La Reconnaissance de Sakountala (Foucaux)/Acte II

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Traduction par Philippe-Édouard Foucaux.
E. Picard (p. 31-48).

ACTE DEUXIÈME


mâdhavya, après avoir soupiré[1]. Quelle misère ! Parce que je suis le compagnon de ce roi passionné pour la chasse, je suis accablé. « Voici une gazelle ! voici un sanglier ! voici un tigre ! » C’est au milieu de pareils cris qu’on va, même au milieu du jour, courir de bois en bois, dans des régions où l’ombre des arbres est rare en été. On boit les eaux acres des rivières de la montagne, échauffantes par un amas de feuilles ; on mange à des heures irrégulières, et, le plus souvent, de la chair rôtie à la broche. Il n’est pas même possible de dormir à sa fantaisie la nuit, tant les membres sont fatigués de courir à cheval auprès du roi. Puis, de grand matin, je suis éveillé par des fils d’esclaves, chasseurs d’oiseaux, et par le tumulte qui se fait en prenant possession de la forêt. Même après tant de choses, mon tourment n’est pas encore fini. Aussi, voilà sur ma joue des boutons qui naissent en foule ! Hier, en effet, pendant que nous étions laissés en arrière, Sa Majesté étant entrée dans l’ermitage en poursuivant une gazelle, elle a, pour mon malheur, vu la fille de l’ermite, nommée Sakountalâ. Maintenant le roi n’a plus la moindre envie de retourner à la ville ; si bien qu’aujourd’hui l’aurore l’a surpris songeant à elle avant qu’il eût fermé les yeux. Que faire ? Quoi qu’il en soit, je vais le voir quand il aura achevé sa toilette. (En parlant ainsi, il fait quelques pas et regarde.) Le voici qui vient, ce cher compagnon, entouré de femmes Yavanies[2] portant des guirlandes de fleurs de la forêt et ayant à la main des arcs. Eh bien ! je vais rester là comme un être perclus par une paralysie. Si je pouvais, au moins, obtenir ainsi quelque repos !

(En disant ces mots, il reste immobile appuyé sur un bâton. Le roi entre avec la suite qu’on vient de dire.)

le roi. « Celle qu’on aime n’est pas aussi facile à obtenir qu’on le désirerait ; et pourtant, le cœur prend courage en voyant son maintien. Même quand l’amour n’a pas obtenu ce qu’il désire, une mutuelle espérance donne déjà du plaisir. » (Souriant.) C’est ainsi qu’un amant qui juge le fond de la pensée de la personne aimée d’après son propre désir se trompe complètement ! Et cependant,

« Puisque, tout en jetant les yeux d’un autre côté, son regard était plein de douceur ; puisque sa marche, ralentie par l’ampleur de ses hanches, semblait l’être par coquetterie ; puisque, quand son amie l’arrêtait en disant : « Ne t’en va pas ! » elle lui a parlé avec impatience, tout cela était certainement pour moi. Ah ! celui qui aime voit bien ce qui est pour lui ! »

mâdhavya, toujours dans la même posture. Eh bien ! ami, mes mains ne s’étendent plus ; c’est donc seulement avec la voix que vous serez salué du nom de vainqueur.

le roi. D’où vient cette infirmité ?

mâdhavya. Comment, après avoir vous-même rendu ma vue trouble, vous demandez la cause de mes larmes ?

le roi. En vérité, je ne comprends pas ; explique-toi clairement.

mâdhavya. Eh bien, ami, si le roseau imite la tournure du koubdja[3], cela vient-il de son propre mouvement ou bien de la rapidité du fleuve ?

le roi. C’est la rapidité du fleuve qui en est cause.

mâdhavya. Et vous de ce qui m’arrive.

le roi. Comment cela ?

mâdhavya. Après avoir, comme vous le faites, négligé les devoirs d’un roi, il faut que vous alliez prendre les manières d’un habitant des bois, dans une pareille contrée sauvage, où il n’y a pas un homme ! Comme, en vérité, j’en viens chaque jour, à cause des chasses aux bêtes fauves, à n’être plus le maître de mes membres, dont les muscles et les articulations sont brisés, je vous prierai de m’accorder un congé d’un jour pendant lequel je pourrai du moins me reposer !

le roi, à part. Et c’est ainsi qu’il parle, quand, au souvenir de la fille de Kanva, mon esprit est bien loin de songer à la chasse !

