La Rue de Jérusalem/Partie 1/Chapitre 16

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Le Constitutionnel (feuilleton paru du 16 nombre 1867 au 21 mars 1868p. 180-191).
1re partie


XVI

Exploits de Pistolet.


En ce moment, comme si le hasard eût voulu éclairer la bataille, la nuée se déchira, laissant voir le disque éclatant de la pleine lune.

Les deux troupes d’agents sortirent de l’ombre ; maintenant que le bandit s’était arrêté, après avoir choisi son poste de combat, elles marchaient toutes deux, silencieuses et noires.

Les agents étaient au moins douze contre un ; c’est l’ordinaire ; ils sont souvent les plus nombreux, quoique dans une proportion généralement moindre.

Mais, je le répète, il y a un fait qui rétablit terriblement l’égalité de la lutte.

Le malfaiteur essaye de tuer. L’agent de l’autorité fait effort pour ne pas tuer.

Lectrices aimables, ne vous fâchez pas contre moi ; je m’arrête, ajoutant seulement que les malheureux qui tombent dans ces luttes, dont tout le bénéfice est à vous, laissent derrière eux des veuves et des orphelins.

J’irais jusqu’à vous permettre vos voleurs bien-aimés s’ils étaient tous en Italie, où M. Scribe les mettait si volontiers :

Voyez sur cette roche
Ce brave à l’œil fier et hardi,
Son mousquet est auprès de lui,
C’est son meilleur ami.

Vous eûtes l’âme formée par ces chants magnanimes, je ne vous blâme pas.

Mais qu’il vous semblerait beau et pareil aux dieux immortels, le pauvre sergent de ville qui paraîtrait à la porte au moment où le parquet de votre chambre à coucher crierait sous les pieds éperonnés de Zampa !…

Le marchef, droit, immobile, campé comme une statue antique, s’adossait au parapet sur lequel il avait déposé l’enfant, et montrait en pleine lumière la robuste carrure de son torse herculéen.

Il tenait à la main son coutelas et, libre désormais de son fardeau, il pliait les jarrets, prêt à bondir.

Les deux troupes d’agents achevant d’accomplir leurs manœuvres lentes, se rejoignirent et continuèrent de marcher sur lui en formant le demi-cercle.

— Rendez-vous, Coyatier, mon garçon, dit M. Badoît, dont la voix était grave et ferme ; vous voyez bien que vous ne pouvez pas nous échapper.

— À moins de vous lancer à l’eau, ajouta M. Mégaigne, comme s’il eût voulu lui suggérer un expédient.

M. Mégaigne n’avait pas la réputation d’être aussi brave que le chevalier Bayard.

— Venez-y voir, méchants pékins d’assommeurs ! répondit le marchef dont les dents grinçaient. On va vous servir, arrivez ; à qui le tour ?

Martineau et deux autres agents étaient un peu en avant de la ligne.

Coyatier, se tournant brusquement, appuya ses deux poignets au parapet et lança une double ruade.

Les deux agents tombèrent ; l’un d’eux avait eu la tête fracassée par le talon ferré du bandit.

Martineau s’était lancé sur lui ; mais Coyatier, prompt à la parade, lui donna de son coutelas dans la poitrine et passa d’un seul élan au travers du cercle.

Il aurait pu fuir, si Chopand ne lui eût déchargé un coup de sa canne plombée sur le crâne.

Le bandit chancela et poussa un hurlement.

Il se retourna par l’instinct de vengeance qui prend la bête, et planta son front, comme un bélier, dans le creux de l’estomac de Chopand, qui tomba foudroyé.

— Tiens ! tu as la vie dure, toi, Pierrot ! dit-il en reconnaissant Pistolet qui cherchait à le prendre aux jambes. Attrape et ne t’en vante jamais !

Il voulut le saisir aux cheveux ; mais le gamin, glissant comme un reptile, s’échappa en laissant quelques poils jaunes entre ses doigts, et Coyatier, entouré de près, avait trop à faire pour le suivre.

