] : car la chair ou l’os en puissance ne possède pas encore sa nature et n’existe pas par nature jusqu’à ce qu’il ait reçu la forme de la chair ou de l’os telle qu’elle est dans le concept, celle que nous énonçons pour définir l’essence de la chair ou de l’os. De sorte que, en cet autre sens, la nature doit être, dans les choses qui possèdent elles-mêmes un principe de mouvement, le type et la forme, [forme] non séparable si ce n’est logiquement. Quant à ce qui résulte de [la réunion] de ces deux [termes, matière et forme], ce n’est plus une nature, mais c’est une chose existant par nature, un homme par exemple. Cette nature est plus [nature] que la matière : en effet chaque chose est dite [être ce qu’elle est] plutôt quand elle est en acte que lorsqu’elle est en puissance. En outre un homme naît d’un homme (mais non un lit d’un lit et c’est pourquoi on dit que la figure du lit n’en est pas la nature, que c’est le bois [qui est cette nature], parce que, par bourgeonnement, il se produirait du bois et non un lit) ; or si cela est, c’est encore que la forme constitue la nature, car un homme naît d’un homme.

En outre, la φύσις (physis), au sens de génération, est le passage à la φύσις (physis), [au sens de nature]. Car, sans doute, le mot ἰάτρευσις iatreusis ou guérison, [quoique de formation analogue au mot φύσις dans le sens de génération] ne signifie pas le passage à l'ἰατρική, l’art de guérir, mais à l'ὑγίεια, la santé, puisque ἰάτρευσις, la guérison vient nécessairement de l'ἰατρική, l’art de guérir au lieu d’y aboutir ; mais c’est un autre rapport qu’il y a entre φύσις (physis), au sens de génération et φύσις (physis), [au sens de nature], car le φυόμενον [ou l’engendré], en tant qu'on dit de lui : φύεται [c'est-à-dire en tant que sa génération est en train de s’accomplir], va d’un point de départ vers un terme. Vers quel terme ? Assurément, ce terme n’est pas ce dont l’engendré vient, mais ce vers quoi il tend. [Or, ce vers quoi il tend, c’est la forme]. Donc c’est la forme qui est la nature.

Mais la forme et la nature se disent en deux sens, car la privation est forme en quelque façon. La privation est-elle donc un contraire dans la génération absolue aussi ou bien n’en est-elle pas un ? Nous aurons à le rechercher plus tard.


CHAPITRE II



Après avoir distingué les divers sens du mot nature, il est à propos d’examiner quelle différence il y a entre le mathématicien et le physicien. En effet les surfaces, les solides, les longueurs et les points sur lesquels spécule le mathématicien [ne] sont [que] les attributs des corps naturels ; et d’autre part l’astronomie est-elle autre chose que la physique ou n’en est-elle pas [plutôt] une partie ? Il serait étrange qu’il appartînt au physicien de connaître l’essence du soleil et de la lune, nullement leurs attributs essentiels, étant donné surtout que, en fait, les physiciens parlent de la figure de la lune et du soleil, se demandent si le monde et la terre sont sphériques ou non. La vérité est donc que ces attributs sont bien aussi l’objet du mathématicien mais non en tant qu’ils sont les limites de corps naturels. Et s’il étudie les attributs, ce n’est pas en tant qu’appartenant à des substances de telle ou telle nature. C’est pourquoi il sépare les attributs ; et en effet ils sont, par la pensée, séparables du mouvement. Cette séparation est indifférente, et il n’en résulte aucune erreur.

[194a] Quant aux partisans des idées, ils font la même opération sans qu’ils s’en aperçoivent : car ils séparent les essences naturelles, bien moins séparables que les essences mathématiques. On s’apercevra de la différence dès qu’on essaiera de donner des définitions touchant l’un et l’autre de ces deux ordres de choses, qu’il s’agisse des sujets eux-mêmes ou des accidents. L’impair, le pair, le droit et le courbe d’abord, puis, pour passer aux sujets, le nombre, la ligne et la figure existeront sans le mouvement ; mais non pas la chair, l’os, l’homme : ces derniers termes sont analogues au nez camus et non au courbe. Les parties les plus physiques des mathématiques, soit l’optique, l’harmonique et l’astronomie, font aussi apercevoir cette même différence, car leur rapport à la physique est inverse de celui de la géométrie à la même science : la géométrie étudie la ligne physique en tant que la ligne n’est pas physique ; l’optique, au contraire, étudie la ligne mathématique, mais en tant que, de mathématique, la ligne est devenue physique.

La nature ayant donc deux sens, celui de forme et celui de matière, il faut l’étudier de la même manière que nous chercherions l’essence du camus et, par conséquent, des objets de cette sorte ne sont ni sans matière ni pourtant considérés sous leur aspect matériel.

Mais quoique cela soit ainsi, on pourrait continuer de se demander, la nature étant double, de laquelle s’occupe le physicien ou si c’est du composé des deux. Que si c’est du composé des deux, par là même il s’occupe de l’une et de l’autre. La question revient donc à savoir si c’est à une seule et même science, la physique, qu’il appartient de connaître l’une et l’autre. A regarder les anciens, il semblerait que la physique portât sur la matière, car seuls Empédocle et Démocrite se sont un peu attachés à la forme et à la quiddité. Mais s’il est vrai que l’art imite la nature et que quand il s’agit des choses artificielles un même savoir connaisse la forme et la matière dans certaines limites (par exemple c’est au médecin de connaître la santé, puis la bile et le flegme desquels est faite la santé ; pareillement, c’est à celui qui exerce le métier de bâtir de connaître la forme de la maison et que sa matière consiste en tuiles et en bois ; ainsi également pour les autres arts), alors il doit appartenir à la physique de connaître les deux natures.

