La valise mystérieuse/12

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Éditions Édouard Garand (68p. 31-34).

XII

OÙ LA VALISE MYSTÉRIEUSE DU COLONEL CONRAD CHANGE DE MAINS


Revenons à l’ordonnance du colonel.

Après le départ de l’officier, Tom s’était mis à la recherche de l’objet volé, objet que le premier n’avait pas cru devoir spécifier devant son ordonnance.

Mais Tom, évidemment, était renseigné sur ce point important, puisqu’il pénétra dans le fumoir du colonel avec son sourire narquois, tout en disant à voix basse :

— Quel tapage, mon cher colonel, vous avez fait pour un rien ! Oui, pour rien ! Car vous n’avez pas été volé du tout, attendu que votre précieuse valise est toujours locataire de votre chambre à coucher… venez voir !

Et Tom, après avoir convenablement égoutté la carafe demeuré sur la table, pénétra dans la chambre à coucher de son officier. Il s’arrêta devant l’armoire, leva son index en même temps que son œil sournois, et dit en grimaçant un sourire :

— Vous voyez bien, mon colonel, que vous n’avez pas été volé et que votre belle valise toute neuve est toujours là !

En effet, la valise que Tom, la veille, avait découvert dans le garde-robe était bien visiblement juchée sur l’armoire. Mais le colonel, tout à sa colère, à son angoisse, à ses vengeances futures, n’avait rien vu. Il avait regardé partout en bas, mais il n’avait pas regardé en l’air. Oui, comme l’avait dit Tom, la valise s’était trouvée sous son nez et il ne l’avait pas vue.

Toujours grimaçant, Tom ajouta :

— À présent, jolie valise, je dois vous prévenir que je vais m’absenter pour une heure ou deux. Je compte que vous serez bien sage et ne bougerez pas de là. À mon retour, je vous dirai ce qu’on attend de vous. Fort probablement aurai-je le plaisir de vous présenter à mon excellent ami, Monsieur Grossmann.

Il exécuta une pirouette, ébaucha deux pas de danse, et gagna par sauts, bonds et ricochets sa chambre à coucher.

Dix minutes après de la même chambre sortait un individu dont l’apparition n’aurait pas manqué d’impressionner très fort le colonel. car l’individu n’était autre que Fringer avec sa grosse moustache noire aux pointes tournées en queue de cochonnet.

Au moment où il mettait le pied sur le trottoir, il vit la silhouette d’une jeune femme élégamment mise et soigneusement voilée qui se dirigeait hâtivement vers la rue Sainte-Catherine.

— Miss Jane !… murmura Fringer avec un battement de cœur. Allons ! il serait peut-être à propos de connaître ses amours… j’aurai toujours le temps de retrouver Grossmann.

Et il se mit à suivre la jeune femme.

Celle-ci, au bout d’un quart d’heure, se présentait dans un bureau de télégraphe, rue Saint-François-Xavier, et transmettait la dépêche suivante :

Capitaine Rutten… McAlpin Hôtel. New-York. Kupp a enlevé à Gross vingt mille. Kupp a acquis plans dix mille. Kupp part ce soir. Suivrai probablement. Sinon écrirai détails… Jane.

Au moment où elle sortait des bureaux du télégraphe, elle faillit se heurter à un homme qui y entrait en toute hâte.

— Huppmein ! murmura la jeune fille avec un sourire moqueur. Il était temps !…

Elle se dirigeait vers la rue Saint-Jacques, lorsque, en passant devant l’édifice de la Bourse, elle avisa un individu qui, le dos appuyé à une colonne du porche, paraissait lire, mais distraitement, un journal du matin.

— Bon ! bon ! sourit la jeune fille, voici que Mons. Fringer nous épie ! C’est bien, j’aurai l’œil sur toi, mon petit, et pas plus tard que bientôt nous éclaircirons le rôle équivoque que vous jouez, monsieur Tom, digne ordonnance de Monsieur le colonel Conrad. Mais en attendant, je compte bien te faire une petite surprise, et pas plus tard que tout à l’heure, si possible !

Un ricanement roula sur les lèvres rouges que cachait l’épaisse voilette. Elle accéléra le pas et arriva bientôt à la rue Saint-Jacques. Mais avant de s’engager sur cette rue, elle tourna la tête afin de savoir si Fringer la suivait. Non… elle ne le vit pas. Rassurée, elle se mêla vivement à la foule nombreuse des piétons.