— Rendez-vous, Coyatier, dit encore Badoît ; nous sommes tous armés, et dès qu’il y a du sang répandu, nous avons le droit de faire usage de nos armes.

— Montrez-les donc vos outils, répondit le marchef qui venait d’abattre deux agents à coups de couteau et qui était ivre de sa force ; on va t’en répandre du sang, à seaux et à flots ! Ça va faire monter la Seine à l’échelle du Pont-Royal !

— Ah ! faillis chiens, reprit-il en râlant de rage, vous seriez vingt-quatre au lieu de douze, et quarante-huit aussi, et quatre-vingt-seize, que vous ne pourriez rien contre un homme ! Allume, Badoît, vieux bourgeois ! as-tu fait la guerre en Afrique ?… Toi, Mégaigne de malheur, je vas te couper en deux, regarde voir !

Il avait reçu un coup de pointe de l’épée que Mégaigne avait dans sa canne. Il lui porta une retroussis à éventrer un bœuf.

Mégaigne était un tireur. Il para et redoubla. Le marchef, touché, hurla.

En même temps, Badoît, qui n’avait pas encore frappé, se jeta sur lui et le ceintura, comme disent les lutteurs.

— Tenez ferme, monsieur Badoît, cria Chopand qui se relevait. Nous l’avons !

Coyatier les savait toutes.

— Puisqu’on lutte à mains plates, luttons, dit-il.

Et donnant un violent temps de hanche, il fit basculer Badoît dont les pieds souffletèrent ses amis à la ronde.

Coyatier profita du mouvement de recul pour regagner son poste auprès du parapet.

Il avait mis cinq des assaillants complètement hors de combat. Il se croyait désormais sûr de la victoire.

— Un vrai d’Afrique vaut dix Bédouins, dit-il : vous êtes douze ; mais chaque Bédouin en vaut bien quatre comme vous ! J’ai parlé : m’en faut six, avec cette chenille de Pistolet par-dessus le marché. Garez-vous bien, je vais foncer !

Le mouvement suivit de près la parole, mais trois ou quatre lames le frappèrent à la fois.

Il recula violemment comme il avait chargé, et son coude, rencontrant par hasard le paquet de soie, qui était toujours sur le parapet, le poussa en dehors.

Il y eut un cri faible.

— Un enfant ! dit Badoît stupéfait. C’était un enfant !

— Et qui m’a gêné, faut voir ! répliqua le marchef en arrachant la canne à épée des mains de Mégaigne. Je l’avais embrassée, quoi !… mais vous n’êtes pas à la portée de comprendre des choses comme ça, vous, bassets… Comme quoi, j’avais dix six : complet !

Il assomma Mégaigne d’un coup de manche, après lui avoir porté le coutelas à l’estomac, et s’appuyant de nouveau de deux mains au parapet, il donna deux ou trois ruades qui firent le cercle.

— En conséquence, dit-il, lançant un dernier coup qui abattit un homme, voilà pour le treizain. Vous finiriez par m’avoir avec vos lames. Bonsoir, les voisins ! Je veux voir un peu ce qu’est devenue ma petiote. Les chiens enragés, ça n’aime pas l’eau. Bien des choses chez vous : à l’avantage !

D’un saut il se mit debout sur le parapet ; puis, joignant les mains en avant, il piqua une tête dans la rivière.

Au moment où les agents, stupéfaits, restaient à s’entre-regarder, une voix grêle s’éleva, disant :

— À toi ! à moi ! on va gigoter ! Combat naval ! Descendez le long des deux rives, Monsieur Badoît, et les autres, sans vous commander. À l’eau, j’en mangerais trois et demi comme lui. Vous allez voir quelque chose d’agréable… il m’a appelé grenouille ! c’est bon !

Une seconde forme humaine parut, debout sur le parapet, mais bien différente de l’athlétique prestance du bandit.

C’était Clampin, dit Pistolet, qui ajouta :

— Pas peur ! tout l’été, j’en fais autant sur le canal, pour cinquante centimes, en faveur des Anglais et badauds qui espèrent que je vais me noyer. Suivez les berges : on va vous rattraper l’objet perdu !… après ça, je me rangerai.