En outre, c’est de la même science que relèvent ce qu’on a en vue ou la fin et ce qui est en vue de la fin. Or la nature est fin, est chose qu’on a en vue (en effet, là où il y a un terme pour un mouvement continu, et tels sont les mouvements naturels, ce terme est fin, est quelque chose qu’on a en vue. Aussi le poète est-il ridicule quand il va jusqu’à dire : « Il a atteint le terme final en vue duquel il était né. » Car ce n’est pas toute espèce de terme qui prétend être une fin, c’est seulement celui qui est le meilleur), pendant que, d’autre part, les arts font leur matière, les uns la faisant absolument, les autres l’appropriant à leurs besoins, et que nous-mêmes nous faisons usage de toutes choses en les considérant comme existant en vue de nous. (En effet, nous sommes nous-mêmes des fins en un sens et la chose qu’on a en vue se prend en deux sens, comme nous l’avons dit dans notre ouvrage sur la philosophie). [194b] Il y a donc deux sortes d’arts qui commandent à la matière et, par suite, la connaissent : ce sont, d’une part, les arts qui font usage des choses, et, de l’autre, ceux qui, parmi les arts poétiques, sont architectoniques. Aussi l’art qui fait usage des choses est-il, à sa façon, architectonique, avec cette différence que la première sorte d’arts connaît la forme, tandis que celui des arts, qui est architectonique parmi les arts poétiques, connaît la matière. (En effet, le pilote connaît et prescrit quelle doit être la forme du gouvernail, l’autre artisan de quel bois le gouvernail doit être fait et au moyen de quels mouvements). En somme, toute la différence entre la nature et l’art est que dans les choses naturelles, l’existence en est donnée. Mais, d’un côté comme de l’autre, la connaissance de la fin et celle de la matière ne font qu’un.

Enfin la matière est un relatif, car, autre forme, autre matière.

Maintenant, jusqu’à quel point le physicien doit-il connaître la forme et l’essence ? N’est-ce pas dans la mesure où le médecin connaît les tendons et le fondeur l’airain, c’est-à-dire jusqu’à un certain point ? En effet, toutes les formes naturelles sont en vue de quelque chose et appartiennent à des êtres dont l’essence n’est séparable que spécifiquement et réside dans la matière, puisque c’est, avec le soleil, un homme qui engendre un homme. Quant à la manière d’être et à l’essence de l’être séparé, les déterminer est l’œuvre de la philosophie première.


Après ces explications, nous avons à nous occuper des causes et à chercher ce qu’elles sont et quel en est le nombre. Le présent traité, en effet, a pour but un savoir ; or personne ne croit savoir une chose avant d’avoir saisi le pourquoi de cette chose (c’est-à-dire saisi sa cause première) ; il est donc évident que c’est là ce que nous avons à faire nous-mêmes au sujet de la génération et de la corruption, ainsi que de tout changement naturel, afin que, connaissant les principes de ces changements, nous tâchions d’y ramener toutes nos recherches.

En un sens, on appelle cause ce dont une chose est faite et qui y demeure immanent : ainsi l’airain est cause de la statue, l’argent de la tasse et les choses plus générales que l’airain et l’argent sont causes aussi de la statue et de la tasse.

En un second sens, on appelle cause la forme et le modèle, je veux dire la définition de la quiddité et aussi les choses plus générales qu’elle : ainsi le rapport de deux à un est la cause de l’octave et encore, d’une manière générale, le nombre et tout ce qui fait partie de la définition du rapport de deux à un.

En un autre sens encore, on appelle cause ce dont vient le premier commencement du changement ou de la mise au repos : ainsi l’auteur d’une décision est cause, de même le père est cause de l’enfant et, d’une manière générale, l’efficient est cause de ce qui est fait et ce qui fait changer de ce qui change.

En un dernier sens, on appelle cause la fin, je veux dire la chose qu’on a en vue : ainsi la santé est la cause de la promenade. En effet, pourquoi la promenade ? C’est, disons-nous, afin d’avoir la santé et, en parlant de cette manière, nous croyons avoir indiqué la cause. Et nous croyons avoir indiqué du même coup celle de toutes les choses qui, mises en mouvement par une autre chose encore, sont intermédiaires entre ce moteur et la fin, comme sont intermédiaires entre le moteur et la santé l’amaigrissement, la purgation, les remèdes, les instruments : [195a] car toutes ces choses sont en vue de la fin et ne diffèrent entre elles que parce que les unes sont des actions et les autres des instruments.

Tel est donc vraisemblablement le nombre des acceptions dans lesquelles on prend les causes. Mais, par suite de cette pluralité de sens, il arrive qu’une même chose ait plusieurs causes et cela non par accident : ainsi, pour la statue, la statuaire et l’airain, et cela non en tant que la statue est autre chose, mais en tant que statue ; seulement il y a une différence : l’une de ces choses est cause comme matière, l’autre comme ce dont vient le mouvement. Il y a même des choses qui se trouvent être mutuellement causes l’une de l’autre ; ainsi, les exercices pénibles sont cause du bon état du corps et celui-ci est cause des exercices pénibles ; seulement ce n’est pas dans le même sens : l’une de ces choses est cause comme fin, l’autre comme principe du mouvement. Enfin, la même chose est cause des contraires ; et, en effet, ce qui par sa présence est cause de tel effet, nous en regardons quelquefois l’absence comme cause de l’effet contraire ; ainsi, l’absence du pilote est la cause du naufrage, alors que sa présence eût été cause du salut du bateau.

Quelles que soient d’ailleurs les diverses nuances que chaque classe comporte, toutes les causes que nous venons d’indiquer tombent très manifestement sous quatre classes. Les lettres par rapport aux syllabes, les matériaux par rapport aux objets fabriqués, le feu et les autres éléments par rapport aux corps composés, les parties par rapport au tout, les prémisses par rapport à la conclusion sont causes comme ce dont les choses sont faites. Des choses que nous venons d’opposer, les unes sont donc causes à titre de sujet, telles les parties ; les autres sont causes à titre de quiddité : le tout, le composé, la forme. De leur côté, la semence, le médecin, l’auteur d’une décision et, d’une manière générale, l’efficient, tout cela est cause comme ce dont vient le commencement du changement, de l’immobilité ou du mouvement. D’un autre côté encore une chose est cause, à titre de fin et de bien, des autres choses, car ce qu’on a en vue veut être la chose excellente par-dessus les autres et leur fin : or il est indifférent qu’on dise ici que la cause est le bien lui-même ou qu’elle est le bien apparent.