En effet,

« Il m’est impossible de tendre cet arc, muni d’une corde sur laquelle est posée une flèche, dirigée sur des gazelles qui, en partageant la demeure de celle que j’aime, semblent lui avoir appris la douceur des regards ! »

mâdhavya, après avoir regardé le visage du roi. Sa Majesté, après avoir interrogé son cœur, délibère. J’ai crié dans le désert.

le roi, souriant. Quelle chose pourrait m’occuper, si ce n’est un conseil d’ami qui n’est pas à négliger ? Aussi est-ce à ce conseil que je m’arrête.

mâdhavya. Puissiez-vous vivre longtemps ! (Il va pour s’en aller.)

le roi. Ami, demeure ; écoute ce qui me reste à te dire.

mâdhavya. Que Votre Majesté commande !

le roi. Quand tu seras délassé, il faudra que tu m’aides à quelque chose de facile.

mâdhavya. Est-ce à manger des friandises ?

le roi. Quand il sera temps, je te dirai ce que c’est.

mâdhavya. Le moment est favorable.

le roi. Holà ! Y a-t-il quelqu’un ici ?

un huissier, entrant. Que Votre Majesté commande !

le roi. Rêvataka, qu’on appelle le général.

l’huissier. Oui, Sire. (Il sort, et revient avec le général, en lui disant : ) Voici le roi qui désire vous donner un ordre, et qui regarde de ce côté. Approchez, Seigneur.

le général, regardant le roi. La chasse, quoique regardée comme ayant des inconvénients, ne paraît avoir que des avantages pour notre maître ; en effet, Sa Majesté

« Montre un corps dont la partie antérieure est durcie par le frottement incessant de la corde de l’arc, qui supporte les rayons du soleil sans éprouver la moindre fatigue, et qui, bien qu’amaigri par un exercice violent, n’en porte pas la trace ; ainsi un éléphant errant sur la montagne se montre plein de vigueur. »

(Après s’être approché.) Que notre maître soit victorieux ! La forêt est délivrée des bêtes fauves ; pourquoi s’arrêter ainsi ?

le roi. Mon ardeur est fort apaisée par Mâdhavya, qui crie contre la chasse.

le général, à part. L’ami, demeure ferme dans cette opposition ; quant à moi, je vais flatter le goût du maître. (Haut.) Ce fou parle à tort et à travers ; que Votre Majesté en juge :

« Le corps, allégé parce que les flancs sont amaigris par la destruction de l’embonpoint, est propre à un exercice violent ; puis, on observe la pensée des êtres affectés des émotions diverses de la crainte et de la colère. C’est la supériorité des archers quand les flèches tombent juste sur un but mobile. C’est à tort qu’on appelle la chasse un défaut ; où trouver une distraction qui l’égale ? »

mâdhavya, en colère. Hors d’ici, toi qui prêches les exercices violents ! Sa Majesté est revenue à son état naturel ; mais toi, errant de forêt en forêt, tu tomberas dans la gueule de quelque vieil ours avide d’un museau humain !

le roi. Général, nous sommes tout près d’un ermitage ; c’est pourquoi je ne tiens pas compte de tes paroles ; aujourd’hui, en effet :

« Que les buffles entrent dans l’eau de l’étang incessamment agitée par leurs cornes ; que le troupeau de gazelles rassemblé à l’ombre d’un kadamba s’occupe à ruminer ; que l’herbe mousta soit tranquillement arrachée dans l’étang par les troupes de sangliers ; et que cet arc à nous reste en repos avec sa corde détendue ! »

le général. Comme il plaira à Votre Majesté.

le roi. Eh bien ! fais revenir les piqueurs qui sont allés en avant ; il faut les arrêter, pour que mes soldats ne troublent pas le bosquet de l’ermitage.

Vois :

« Chez les ascètes riches en austérités, en qui le calme domine, il y a une splendeur cachée de nature brûlante ; ainsi les lentilles de cristal, qui sont douces au toucher, font, sous l’influence d’un autre feu, jaillir la flamme ! »

le général. Comme l’ordonne Sa Majesté.

mâdhavya. Va donc, fils d’une esclave ! Elles sont perdues, tes paroles qui prêchent les exercices violents !