Il piqua, lui aussi, une tête, mais non point comme le marchef, à la façon des profanes. Tournant le dos au fleuve, il ramena les coudes en avant et fit le saut périlleux en arrière comme un vrai phoque des bains à quatre sous qu’il était.

Ceux qui, parmi les spectateurs, restaient valides ou à peu près se séparèrent en deux groupes, laissant M. Mégaigne à la garde des blessés.

Badoît prit en toute hâte la berge du faubourg Saint-Germain, et Chopand celle de la rive droite.

Entre ces deux berges, il y a une pointe, la langue de terre qui soutient le pont et à laquelle s’amarrent le bain Henri IV.

Sur cette pointe, en ce moment même, une autre aventure avait lieu, que nous raconterons tout à l’heure.

Chaque chose a son temps.

Suivons d’abord le marchef.

Au risque de passer, nous aussi, pour un flatteur de crime, nous dirons la vérité. La première préoccupation de Coyatier, qui se croyait bien sûr de n’être point poursuivi, au moins par eau, fut de chercher la petite demoiselle.

Dans sa croyance, il existait je ne sais quel pacte naïf entre lui et l’enfant : il l’avait embrassée.

C’était un puissant nageur. Il éleva la tête à deux pieds au-dessus de l’eau pour examiner le cours de la Seine. Il vit à deux ou trois cents pas en avant de lui un objet blanc qui flottait.

— La soie a bouffé, se dit-il. Ça ne prend pas l’eau tout de suite, je vas la repêcher.

Mais au moment où il commençait à nager vers l’objet blanc qui suivait le courant en obliquant vers la porte de la Cité, il entendit derrière lui le bruit d’un corps plongeant dans la rivière.

Un nageur ne se trompe jamais à cela. Le bruit d’un homme qui se jette à l’eau n’est pas du tout le même que celui d’un homme qui tombe à l’eau.

L’un est net mais sourd, perçant la masse liquide comme un pieu ; l’autre est confus et à la fois éclatant : il éclabousse.

Le marchef regarda derrière lui et ne vit rien, parce que l’ombre du pont laissait tous les objets dans le noir.

— Oh ! oh ! se dit-il, on a donc engagé des terre-neuve à la sûreté ! C’est piqué dans l’œil cette tête-là ! Ça n’a pas soulevé une chopine d’eau ! on va avoir à causer, c’est sûr. En tout cas, j’ai toujours bien le temps de mettre la fillette dans l’Île.

Il se retourna, mais l’objet blanc ne flottait plus sur la rivière. Il eut le cœur serré et pensa :

— Je ne dirais pas ça tout haut, crainte des gouailleurs ; mais j’ai idée que cette enfant-là, c’était ma chance !

Un bruit de pas se fit entendre dans l’escalier descendant la berge, sous les bâtiments de la Monnaie ; Coyatier dressa l’oreille.

— Crébleu ! gronda-t-il, mauvaise nuit ! Ils vont me donner la chasse comme ça jusqu’aux filets de Saint-Cloud… et quand le jour viendra, si je ne les égare pas, bloqué !

Il resta sans mouvement pour écouter.

L’eau était complètement silencieuse.

— Égarons-les ! conclut-il. Ça sera revenir de loin !

Et il plongea, se dirigeant vers les bateaux qui bordent la rive droite dans le voisinage des machines à décharger du quai.

En cet endroit, le cours de la Seine était libre alors. Il n’y avait ni écluse ni gare entre la Monnaie et la pointe de la Cité.

Le port s’étendait jusqu’à la hauteur de la rue Guénégaud.

Quand le marchef, après avoir nagé entre deux eaux, tant qu’il eut du souffle, remit sa bouche à la surface, il se trouvait déjà tout près du dernier bateau qui enfonçait et coulait presque sous une charge de pierres de taille.