Si Fringer n’avait pas repris sa chasse derrière Miss Jane, c’est qu’il en avait été retenu par la soudaine apparition de Kuppmein.

— Oh ! oh ! s’était-il, Miss Jane au télégraphe et Kuppmein peu après ! Qu’est-ce que cela veut dire ? Quelle est donc toute cette urgence ?… Bon, je devine : mademoiselle télégraphie à son fiancée qu’elle s’ennuie à mourir ; et Kuppmein communique à Rutten sa magnifique transaction d’hier. Mais voilà… Dois-je continuer à filer Miss Jane, ou dois-je changer de gibier ? Je me demande s’il ne serait pas plus intéressant de savoir ce que manigance encore ce cher Kuppmein ?… C’est décidé… je suis pour Kuppmein !

De suite il promena un regard rapide et scrutateur autour de lui, et voyant qu’il n’était pas observé, il éleva son journal et enleva d’un geste rapide sa moustache postiche qu’il enfouit dans l’une de ses poches. Il s’en suivit que l’associé de Kuppmein et Grossmann ressembla traits pour traits à un certain Tom, l’ordonnance d’un certain colonel Conrad !

Pendant ce temps, dans les bureaux du télégraphe Kuppmein rédigeait le message suivant : Capitaine Rutten, McAlpin Hôtel, New York. Plans acquis… Pars ce soir… Modèle suit… Méfiez-vous de Jane… Kupp.

En quittant le télégraphe Kuppmein, tout comme avait fait Miss Jane, reprit la direction de la rue Saint-Jacques. Fringer se mit à le suivre de près.

L’instant d’après, à la grande surprise de Fringer, Kuppmein entrait dans les bureaux du New York Central sur la rue Saint-Jacques.

— Oh ! oh ! se dit Fringer, est-ce que nous allons voyager bientôt. ?

Kuppmein reparut quinze minutes plus tard et se dirigea vers la rue McGill, avec Fringer sur ses talons.

Ici, que le lecteur nous permette — pour une meilleure intelligence des faits qui vont suivre — d’abandonner pour un moment le chasseur et le chassé, et de revenir à la jeune femme voilée en laquelle Fringer avait reconnu celle qui s’appelait Miss Jane.

Et Miss Jane, certaine de n’avoir pas à ses trousses ce Fringer, avait repris le chemin de la rue Metcalf. Était-ce pour rentrer chez elle ? Non. Car au lieu de prendre le trottoir qui la conduisait à son domicile, elle prit le trottoir opposé, celui qui menait à l’appartement du Colonel Conrad. Là, elle trouva le vieil anglais en train de donner ses soins à ses fleurs.

Miss Jane s’approcha du bonhomme et dit d’une voix assurée et très agréable :

— Je viens de la part du colonel Conrad… je suis sa cousine, Miss Ethel.

— Ah ! Miss… charmé !… bredouilla le vieux tout surpris et troublé, s’inclinant et enlevant son large chapeau de paille.

— Vous me connaissez ? demanda la jeune fille.

— Mais certainement, Miss, car le colonel nous parle souvent de vous, Miss Ethel.

— Vraiment ?

— Pour sûr !

— S’il parle de moi, c’est avec avantage, j’imagine ? plaisanta la jeune fille.

— Naturellement.

— Il est très gentil, mon cousin, vous savez.

— Et sa cousine donc ?… fit galamment le bonhomme en clignant de l’œil.

— Oh !… minauda Miss Jane en égrenant un joli petit rire, vous êtes flatteur !… Alors, ajouta-t-elle, vous me permettez de monter chez mon cousin ?

— Ah ! Miss, j’oubliais de vous dire que le colonel est sorti.

— Je viens de le rencontrer. Il m’envoie prendre un objet qu’il devait m’apporter et qu’il a oublié.

— Ah ! vraiment ?… Mais vous pouvez entrer, Miss, ma femme vous conduira.

— C’est bien, merci.

La minute suivante, Miss Jane pénétrait dans la maison.