Tels sont donc la nature et le nombre des causes en tant que ramenées à des espèces ; mais les aspects des causes individuellement énumérés sont une multitude. Toutefois ces aspects mêmes, quand on les résume sous certains chapitres, deviennent moins nombreux. On peut, en effet, distinguer plusieurs sens dans lesquels on parle des causes lorsqu’on les considère quant à la variété de leurs aspects. C’est ainsi que, même parmi des causes d’une espèce donnée, l’une est antérieure et l’autre postérieure : tels, par rapport à la santé le médecin et le savant, par rapport à l’octave le double et le nombre ; tels, d’une manière générale, la classe et, par opposition, le particulier. En parlant de causes d’une même espèce, on distingue encore les causes par soi et les causes accidentelles, et celles-ci de leurs genres : ainsi c’est autrement que Polyclète et le statuaire sont causes de la statue, parce que c’est pour le statuaire un accident que d’être Polyclète ; et, de leur côté, les classes qui embrassent l’accident sont causes autrement que l’accident, dans le cas, par exemple, où l’on dirait que l’homme, ou même en général l’animal, est cause de la statue. [195b] Il y a, du reste, en un autre sens, des accidents qui sont plus rapprochés et d’autres plus éloignés, comme dans le cas où l’on dirait qu’un blanc et un musicien sont causes de la statue. Mais toutes les causes, soit proprement dites, soit par accident, se prennent tantôt comme puissances et tantôt comme actes : par exemple la cause de la construction d’une maison, c’est le constructeur ou le constructeur en train de construire. A propos des choses dont les causes sont causes, il faudrait répéter ce que nous venons de dire : par exemple, c’est de cette statue, ou de la statue, ou en général de la matière que la cause est cause et de même pour les choses qui ne sont qu’accidentellement causées par les causes. Ajoutons que les choses dont les causes sont causes et les causes peuvent être prises et suivant chacune de leurs acceptions séparément et en en combinant plusieurs : on dira, par exemple, non pas que Polyclète ou que le statuaire, mais que le statuaire Polyclète est cause de la statue. Néanmoins, toutes ces acceptions se ramènent au nombre de six, dont chacune comporte elle-même deux acceptions ; ce sont : le particulier et le genre, le par soi et l’accident (et aussi l’accident et ses genres), le combiné et le simple, toutes ces acceptions se rapportant chacune tantôt à l’acte et tantôt à la puissance.

La différence est que les causes en acte et particulières existent ou sont inexistantes en même temps que ce dont elles sont causes : ainsi ce médecin, en train d’appliquer un remède, existe en même temps que ce malade qu’il est en train de guérir, et ce constructeur, en train de construire, existe en même temps que cette maison qu’il est en train de construire, tandis qu’il n’en est pas toujours de même pour les causes en puissance, et les choses dont elles sont les causes : car la maison et le constructeur ne se corrompent pas en même temps.

Quelle que soit d’ailleurs la variété des causes, il faut toujours, pour chaque chose, chercher sa cause suprême, comme en tout le reste on recherche le parfait : par exemple, l’homme construit parce qu’il est constructeur, et le constructeur l’est par l’art de construire : là est donc la cause qui est plus primitive que les autres ; et ainsi dans tous les cas.

Ajoutons que les genres sont causes des genres et le particulier du particulier : par exemple, le statuaire est cause de la statue et ce statuaire de cette statue ; que les puissances sont causes des possibles, les causes en acte des choses en acte. Contentons-nous de cette détermination du nombre des causes et des différents sens suivant lesquels elles sont causes.



Chapitre IV

[modifier]

Cependant on parle de la fortune et du hasard comme étant eux aussi des causes ; beaucoup de choses, dit-on, existent et arrivent par l’action de la fortune et par celle du hasard. Nous avons donc à rechercher sous quel titre, parmi les causes que nous avons énumérées, se placent la fortune et le hasard ; puis si la fortune et le hasard sont la même chose ou s’ils diffèrent, et, question plus générale, quelle est l’essence de la fortune et du hasard.

Avant tout, existent-ils ? On se demande, en effet, quelquefois s’ils existent ou non. [196a] Aussi prétend-on que rien n’arrive par le fait de la fortune et que, pour toutes les choses qui sont dites provenir du hasard ou de la fortune, il y a une cause déterminée. Lorsqu’un homme, par exemple, vient par fortune sur la place publique et y rencontre celui qu’il voulait, mais sans s’y attendre, la cause de la rencontre c’est qu’il a voulu se rendre sur la place publique pour ses affaires. De la même manière, pour les autres événements attribués à la fortune, il est toujours possible de trouver une cause à l’œuvre et non la fortune. Si d’ailleurs la fortune existait, i1 y aurait vraiment une étrangeté manifeste dans ce fait, qu’on ne s’expliquerait pas, savoir que, parmi les anciens sages qui ont traité des causes de la génération et de la corruption, jamais personne n’a rien précisé sur elle. C’est, semble-t-il, que, selon leur jugement aussi, rien n’existe par la fortune.

Mais voici qui est surprenant à son tour : il y a beaucoup de choses qui arrivent ou existent par le fait de la fortune ou du hasard et qui toutes, on ne l’ignore pas, peuvent, comme le demande le vieil argument contre l’existence de la fortune, être rapportées à quelqu’une des causes déterminées des événements : or, tout le monde soutient, malgré tout, que parmi les événements les uns proviennent de la fortune et que les autres ne proviennent pas de la fortune.