C’était une de ces vilaines barques de rivière obèses et ventrues qui donnent des nausées aux marins, mais qui font comme il faut leur métier de camions flottants. Le bord dépassait à peine le niveau du fleuve, et au-dessus du bord, on ne voyait qu’une ligne blanche, toute composée de larges cubes de pierres de taille.

Le marchef leva la tête avec précaution en aspirant une lampée d’air.

Il regarda tout autour de lui.

Rien ne se montrait sur la Seine. Le long de la berge, trois hommes couraient.

M. Badoît ! se dit Coyatier. Il m’a tout de même sommé trois fois avant de taper. Ça fait de temps en temps son état en conscience. Mais chacun pour soi, pas vrai ? S’ils restent là, sur le bord, à jouer des jambes, ils ne m’auront pas !

Il plongea de nouveau.

À l’endroit même où la disparition de sa tête laissait un petit tourbillon, une autre tête parut dans le remous : une pauvre tête mièvre que vous n’auriez pas reconnue, tant l’aplatissement de ses cheveux jaunes ébouriffés changeait la physionomie de notre ami Clampin, dit Pistolet.

Il siffla doucement ; les agents s’arrêtèrent à ce bruit.

— Entrez voir dans le bateau à charbon, monsieur Badoît, dit-il, si vous pouvez. Vous serez aux premières loges pour voir l’intermède comique…

— Stop ! s’interrompit-il. Ne bougez plus. Voilà la baleine qui va souffler.

L’eau eut, en effet, une ondulation à vingt pas de là, et la tête du marchef reparut au moment même où celle de Pistolet se cachait de nouveau.

Le marchef était maintenant à l’ombre du second bateau, chargé de planches.

Il regarda, il écouta. Tout semblait désormais tranquille.

— Je n’aime pas ça ! fit-il entre ses dents. Doit y avoir une manigance.

Il plongea, et tout aussitôt, Clampin, se mouchant avec ses doigts, comme font les plus parfaits gentilshommes quand ils ont le caleçon de bain, dit entre haut et bas :

— Passez, Monsieur Badoît, c’est l’instant, c’est le moment : la représentation va commencer !

Le troisième bateau en ligne, au quai, contenait du charbon de l’Yonne, arrimé en haute pyramide avec des aménagements intérieurs qui formaient voûte. On pouvait habiter là-dedans.

Il n’y avait qu’une planche à traverser. M. Badoît et les deux agents passèrent.

— Stop ! fit encore Pistolet au moment où ils mettaient le pied sur le bateau.

Et le jeu de bascule, précédemment décrit, eut lieu : une tête sortit de l’eau, l’autre y rentra.

Quand le marchef reprit haleine, pour la quatrième fois, il était en face du bateau de charbon et les trois agents, accoudés sur le plat-bord, le regardaient.

Coyatier vit ces trois têtes et ne put s’empêcher de rire, car il était foncièrement fanfaron.

— Holà ! hé ! Monsieur Badoît, dit-il, et les autres, vous n’êtes pas maladroits, savez-vous ? Vous voilà dans une bonne barque, bien à votre aise ; allez-vous la manœuvrer à la voile ou à la rame pour venir me chercher ?

— Premier exercice ! prononça une voix tout auprès de son oreille. Attention, Monsieur Badoît !

Le marchef se retourna en jurant un crébleu sonore, mais il ne l’acheva pas ; sa tête descendit sous l’eau qui s’agita longtemps, comme si elle recouvrait une lutte.

Pistolet reparut le premier et fit la planche, disant :

— Explication du premier exercice : le marchef pincé par le pied droit et tâchant de m’empoigner, au fond… mais cherche ! Il a dû boire un coup d’une chopine et demie.

— Méfiance ! cria Badoît.

— Pas peur ! On a joué à cacher la baguette avec les poules d’eau de l’étang de Ville-d’Avray, et on a gagné !… Bonsoir, monsieur Coyatier, pas mal et vous ? Qu’est-ce qu’il y avait donc dans votre paquet ?

Le marchef arrivait sur lui impétueusement. C’était un beau nageur. Chacun de ses élans gagnait deux brasses.

