La Source du gros-fessier des nourrices/02
¶ Monſieur le Cul aux Lecteurs.
I inconſideremment vous arreſtiez au
ſens littéral de la préſente complainte,
pervertiſſant le ſubiect d’icelle en autre
ſignification que celle que i’entends,
vous me pourriez imputer avoir indifféremment
taxé les bonnes & mauvaiſes,
Ce (que non) & de toutes n’avoir entendu
ce que i’en ai eſcript, que ie ne veulx addreſſer
qu’à aulcunes particulieres, dégénérantes
de la condition de leur eſtre &
parente qui comme préparées à ſe publier
en une cene ou théaſtre, ſe déguiſent tellement
par la ſuſception de nouveaulx &
impertinens habitz à leurs étatz, qu’elles
apparoiſſent toutes autres que l’inquiſition
faicte d’icelui ne les fait cognoiſtre cauſe
ou murmure des moindres cenſures des
moyens & mauvaiſe opinion des claſſicques
& hommes mieulx ſenſez. En quoy
la repréhenſion eſt notoire, ſi l’exécution
d’icelle s’en en ſuyvoit. Mais puis que
ceulx qui ont auctorité pour la correction
de tant de depravées inventions & impudiques
entrepriſes & laſcives, le favoriſent
plutôt en la continuation d’icelles qu’en
la remonſtrance & punition requiſe & dépendante
de leurs Magiſtrats & charge
commiſe, ſoubz laquelle ſe repoſe le
Prince. I’ay penſé convenir à mon debvoir
aux reffus & négligence de tous les autres
ſens mes confreres qui iuſques icy ne ſe
ſont plainctz : orez que pour ce l’occaſion
feuſt préſente, & leur plainte valable,
iuſte & faicte, de mettre en avant la complaincte
préſente, pour eſtre ung commun
mirouer à toutes ? Aux bonnes pour en
bien uſer : & aux moins ſages pour n’en
abuſer : revoquantes la nouvelle inſtitution
des veſtemens ſuperflus & diſſolutz,
& ſi i’oſe dire luciabeliſtes en l’ancienne
ſimplicité, tutrice naturelle de chaſtété,
continence & pudeur. Et ſoubz laquelle
les Dames ſe ſont ſans ſoupçon ou doubte
de leur preud’hommye, longuement entretenues,
& tant qu’elles ont eu & porté
reverence aux mœurs & couſtumes louables
de celles qui les ont précédées, &
véſcu avant elles en toute modeſtie, ſans
ſuperfluité ou indécence d’habitz, à leurs
noms, conditions & eſtatz. Et iuſques à
ce que la curioſité, nourriſſe de tout mal,
& inventrice de diſſolution & déſordre :
les en a de telle ſorte tranſportées de raiſon
& eſloignées de bonne cognoiſſance &
ſain iugement, qu’elles ſe ſont trausfigurées
en hommes, l’une des cauſes qui provocqua
l’ire du Seigneur ſur Sodome &
Gomore, & pour laquelle il peult être
irrité auiourd’huy contre nous, ſelon les
punitions que nous en voyons manifeſtes.
À ceſte cauſe pour retourner de pis à
mieulx & éviter le ſcandalle de tous &
toutes, ie les conſeille de laiſſer ſes pompes
deſordonnez, veſtementz, paſſefillons :
arceletz : deſchiqueteurs : vertugalles :
buſquines & autres infinies diſſolutions
de parement, & leur reduire à la
priſtine & ancienne obſervance des Dames
du temps paſſé, & vivre comme elles
ont faict. Si non i’ai déliberé pour me
venger de leur obſtination & pertinacité
ne leur être plus favorable : ains me fermer
& clorre. Et quelques clyſteres, ou
médecines qu’elles puiſſent prendre, à la
conſervation & entretenue de leur tainct
fardé, les rendre malades iuſques à la mort.