(Le général s’éloigne.)

le roi, après avoir regardé ceux qui l’entourent. Et vous, emportez le costume de chasse. Quant à toi, Rêvataka, remplis soigneusement tes fonctions.

la suite. On fera ce qu’ordonne le roi. (Ils sortent.)

mâdhavya, au roi. Voilà, grâce à vous, la place nette de mouches. Maintenant, que Votre Majesté s’asseye sur cette pierre abritée par un dais formé de l’ombre épaisse des arbres, tandis que moi-même je serai assis à l’aise.

le roi. Va en avant.

mâdhavya. Que Votre Majesté s’asseye d’abord.

(Tous les deux vont s’asseoir.)

le roi. Tes yeux n’ont rien vu jusqu’ici, puisque tu n’as pas vu ce qu’il y a de plus beau au monde.

mâdhavya. Comment cela, quand Votre Majesté est devant moi ?

le roi. Chacun voit en beau ce qui lui appartient ; mais je veux parler de cette Sakountalâ qui fait l’ornement de l’ermitage.

mâdhavya, à part. Soit ! Je ne lui donnerai pas d’encouragement de ce côté-là ! (Haut.) Mais, Seigneur, si cette jeune fille de l’anachorète ne doit pas être recherchée par vous, à quoi sert-il de l’avoir vue ?

le roi. Ami, ce n’est pas à un objet défendu que s’adresse le cœur des descendants de Pourou.

« C’est bien certainement l’enfant d’une nymphe, cette jeune fille de l’ermite, qu’il a obtenue par l’abandon de cette nymphe, comme la fleur délicate du jasmin double détachée de sa tige et tombée sur une fleur de la grande asclépiade. »

mâdhavya, souriant. Pour vous, qui dédaignez les perles des femmes de votre harem, ce qui vous attire vers cette jeune fille ressemble au désir qu’un homme dégoûté des dattes éprouverait pour le fruit du tamarin.

le roi. C’est parce que tu ne l’as pas vue que tu viens de parler ainsi.

mâdhavya. Ah ! sans nul doute, ce qui fait naître l’admiration de Votre Majesté est ravissant.

le roi. Ami, que veux-tu de plus ?

« Douée de la perfection de l’être, n’a-t-elle pas été animée par Brahma, après l’avoir représentée en peinture, avec l’intention de rassembler toutes les beautés ? Quand je songe à son beau corps et à la puissance du créateur, elle m’apparaît comme la perle des femmes, que nulle autre n’égale. »

mâdhavya. S’il en est ainsi, c’est à laisser là désormais les plus belles personnes !

le roi. C’est bien ce qui me vient à l’esprit.

« Fleur dont le parfum n’a pas été respiré, tendre bouton qui n’a pas été détaché avec les ongles ; perle intacte, miel nouveau dont la saveur n’a pas été goûtée ; beauté sans défaut, qui est comme la récompense sans réserve des bonnes œuvres, je ne connais pas le possesseur que lui donnera le destin ! »

mâdhavya. Eh bien ! que Votre Majesté la prenne vite sous sa protection, pour qu’elle ne tombe pas dans les mains de quelque ascète à la tête graissée d’huile d’ingoudi.

le roi. Mais cette jeune fille est sous la dépendance d’un autre, et celui qui la dirige n’est pas ici.

mâdhavya. Quelle a été l’expression de son regard en s’arrêtant sur vous ?

le roi. Par nature, les filles des ermites sont timides, de sorte que

« En ma présence, son regard était détourné, et son sourire semblait produit par une autre cause (que l’intérêt) ; de sorte que l’amour, ayant son essor arrêté par la retenue, n’était ni montré ni caché par elle. »

mâdhavya. Mais, en vérité, peut-elle, seulement pour vous avoir vu, venir se jeter dans vos bras ?

le roi. Quand nous nous sommes séparés l’un de l’autre, son sentiment, bien qu’avec retenue, m’a été témoigné par elle. C’est ainsi que

« Elle s’est écriée sans raison : Mon pied est blessé par une pointe de l’herbe darbha ! Puis elle s’est arrêtée, la jeune fille ; et, après avoir fait de nouveau quelques pas, elle est restée le visage tourné de mon côté, tandis qu’elle dégageait son vêtement d’écorce, quoiqu’il ne fût nullement embarrassé dans les branches des arbres. »

mâdhavya. Alors, munissez-vous de provisions de voyage ; car vous avez fait un jardin de plaisance du bois consacré aux mortifications, à ce que je vois.