Aussi les anciens sages devaient-ils parler, dans quelque mesure au moins, de la fortune ; et comme, d’ailleurs, la fortune n’était certes pas à leurs yeux identique à quelqu’ un de ces principes tels que l’amitié, la discorde, l’esprit, le feu ou tout autre pareil, nous dirons donc que c’est une étrangeté de leur part que d’avoir passé sous silence la fortune, soit qu’ils n’en admissent pas, soit qu’ils en reconnussent l’existence, et cela alors surtout qu’ils en font usage. Ainsi Empédocle dit que ce n’est pas constamment que l’air se sépare pour se placer tout en haut, mais qu’il en est à cet égard comme il plaît à la fortune ; tellement qu’il écrit dans sa cosmogonie : « Il se rencontra que l’air s’étendit alors de cette façon, mais souvent ce fut d’une autre. » Ce philosophe dit encore très souvent que les parties des animaux ont été produites par le fait de la fortune. D’autres assignent comme cause à notre ciel et à tous les mondes le hasard ; en effet, c’est du hasard que provient la formation du tourbillon et du mouvement, qui ont séparé les éléments et amené l’univers à l’ordre que nous voyons. Or ceci encore est bien pour surprendre. Ils professent, en effet, que l’existence et la production des animaux et des plantes ne sont pas dues à la fortune, que la cause en est dans la nature, dans l’esprit, ou dans quelque autre chose de tel (car, disent-ils, ce n’est pas ce qui plaît à la fortune qui naît de la semence de chaque être ; de celle de tel être, c’est un olivier, de celle de tel autre, c’est un homme), tandis que le ciel et les plus divins des êtres visibles proviendraient du hasard sans avoir aucune cause comparable à celle des animaux et des plantes. [196b] Si toutefois il en était ainsi, cela même aurait été digne de remarque et on aurait bien fait d’en parler. Car, outre que ce qu’on avance est, à d’autres égards encore, contraire à la raison, l’étrangeté de la thèse est rendue plus grande par le fait qu’on voyait que dans le ciel rien n’arrive par hasard, au lieu que, dans les choses qui, disait-on, ne proviennent pas de la fortune, beaucoup d’effets proviennent de la fortune ; cependant c’est le contraire qui devrait être.

D’autres encore pensent que la fortune est une cause, mais cachée à la raison humaine, parce qu’elle est quelque chose de divin et de supérieur. Ainsi le hasard et la fortune existent, et nous avons à chercher ce qu’est le hasard et ce qu’est la fortune, s’ils ne font qu’un ou diffèrent, et comment ils rentrent sous les causes que nous avons distinguées.



Chapitre V

[modifier]

Tout d’abord donc nous voyons des faits qui se produisent toujours de même, d’autres qui ont lieu plupart du temps : or il est évident que la fortune n’est dite être la cause ni des uns ni des autres, et que les effets de la fortune ne sont dits être ni du nombre des faits nécessaires, ni du nombre de ceux qui ont lieu la plupart du temps. Mais comme il y a des faits qui se produisent par exception à ceux-là, et que ce sont eux que tous affirment être des effets de la fortune, il est évident que la fortune et le hasard existent : car nous savons que de tels faits sont des effets de la fortune, et que les effets de la fortune sont de tels faits.

Maintenant, parmi les faits, les uns se produisent en vue de quelque chose, les autres non ; et parmi les premiers, les uns se produisent par choix, les autres non par choix, mais les uns et les autres parmi ceux qui ont lieu en vue de quelque chose ; il est donc manifeste que, parmi les faits qui font exception à la nécessité et à ce qui a lieu la plupart du temps, il y en a qui peuvent exister en vue de quelque chose. Or les faits qui existent en vue de quelque chose sont tous ceux qui peuvent être accomplis par la pensée ou par la nature.

Lors donc que de tels faits se produisent par accident, nous disons que ce sont des effets de la fortune. (De même, en effet, que l’être est tantôt par soi, tantôt par accident, de même en peut-il être des causes : par exemple, l’art de bâtir est la cause par soi de la maison, le blanc et le musicien en sont les causes par accident. La cause par soi est en même temps une cause déterminée : car la multitude des accidents possibles d’une chose est infinie). Ainsi, comme nous le disions, lorsque ce caractère accidentel se rencontre dans des faits susceptibles d’être produits en vue de quelque chose, on dit qu’ils sont des effets du hasard ou des effets de la fortune. (Nous aurons tout à l’heure à marquer la différence de ces deux causes ; pour le moment, contentons-nous de cette vérité évidente que toutes les deux sont parmi les faits susceptibles d’être produits en vue de quelque chose). [197a] Par exemple, un homme, s’il avait su, aurait pu aller en tel lieu pour recevoir son argent, alors que son débiteur y touche le montant d’une quête ; il y est allé, mais non en vue de cela ; il n’y est allé et ne l’a fait pour toucher son argent que par accident ; et, d’une part, cet acte d’aller là, il l’a accompli alors qu’il ne se rend pas la plupart du temps ou nécessairement en ce lieu et, d’autre part, la fin, c’est-à-dire le recouvrement de la dette, n’est pas du nombre des causes finales contenues dans la nature de l’être lui-même, mais du nombre des choses qui relèvent du choix et de la pensée. Dans ces conditions on dit que cet homme est allé là par un effet de la fortune. Si, au contraire, il y était allé par choix, en vue de ce recouvrement, et soit en s’y rendant toujours, soit comme recouvrant là de l’argent le plus souvent, alors il n’y serait pas allé par un effet de la fortune. Il est donc évident que la fortune est une cause par accident, dont les effets se rangent sous le genre de ce qui arrive en vue de quelque chose dans l’espèce de ce qui relève du choix ; d’où il suit que la fortune et la pensée se rapportent aux mêmes choses, car le choix ne va pas sans la pensée.

