La moisson nouvelle/13

La bibliothèque libre.
Bibliothèque de l’Action française (p. 55-58).


HIVER CANADIEN




Mais j’aime ton brillant cortège,
Tes monts au sapin toujours vert,
J’aime la splendeur de ta neige,
J’aime ta blancheur, rude hiver !

On dirait du ciel sur les branches,
Il neige en flots étincelants.
Les collines sont toutes blanches,
Et les villages sont tout blancs…


Protectrice comme une mère,
La neige, encerclant le coteau,
Semble vouloir prendre la terre
Dans les plis de son blanc manteau…

Dans les villages solitaires
Tous les vaillants semeurs de blés,
Fronts résignés, âmes austères,
Près du feu, se sont rassemblés.

C’est l’heure des paroles tendres,
Des rires fusant sans raisons.
Dans la veillée on croit entendre
Palpiter l’âme des maisons !…


Et la lampe, la bonne lampe
A des feus inaccoutumés.
Son reflet brille sur la tempe
De tous les êtres bien-aimés.

Puis la nuit s’étend. On écoute
Le bruit des grelots dans le noir.
Un traîneau passe sur la route,
Une voix chante dans le soir…

C’est le jeune homme au cœur fidèle,
Au doux sourire, à l’œil mutin,
Qui s’en va gaiement voir sa belle,
Au fond d’un village lointain.


Rien ne rebute son courage,
Il s’en va, le cœur enchanté,
Tandis que la brise fait rage,
O poésie ! O pureté !…