La Vénus des aveugles/Les Emmurées

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La Vénus des AveuglesAlphonse Lemerre, éditeur (p. 97-98).

LES EMMURÉES



L’ombre étouffe le rire étroit des Emmurées.
Leur illusoire appel s’étrangle dans la nuit.
Leur front implore en vain la brise qui s’enfuit
Vers l’Ouest, où les mers sommeillent, azurées.

Leur cécité profonde ignore les marées
Des couleurs, les reflux de la fleur et du fruit ;
Leur surdité n’a plus le souvenir du bruit,
Et la soif a noirci leurs lèvres altérées.


Leur chair ne blondit point sous l’ambre des soleils,
Lourde comme la pierre aux éternels sommeils
Que la neige console et que frôlent les brises.

S’éteignant dans l’oubli du silence vainqueur,
Leur mort vivante a pris des attitudes grises…
La rouille des lichens a dévoré leur cœur.