En somme, il est nécessaire que les causes d’où les effets de la fortune sont susceptibles de provenir soient indéterminées. De là vient que la fortune passe pour être de la classe de l’indéterminé et pour être cachée à l’homme et qu’on peut, en un sens, émettre l’opinion que rien n’est produit par la fortune. Tout cela, en effet, se dit justement parce qu’avec raison. Car, en un sens, quelque chose est produit par la fortune, puisque quelque chose se produit par accident et que la fortune est une cause par accident ; mais comme cause absolue, la fortune n’est cause de rien : ainsi le constructeur est cause de la maison et accidentellement le joueur de flûte ; et, du fait que, étant allé là, on a recouvré son argent, sans y être allé en vue de cela, les causes sont en quantité infinie : y être allé par la volonté de voir quelqu’un ou comme demandeur, ou comme défendeur. De même, dire que la fortune est quelque chose de contraire à la raison est juste ; car la raison porte sur ce qui est toujours ou sur ce qui est la plupart du temps, tandis que la fortune porte sur ce qui fait exception à ces deux ordres de choses. (Aussi, comme les causes qui sont causes de cette façon, c’est-à-dire relativement à des effets qui ne sont ni toujours ni la plupart du temps, ou en d’autres termes les causes accidentelles, sont indéterminées, la fortune est elle-même une cause indéterminée. Cependant on pourrait se demander dans quelques cas si n’importe quelles causes sont susceptibles d’être les causes des effets de la fortune, si, par exemple, la cause de la santé n’est pas le courant d’air ou l’échauffement dû au soleil, et non le fait que les cheveux ont été coupés : car, parmi les causes par accident, les unes sont plus prochaines que les autres). D’autre part, on dit que la fortune est bonne lorsqu’un bien en résulte, mauvaise lorsque c’est un mal ; qu’elle est fortune prospère ou au contraire infortune, si ce bien et ce mal ont de la grandeur. Par suite, on parle aussi de fortune prospère et d’infortune lorsqu’il s’en faut de peu qu’on ait éprouvé un grand mal ou un grand bien : car la pensée prononce que ce bien et ce mal sont comme s’ils avaient existé, parce que le peu s’en faut passe pour un écart nul. On dit encore que la fortune prospère est mal sûre, et avec raison : car la fortune tout court est elle-même mal sûre, puisque aucun des effets de la fortune ne saurait avoir lieu ni toujours ni la plupart du temps.

En résumé, la fortune et le hasard sont, comme nous l’avons dit, des causes par accident relativement à des effets qui comportent de se produire autrement que d’une seule et même façon ou même autrement que la plupart du temps et encore relativement à ceux de ces effets qui sont susceptibles d’avoir lieu en vue de quelque chose.


Chapitre VI

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Mais il est différent en ce que le hasard a plus d’extension : car tous les effets de la fortune sont des effets du hasard, tandis que ceux-ci ne sont pas tous des effets de la fortune. [197b] Il y a, en effet, fortune et effets de la fortune pour tous ceux à qui peuvent s’attribuer l’heureuse fortune et d’une manière générale l’activité pratique. Aussi est-ce nécessairement sur les objets de l’activité pratique que la fortune s’exerce. La preuve en est qu’on regarde l’heureuse fortune comme identique au bonheur ou peu s’en faut, et que le bonheur est une certaine activité pratique, puisque c’est une activité pratique heureuse. Ainsi les êtres qui ne peuvent agir d’une activité pratique ne peuvent non plus faire quelque chose qui soit l’effet de la fortune. D’où il suit que nul être inanimé, nulle bête, nul enfant n’est l’agent d’effets de la fortune parce qu’il n’a pas la faculté de choisir ; et il n’y a non plus pour eux ni heureuse fortune ni infortune, si ce n’est par métaphore, comme Protarque disait que les pierres dont sont faits les autels jouissent d’une heureuse fortune parce qu’on les honore, tandis que leurs compagnes sont foulées aux pieds. En revanche, ces choses elles-mêmes peuvent, en quelque façon, pâtir par le fait de la fortune, lorsque celui qui agit sur elles par son activité pratique agit par le fait de la fortune, autrement, elles ne le peuvent.

Pour le hasard, il appartient aux animaux et à beaucoup des êtres inanimés : ainsi, on dit que la fuite du cheval est un hasard parce que, ayant fui, il a trouvé le salut sans qu’il ait fui en vue de trouver le salut. De son côté, la chute du trépied est un hasard : car le trépied est debout en vue de servir de siège, mais ce n’est pas en vue de le faire servir de siège que sa chute a eu lieu. Il est donc évident que, d’une manière générale, dans le domaine des choses qui ont lieu en vue d’une autre, quand des choses ont lieu sans avoir en vue le résultat et en ayant leur cause finale en dehors de lui, alors nous disons que ce résultat est un effet du hasard et, d’un autre côté, nous appelons effets de la fortune tous ceux des effets du hasard qui sont parmi les choses qu’on pourrait choisir et relèvent d’êtres capables de choix.

La preuve que le hasard est bien tel, c’est que nous prononçons le mot en vain (maten) lorsqu’une certaine chose qui est en vue d’une autre n’amène pas ce en vue de quoi elle était. Par exemple, on se promène en vue d’obtenir une évacuation ; si, s’étant promené, elle ne survient pas, on dit qu’on s’est promené en vain et que la promenade a été vaine, montrant ainsi que cela est en vain qui étant de sa nature en vue d’une autre chose ne produit pas cette chose en vue de quoi sa nature était d’exister ; car, si l’on disait qu’on s’est baigné en vain sur cette raison que le soleil ne s’est pas ensuite éclipsé, on serait ridicule, cela n’étant pas en vue de ceci. Ainsi donc le hasard (to automaton), pour s’en rapporter à son nom même, existe lorsque la chose qui sert d’antécédent à l’effet du hasard est par elle-même en vain (auto maten). Ainsi la chute d’une pierre n’a pas lieu en vue de frapper quelqu’un ; donc, sous ce rapport, la chute de la pierre vient du hasard, car, si elle n’était pas un hasard, la chute serait du fait de quelqu’un et provoquée en vue de frapper.

Or c’est surtout dans les productions de la nature que des effets de la fortune se distinguent de ceux du hasard : car en face d’une production de la nature, alors même qu’elle est contraire à la nature, nous ne disons pas qu’elle est un effet de la fortune, mais plutôt qu’elle est un effet du hasard. Et toutefois cette production contraire à la nature est elle-même autre chose qu’un effet du hasard : car la cause finale d’un effet du hasard est hors de cet effet, tandis que celle de cette production est au-dedans d’elle-même.

[198a] Nous venons de dire ce qu’est le hasard, ce qu’est la fortune et en quoi ils diffèrent l’un de l’autre. Maintenant, parmi les modes de la cause, ils sont l’un et l’autre dans les principes du mouvement : toujours, en effet, ils sont une sorte de cause naturelle ou de cause pensante, seulement, de ces sortes de causes, la multitude est indéterminée.