— Tiens ! tiens ! fit Pistolet qui l’évita par une culbute à fleur d’eau, vous avez votre couteau dans les dents, marchef, ça doit gêner pour respirer… Moi, je n’ai rien… Second exercice. Eh ! là bas, monsieur Badoît, regardez voir !

Coyatier plongea pour l’éviter.

— Attention ! dit Pistolet qui coula à son tour.

Le second exercice fut long. Coyatier reparut essoufflé, vomissant des jurons entrecoupés.

— Explication du second exercice, dit le gamin dont le souffle était paisible et net : le marchef contre-pincé par le pied gauche. Pas content. A voulu m’étrangler sous l’eau, mais minute !… A desserré les dents et lâché son couteau que j’ai rattrapé au vol avant qu’il arrive au fond… Êtes-vous prêt pour la troisième et dernière passe, monsieur Coyatier, hé ?

— Je vas te déchirer en morceaux ! hurla le bandit.

— Tâche ! Attention, Monsieur Badoît.

Pendant qu’il parlait encore, Coyatier, mettant la moitié de son torse hors de l’eau, tailla une coupe furieuse, et après deux élans qui furent de véritables bonds, sa main tomba d’aplomb sur la tête du gamin.

Les trois agents ne purent retenir un cri de terreur.

Pistolet et le marchef avaient disparu ensemble.

Cette fois leur station sous l’eau fut si terriblement longue que M. Badoît commença à se déshabiller.

— Il l’a mangé ! dit-il.

Et certes, malgré les deux premières victoires de Pistolet, ce n’était pas du marchef que M. Badoît s’inquiétait.

Au moment où il mettait le pied sur le bord du bateau pour plonger, le gamin reparut seul. Il secoua ses cheveux comme un caniche mouillé, sa voix s’étouffait un peu quand il dit :

— Explication du troisième exercice… Ah ! diable ! il faut souffler un peu.

Il nagea vers le bateau, dont il était séparé maintenant par une vingtaine de brasses, et reprit à moitié chemin :

— Des fois, j’ai vu des pêcheurs qui ont le truc de prendre des brochets de douze livres avec une ligne à goujons. Ça dure longtemps, mais la bête finit par venir et ils appellent ça : noyer le poisson. J’ai noyé le poisson, et je l’amène, attaché avec deux liards de ficelle.

Il éleva sa main jusqu’au bord du bateau et ajouta :

— Prenez voir le bout de la ligne, Monsieur Badoît.

Badoît obéit. Le gamin se hissa à bord et les efforts réunis des trois agents parvinrent à embarquer une lourde masse complètement inerte. C’était le marchef qui avait un bout de ficelle attaché autour du cou.

— Maintenant, dit Pistolet, en me séchant, car je n’ai pas de rechange, je casserai une croûte avec plaisir chez le père Niquet, ouvert à la vertu jusqu’au lever du soleil.

On fit un brancard de planches pour le corps du marchef.

Au moment où ses vainqueurs retendaient sur ce lit de misère, le bandit s’éveilla en un puissant éternuement.

— Où est la mouche ? demanda-t-il d’une voix étouffée.

— Quant à ça, dit le gamin, en terre ferme, M. Coyatier est plus fort que moi. Tenez-le bien.

M. Badoît était déjà en train de lui lier les poignets.

— Viens ça ! reprit le bandit qui n’essayait même pas de résister. Pas de rancune. Je suis bloqué, quoi ! ça peut arriver à tout le monde. As-tu des nouvelles de mon paquet, hanneton ?

— Qu’y avait-il dans votre paquet, Monsieur Coyatier ? demanda curieusement le gamin.

— Une fillette… Crébleu ! c’est drôle que ça m’occupe. Si tu me la rattrapais, dis donc, petit, à ma prochaine évasion je te paierais quelque chose de bon. J’y tiens.

Sans répondre, Pistolet fit la roue par-dessus le bord du bateau et se mit à tirer sa coupe dans le sens du courant. Il allait aussi vite qu’un cheval au trot. En quelques secondes, on le perdit de vue.