le roi. Ami, je suis connu de quelques-uns des anachorètes ; avise donc quelque prétexte à l’aide duquel nous retournerons à l’ermitage.

mâdhavya. Quel besoin avez-vous d’un prétexte ; n’êtes-vous pas le roi ?

le roi. Eh bien ?

mâdhavya. Que les ermites nous offrent la sixième partie de (leur) riz.

le roi. Fou, ces anachorètes m’offrent un autre tribut, qu’on recevrait avec joie en laissant de côté des monceaux de joyaux ; vois :

« Le tribut qui vient des quatre castes est périssable ; tandis que les ascètes nous donnent la sixième partie de leurs austérités, qui est impérissable. »

dans la coulisse. Nous avons tous les deux obtenu ce que nous désirions.

le roi, après avoir écouté. Cette voix calme et mesurée doit être celle des ermites.

un huissier, entrant. Que Votre Majesté soit victorieuse ! Deux jeunes ermites sont là sur le seuil de la porte.

le roi. Eh bien ! introduis-les sans retard.

l’huissier. Je les introduis à l’instant. (Il sort, et rentre avec les deux ermites.) Par ici, par ici, Seigneurs !

(Tous les deux regardent le roi.)

le premier. Quoique la personne de Votre Majesté rayonne, elle donne de la confiance ; mais cela est bien naturel dans un roi semblable à un saint personnage, puisque

« Il a établi son séjour dans l’ermitage ouvert à tous, et que, par la protection qu’il accorde à tous, il amasse chaque jour les mérites des austérités. Il va jusqu’au ciel, le nom de ce roi maître de lui-même, chanté par des couples de bardes qui répètent : Il est vraiment beau, le nom de « saint » précédé du titre de roi ! »

le second ermite. Gâutama, c’est donc là Douchmanta, l’ami d’Indra ?

1er ermite. Oui, pourquoi ?

2e ermite. C’est qu’alors

« Il n’est pas étonnant que ce prince au bras fort comme les barres de la porte d’une ville gouverne à lui seul la terre entière qui a pour ceinture la mer bleuâtre, et que les dieux toujours ennemis des géants espèrent la victoire dans les combats, confiants dans l’adresse de ce prince à tendre l’arc, et dans la foudre d’Indra ! »

tous deux, s’étant approchés. Soyez vainqueur, ô roi !

le roi, se levant de son siège. Je salue vos seigneuries.

les deux ermites. Bonheur à Votre Majesté !

(En parlant ainsi, ils offrent des fruits.)

le roi, acceptant avec un salut. Je désire savoir ce qui vous amène.

les deux ermites. La présence de Votre Majesté est connue des habitants de l’ermitage ; c’est pourquoi ils lui adressent une requête.

le roi. Qu’ordonnent-ils ?

tous les deux. Par l’absence de sa Révérence le grand Richi Kanva, les Rakchas[4] ne rencontrant pas d’obstacles à leurs mauvais desseins, les anachorètes demandent que l’ermitage ait en vous, accompagné de votre écuyer, un protecteur pendant quelques nuits.

le roi. C’est là une faveur pour moi.

mâdhavya, à part, au roi. Voilà une requête qui vous vient à propos en ce moment.

le roi, souriant. Rêvataka, qu’on appelle l’écuyer de ma part, en lui disant de faire approcher le char avec l’arc.

l’huissier. Comme l’ordonne le roi. (Il sort.)

les deux ermites, joyeux.

« Pour vous qui suivez les traces de vos ancêtres, voilà des dispositions convenables ; les descendants du roi Pourou sont vraiment consacrés pour les sacrifices qui donnent la sécurité à ceux qui sont inquiets !

le roi, saluant. Allez en avant tous les deux, seigneurs ; je suis vos pas immédiatement.

les deux ermites. Soyez victorieux ! (Ils sortent.)

le roi. Mâdhavya, n’as-tu pas envie de voir Sakountalâ ?

mâdhavya. Tout d’abord cette envie était comme un torrent ; mais maintenant qu’on a parlé de Rakchas, il n’en reste plus une goutte !

le roi. Ne crains rien ; ne seras-tu pas à mon côté.

mâdhavya. Oui, je suis protégé par votre disque.

l’huissier, entrant. Le char de Votre Majesté est prêt et attend votre départ pour courir à la victoire. De plus, Karabhaka arrive delà ville, porteur d’un message de la reine-mère.