Mais puisque le hasard et la fortune sont, lorsque ces faits ont une cause accidentelle, causes de faits dont l’intellect ou la nature pourraient être causes, et puisque rien d’accidentel n’est antérieur à ce qui est par soi, il est évident que la cause accidentelle elle-même n’est pas antérieure à la cause par soi. Le hasard et la fortune sont donc postérieurs à l’intellect et à la nature. Ainsi supposé que le hasard soit, autant qu’il se peut, la cause du ciel, il faudra que, antérieurement, l’intellect et la nature soient la cause et de beaucoup d’autres choses et de cet univers.



Chapitre VII

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Ainsi, qu’il y ait des causes et que le nombre en soit tel que nous disons, c’est évident, car tel est le nombre de causes qu’embrasse le pourquoi. En effet le pourquoi se ramène en fin de compte, soit à l’essence, à propos par exemple des choses immobiles, je veux dire en mathématiques (à preuve qu’il se ramène en fin de compte à la définition du droit, du commensurable ou de quelque autre chose) ; soit au moteur prochain (par exemple : pourquoi ont-ils fait la guerre ? parce que leurs ennemis les ont pillés) ; soit à la chose qu’on a eue en vue (par exemple : ils ont fait la guerre pour dominer) ; soit, à propos des choses qui deviennent, à la matière. Il est donc clair que les causes sont telles et en tel nombre.

Or, les causes étant quatre, il appartient au physicien de les connaître toutes et il indiquera le pourquoi en physicien en le ramenant à toutes : la matière, la forme, le moteur et la chose qu’on a en vue. Il est vrai que trois d’entre elles se réduisent à une en beaucoup de cas : car l’essence et la chose qu’on a en vue ne font qu’un, et la source prochaine du mouvement est spécifiquement identique à celles-ci : car c’est un homme qui engendre un homme et, d’une manière générale, cette identité a lieu pour tous ceux des moteurs prochains qui sont mus, alors que, d’autre part, ceux qui ne sont pas mus ne relèvent plus de la physique, puisqu’ils ne meuvent pas en possédant en eux-mêmes le mouvement ni un principe de mouvement agissant sur eux-mêmes, mais en restant immobiles ; d’où il suit qu’il y a trois ordres de recherches : l’un sur les choses immobiles, l’autre sur les choses mobiles mais incorruptibles, un autre sur les choses corruptibles. Aussi, le physicien a-t-il indiqué le pourquoi quand il l’a ramené à la matière, à l’essence et au moteur prochain. Et effectivement, à propos du devenir, c’est surtout de la manière que voici qu’on cherche les causes : on se demande quelle chose vient après quelle autre, quel est l’agent ou quel est le patient prochain, et toujours ainsi en suivant. Mais les principes qui meuvent d’une façon naturelle sont doubles, et l’un d’eux n’est pas un principe naturel : [198b] car il n’a pas en lui-même un principe de mouvement agissant sur lui-même ; tels les moteurs qui ne sont pas mus, comme d’une part le moteur absolument immobile et le premier de tous, comme d’autre part l’essence et la forme, car ce sont là des fins et des choses qu’on a en vue. De la sorte, attendu que la nature agit en vue de quelque chose, il faut que le physicien connaisse aussi ce second principe moteur, et c’est selon tous les sens qu’il doit indiquer le pourquoi ; pour l’indiquer il doit dire : parce que de telle cause efficiente suit nécessairement telle chose, cela soit absolument, soit la plupart du temps ; parce que, si telle chose doit être, il faut telle matière, de la même façon que des prémisses résulte la conclusion ; parce que la quiddité était telle, et enfin parce que le meilleur le voulait ainsi, le meilleur non pas absolument, mais par rapport à l’essence de chaque chose.



Chapitre VIII

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Nous devons donc établir d’abord que la nature est au nombre des causes qui agissent en vue de quelque chose, et ensuite quel sens comporte le nécessaire dans les choses naturelles : car voici la cause à laquelle tous ramènent leurs explications, c’est que les propriétés naturelles du chaud et celles du froid et celles de toutes les choses de cette sorte étant telles, tels êtres et tels changements s’ensuivent nécessairement. Que s’ils allèguent une autre cause, à peine y ont-ils touché qu’ils l’abandonnent, comme celui-ci qui allègue l’amitié et la discorde et cet autre l’intellect.

Mais avant tout, il y a relativement à notre premier point une difficulté : qui empêche que la nature, au lieu d’agir en vue de quelque chose et parce que c’est le meilleur, agisse comme le ciel qui verse la pluie non pour faire croître le blé, mais par nécessité ? En effet, les exhalaisons après s’être élevées se refroidissent forcément et, refroidies, devenues de l’eau, elles tombent ; puis, en conséquence, il arrive par accident que le blé croît ; et pareillement si, en revanche, du blé se perd sur une aire, le ciel ne verse pas la pluie en vue de cela et pour le perdre, mais cela arrive par accident. Cela compris, qui empêche que, dans la nature, le cas des parties des vivants soit le même ? Les dents, par exemple, naîtraient les unes, les incisives, tranchantes et propres à couper les aliments, les autres, les molaires, larges et aptes à les broyer ; car, dit-on, elles ne seraient pas produites en vue de ces fonctions, mais par accident elles s’en trouveraient capables. De même pour toutes les autres parties qui sont, selon l’opinion générale, en vue de quelque chose. Les êtres chez lesquels il s’est trouvé que toutes les parties sont telles que si elles avaient été produites en vue de quelque chose, ceux-là ont survécu étant, par un effet du hasard, convenablement constitués ; ceux, au contraire, pour qui il n’en a pas été ainsi, ont péri et périssent ; et tels sont les bovins à face d’homme dans Empédocle.

C’est donc en ces allégations ou en d’autres analogues qu’on peut faire consister la difficulté. Mais il est impossible que dans la réalité il en soit ainsi. En effet, ces choses dont on vient de parler, et, en général, toutes les choses naturelles se produisent telles qu’elles sont, soit toujours, soit la plupart du temps, tandis que nul effet de la fortune ou du hasard n’a cette constance. [199a] Car, selon l’opinion générale, ce n’est pas par fortune ni par rencontre qu’il pleut fréquemment en hiver, mais s’il pleuvait fréquemment au temps de la canicule ce serait par fortune et par rencontre ; ce n’est pas par fortune et par hasard qu’il y a des chaleurs brûlantes au temps de la canicule, mais qu’il y en aurait en hiver. Si donc il est vrai, selon l’opinion générale, que les choses naturelles existent de l’une de ces deux manières, savoir ou bien par rencontre, ou bien en vue de quelque chose, et si, d’autre part, il est impossible qu’elles existent par rencontre et par hasard, il faudra qu’elles existent en vue de quelque chose. Or, d’après ceux mêmes qui tiennent de tels discours, toutes ces sortes de choses dont ils parlent sont naturelles. Le fait d’exister en vue de quelque chose a donc lieu dans les changements et dans les êtres naturels.

En outre, dans les choses qui comportent un terme final, ce qui est donné d’abord et ce qui vient ensuite est fait en vue de ce terme. Donc, étant donné qu’une chose se fait par tel procédé, c’est par le même procédé que la nature la produit, et étant donné que la nature produit une chose par tel procédé, c’est par le même procédé qu’elle se fait, à moins d’empêchement. Or les choses qui comportent un terme final se font en vue de quelque chose ; donc, la nature les produit en vue de cette même chose. Par exemple, si une maison était au nombre des choses produites par la nature, elle serait produite par la nature comme elle l’est en fait par l’art ; si, au contraire, les choses naturelles n’étaient pas produites par la nature seulement, mais aussi par l’art, elles seraient produites par l’art de la même manière qu’elles le sont par la nature. Par conséquent, l’un des moments de la chose, c’est-à-dire les antécédents, serait produit en vue de l’autre, c’est-à-dire du terme final.

Maintenant, d’une manière générale, l’art ou bien exécute ce que la nature est impuissante à effectuer ou bien il l’imite. Si donc les choses artificielles sont produites en vue de quelque chose, il est évident que les choses de la nature le sont aussi : car dans les choses artificielles et dans les choses de la nature les conséquents et les antécédents sont entre eux dans le même rapport.

Toutefois cette identité de procédure entre la nature et l’art est surtout évidente en présence des animaux autres que l’homme, qui n’agissent ni par art, ni en cherchant, ni en délibérant : d’où vient qu’on s’est, demandé si les araignées, les fourmis et les animaux de cette sorte travaillent avec intelligence ou quelque chose d’approchant. Or, en continuant peu à peu dans la même direction, on voit que, dans les plantes mêmes, les choses utiles pour la fin se produisent : ainsi les feuilles en vue d’abriter le fruit. Si donc c’est par une impulsion naturelle et aussi en vue de quelque chose que l’hirondelle fait son nid, et l’araignée sa toile, et si les plantes produisent leurs feuilles en vue des fruits, si elles poussent leurs racines non en haut, mais en bas en vue de la nourriture, il est clair que cette sorte de cause qui agit en vue d’une fin existe dans les changements et dans les êtres naturels.

Et puisque la nature est double, matière d’un côté, forme de l’autre, que celle-ci est fin et que les autres choses sont en vue de la fin, c’est celle-ci, c’est-à-dire la nature comme forme, qui est la cause, au sens de la chose qu’on a en vue.

Des erreurs se produisent bien jusque dans les choses que l’art exécute : le grammairien écrit quelquefois incorrectement et le médecin administre mal à propos sa potion ; [199b] ainsi il est évident qu’il peut également se produire des erreurs dans les choses que la nature exécute. Si donc il y a des productions de l’art dans lesquelles ce qui est bien a été fait en vue de quelque chose, tandis que, pour ce qui est erroné, cela a été entrepris en vue de quelque chose, mais a manqué le but, de même en doit-il être dans les choses naturelles, et les monstres sont des erreurs de cette dernière espèce de la causalité agissant en vue de quelque chose. Et, par conséquent, pour ce qui est de la constitution des animaux du début, si les bovins d’Empédocle ont été incapables d’aller jusqu’à un certain terme et une certaine fin, c’est qu’ils avaient été produits par un principe vicié, comme maintenant les monstres le sont par un germe vicié ; puisqu’il est nécessaire que ce soit le germe qui soit produit d’abord et non tout de suite les animaux ; et le « d’abord des ébauches indistinctes », c’était le germe.

En outre, dans les plantes mêmes, il y a des dispositions prises en vue de quelque chose ; elles sont seulement moins marquées. S’est-il donc produit parmi les plantes des sortes de vignes à tête d’olivier comme les bovins à faces d’hommes ; ou bien ne s’en est-il pas produit ? Dire qu’il s’en est produit eût été absurde certes, et pourtant il fallait qu’il s’en produisit, puisqu’il y a eu de tels monstres chez les animaux.

En outre, il faudrait que les produits des germes fussent sans règle. Mais celui qui parlerait ainsi supprimerait d’une manière générale les productions de la nature et la nature. Car sont productions de la nature toutes les choses qui, mues d’une façon continue par un principe intérieur, aboutissent à un terme final. Or, de chacun de ces principes dérive un terme final différent de celui des autres et qui n’est pas quelconque : cependant elles vont toujours chacune vers le même terme, si rien ne les empêche.

Il est vrai que la chose qu’on a en vue et ce qui est en vue d’elle peuvent au besoin être produits par la fortune. Par exemple, nous disons que l’étranger est arrivé par fortune et que, ayant délié le prisonnier, il l’a laissé aller, lorsque l’étranger a fait cela comme s’il était arrivé en vue de le faire, n’étant pas cependant arrivé en vue de cela. Et cette réalisation de quelque chose qu’on pourrait avoir en vue a lieu par accident : car la fortune est, comme nous l’avons dit plus haut, au nombre des causes par accident. Mais lorsque cette réalisation a lieu toujours ou le plus souvent, alors elle n’est pas un accident ni un effet de la fortune ; or les choses naturelles arrivent toujours, ou la plupart du temps, de telle manière déterminée, pourvu que rien n’empêche.