le roi, avec respect. Comment ? envoyé par la reine ?

l’huissier. Oui, vraiment.

le roi. Qu’on le fasse entrer.

l’huissier. Oui, Sire. (Il sort, et revient avec Karabhaka.) Voici le roi, approchez.

karabhaka. Victoire ! victoire au roi ! La reine-mère lui fait dire que dans quatre jours aura lieu le jeûne qu’on nomme « Pouttrapindapâlana »[5], et qu’elle doit, à cette occasion, être honorée d’une visite de Votre Majesté.

le roi. D’un côté est l’affaire des ermites, de l’autre l’invitation d’une personne respectée, deux choses qu’il est impossible de négliger. Que décider ici ?

mâdhavya. Faites comme Trisankou, restez entre les deux[6].

le roi. En vérité, je suis bien embarrassé.

« À cause de l’éloignement des lieux où ces deux devoirs doivent s’accomplir, mon esprit est partagé en deux comme une rivière dont le cours est arrêté par des rochers qui sont devant elle. »

(Après avoir réfléchi.) Ami, tu es reçu comme un fils par la reine-mère ; retourne donc vers elle, et après lui avoir fait connaître combien je suis occupé de l’affaire des ermites, aie l’obligeance de remplir pour moi le devoir d’un fils.

mâdhavya. Vous croyez sans doute que j’ai peur des Rakchas ?

le roi, souriant. Oh ! grand Brahmane, comment cela se pourrait-il chez un homme comme toi ?

mâdhavya. Je m’en irai ainsi que doit s’en aller le frère puîné du roi.

le roi. Comme il faut éviter de troubler l’ermitage, je congédie avec toi tous les gens de ma suite.

mâdhavya, avec fierté. Me voilà donc devenu prince royal !

le roi, à part. Ce jeune homme est étourdi, et pourrait bien conter aux femmes des appartements intérieurs ce qui me retient ici. Je vais lui parler encore. (Haut, après avoir pris Mâdhavya par la main.) Ami, c’est par égard pour les ermites que je vais à l’ermitage, et je n’ai, en vérité, nulle inclination pour Sakountalâ, la fille de l’ermite. Vois :

« Quoi de commun entre nous et une personne étrangère à l’amour, élevée avec les petits des gazelles ? Ami, des mots dits en riant ne doivent pas être pris au sérieux.

mâdhavya. Sans doute.

(Tous sortent.)
FIN DU SECOND ACTE.
  1. Comparez, dans la Princesse d’Élide, de Molière, acte I, scène ii, les plaintes de Moron.
  2. Le nom de Yavana est employé par les anciens Indiens pour désigner les barbares de l’Occident, et plus spécialement les Arabes et les Grecs. Dans une note de sa traduction du drame de Vikramôrvaci, qui est aussi de Kâlidâsa (acte V, p. 261), Wilson dit qu’on peut appliquer le nom de Yavani, féminin de Yavana, aux femmes de la Tartarie et de la Bactriane.

    L’usage d’avoir une garde composée de femmes s’est conservé à la cour de Siam. M. Aubaret, consul de France à Bangkok, dans une visite au roi de Siam, en 1864, a vu un corps de jeunes amazones portant fort bien le mousquet, auxquelles est confiée la garde de la résidence royale.

  3. Plante (trapa bispinosa) dont le nom signifie « bossu, courbé. »
  4. Esprits malfaisants, espèces de vampires.
  5. C’est-à-dire « conservation du corps d’un fils. »
  6. V. le Râmâyana, I, lvii-lx. Le roi Trisankou voulait célébrer un grand sacrifice, et, par ce moyen, monter au ciel avec son corps mortel. Il s’adressa d’abord au sage Vasichtha, qui refusa d’officier pour lui. Il alla ensuite solliciter les cent fils de Vasichtha, qui le maudirent et le réduisirent à la condition d’un paria. Dans son malheur, il eut recours à Viswamitra, qui entreprit de conduire le sacrifice et invita les dieux à s’y rendre. Ceux-ci ayant refusé, Viswamitra, furieux, transporta par son propre pouvoir Trisankou dans les cieux. Il y était à peine arrivé qu’il fut précipité en bas la tête la première par Indra et les dieux. Mais Viswamitra l’arrêta au milieu de sa chute, et il resta suspendu entre le ciel et la terre, sous la forme d’une constellation de l’hémisphère du sud.