Quant à penser qu’il n’y a pas action en vue de quelque chose, parce qu’on ne voit pas le moteur délibérer, c’est absurde. Car l’art lui-même ne délibère pas, et certes, si l’art de construire les vaisseaux était dans le bois, il agirait comme la nature ; si donc il y a dans l’art de l’action en vue de quelque chose, il y en a aussi dans la nature. Toutefois, c’est surtout dans le cas où un homme se guérit lui-même que cette conformité de la nature avec l’art est évidente : car la nature ressemble à cet homme. Il est donc clair que la nature est une cause et cause en ce sens qu’elle agit en vue de quelque chose.


Chapitre IX

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Maintenant le nécessaire dans les choses de la nature est-il nécessaire d’une nécessité hypothétique ou d’une nécessité absolue ? [200a] Nous voyons, en effet, les physiologues penser que la nécessité règne dans le devenir, comme celui qui croirait que les murs se produisent nécessairement, parce qu’il est de la nature des graves d’aller en bas et de celles des choses légères d’aller à la surface, ce qui ferait que les pierres et les fondements seraient en bas, la terre plus haut, en raison de sa légèreté et le bois, comme le plus léger, tout à fait à la surface. Cependant la vérité est que sans ces choses les murs et la maison ne se produiraient pas, mais qu’ils ne sont point produits par ces choses si ce n’est en tant qu’elles sont leur matière et qu’ils sont produits en vue de couvrir et de conserver certains objets. Et il en est de même pour toutes les choses qui existent dans une certaine vue : elles ne sont point sans ce qui revêt la nature du nécessaire, et pourtant elles ne sont point par lui si ce n’est en tant qu’il est leur matière, et elles sont dans une certaine vue. Par exemple, pourquoi la scie est-elle ainsi faite ? Afin qu’elle soit ceci et en vue de telle chose ; mais cette chose visée ne peut se produire sans que la scie soit de fer ; donc il est nécessaire qu’elle soit de fer, s’il doit y avoir une scie et son œuvre. Par conséquent, le nécessaire l’est d’une nécessité hypothétique ; il n’est pas nécessaire comme nécessitant la fin : car la nécessité est dans la matière, tandis que ce qu’on a en vue est dans la notion.

Et le nécessaire est, en un sens, à peu près de même espèce dans les mathématiques et d’autre part dans les productions de la nature. En effet, la droite étant ceci, il est nécessaire que le triangle ait ses angles égaux à deux droits, mais de cette dernière proposition on ne tirerait pas la précédente, bien que, si la dernière n’est pas vraie, la droite, à son tour, n’existe plus. La différence est que dans les objets produits en vue de quelque chose l’ordre est inverse : s’il est vrai que la fin sera ou si elle est, il est vrai que l’antécédent sera ou qu’il est ; mais, dans le cas présent, la fin et la chose qu’on a en vue ne seront pas si l’antécédent n’est pas, de même que, dans l’autre cas, le principe ne sera pas si la conclusion n’est pas ; car la fin est principe aussi, non de l’exécution mais du raisonnement, tandis que dans l’autre cas, le principe est principe du raisonnement, puisqu’il n’y a pas d’exécution. Ainsi, étant vrai qu’il y aura une maison, il est nécessaire que telles choses soient faites, ou encore qu’elles soient ou existent ; d’une manière générale il est nécessaire, s’il doit y avoir une maison, que la matière appropriée, des tuiles et des pierres, par exemple, soit aussi ; et pourtant la fin, s’il est vrai qu’elle sera, n’est pas ni ne sera pas par ces choses, sauf en tant qu’elles sont sa matière ; bien que, d’une manière générale, si ces choses ne sont pas, il soit vrai que ni la maison ne sera, ni la scie, l’une sans les pierres, l’autre sans le fer, non plus que dans l’autre cas, si le triangle ne vaut pas deux droits, les prémisses ne subsisteront.

Il est donc évident que le nécessaire dans les choses naturelles, c’est ce qu’on énonce comme leur matière et les mouvements de celle-ci. Et le physicien doit parler des deux sortes de causes, mais surtout de celle qui dit en vue de quoi est l’objet : car c’est la cause de la matière, mais celle-ci n’est pas cause de la fin. Aussi la fin est-elle ce que la nature a en vue, et c’est de la définition et de la notion que la nature part. [200b] De même que, dans les choses artificielles, la maison étant telle, il faut que nécessairement telles choses soient faites ou existent, que la santé étant telle, il faut que nécessairement telles choses soient faites ou existent, de même dans la nature l’homme étant tel, il faut telles choses, et s’il faut telles choses, il en faut telles autres à leur tour.

Peut-être, il est vrai, y a-t-il du nécessaire jusque dans la notion : car, lorsqu’on a défini l’œuvre du sciage en disant que c’est telle sorte de coupure, il reste que cette sorte de coupure ne saurait être, à moins que la scie n’ait des dents de telle sorte, et ces dents ne seront pas à moins que la scie ne soit de fer. C’est qu’il y a dans la notion elle-même des parties qui sont dans la notion comme sa matière. Page:Aristote - Physique, II (éd. O. Hamelin).djvu/43 Page:Aristote - Physique, II (éd. O. Hamelin).djvu/44 Page:Aristote - Physique, II (éd. O. Hamelin).djvu/45 Page:Aristote - Physique, II (éd. O. Hamelin).djvu/46 Page:Aristote - Physique, II (éd. O. Hamelin).djvu/47 Page:Aristote - Physique, II (éd. O. Hamelin).djvu/48 Page:Aristote - Physique, II (éd. O. Hamelin).djvu/49 Page:Aristote - Physique, II (éd. O. Hamelin).djvu/50 Page:Aristote - Physique, II (éd. O. Hamelin).djvu/51 Page:Aristote - Physique, II (éd. O. Hamelin).djvu/52 Page:Aristote - Physique, II (éd. O. 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