Au bout de dix minutes, le bruit de la porte fit lever la tête au vieil anglais toujours penché sur ses fleurs, et il vit revenir celle qu’il prenait pour Ethel Conrad. Mais aussitôt il exécuta un bond énorme en arrière, échappa sa bêche, perdit son chapeau de paille, fit entendre une exclamation de stupeur, et, enfin, demeura livide, les yeux écarquillés, la mine hébétée.

— Eh bien ! demanda Miss Jane très surprise par l’attitude et la mimique du bonhomme, que signifie ?

— Cette valise !… bégaya l’anglais en pointant son index vers une valise énorme de cuir jaune que Miss Jane tenait à la main. Puis il fit un nouveau bond de recul, comme s’il eut vu se produire un événement horrible.

— Cette valise… répéta la jeune fille la voix tremblante. Mais elle dompta son trouble immédiatement. et demanda, tranquille : — Quoi donc d’étonnant ? Mon cousin m’a chargée de venir chercher cette valise.

— Curieux… très curieux… balbutia le bonhomme et en frottant ses yeux comme pour échapper à une vision abominable.

— Curieux… pourquoi ? demanda Miss Jane.

— Parce que le colonel nous disait ce matin que cette valise lui avait été volée au cours de la nuit.

Miss Jane éclata de rire.

— Je comprends, monsieur, votre étonnement. Oui, mon cousin m’a conté cette histoire. Seulement, un peu plus tard, il s’est souvenu qu’il avait mis cette valise sur son armoire… Alors, vous comprenez ?

— Oui, Miss, je comprends, fit le vieux confus et en ramassant son chapeau.

Un nouveau rire plus prolongé se modula sur les lèvres voilées de la jeune fille, qui sortit du parterre et prit la direction de la rue Sainte-Catherine.

Comme elle allait tourner l’angle, elle heurta presque durement un individu qu’elle ne prit pas le temps d’examiner. Elle jeta un court « Pardon me ! » et s’éloigna rapidement.

Mais l’individu s’était subitement arrêté, et aussitôt ses yeux se fixèrent sur la valise avec une indéfinissable stupeur. Et alors, d’un pas chancelant et peu sûr, il se mit à suivre Miss Jane de loin.

L’homme était de haute taille et paraissait doué d’une force herculéenne. Il portait un habit à carreaux noirs et blancs, et sa figure, dont on ne pouvait voir que les poils roux d’une barbe hirsute, disparaissait presque totalement sous les ailes battantes d’un énorme feutre gris. Tout de même, en regardant attentivement cet homme, on aurait pu reconnaître sans trop de peine Grossmann.

Mais… Grossmann vivant ?… Vivant après la balle que lui avait tirée presque à bout portant Kuppmein, et pas plus tard que la veille de ce jour ? C’était inimaginable, et pourtant c’était bien le même Grossmann, avec sa face brutale, que Kuppmein et Peter Parsons avaient laissé pour mort sur la rue Dorchester !

Et Grossmann, qui avait un air très souffrant, suivit Miss Jane… ou plutôt il suivit la valise. Souvent il éprouvait un étourdissement et titubait à ce point qu’on aurait cru qu’il allait tomber. Plusieurs passants le prirent pour un pochard. Grossmann, chaque fois qu’il manquait de tomber, grognait une imprécation, se raidissait par un violent effort de volonté, et poursuivait sa marche.

Miss Jane avait atteint la rue Peel et s’était dirigée vers la gare Windsor, au grand étonnement de Grossmann. Au bout de quelques minutes elle atteignait la gare et courait au guichet près duquel, se pressait une foule agitée de voyageurs. La jeune fille attendit plusieurs minutes. Enfin, elle put à son tour arriver devant le guichet. Elle déposa sa valise sur les dalles, tout près d’elle, ouvrit sa sacoche et demanda au préposé à la vente des billets, un « ticket » pour New York.

L’Employé s’exécuta disant :

— Prochain départ, madame, sept heures et trente ce soir.

— Je sais, sourit Miss Jane. Et si je prends de suite mon billet, c’est pour la raison que je désire faire enregistrer mes bagages dès maintenant.

L’employé s’inclina et sourit pour montrer qu’il comprenait. Miss Jane s’écarta du guichet pour laisser la place libre aux autres voyageurs. Puis elle se pencha vivement pour reprendre sa valise… Mais elle jeta aussitôt une haute exclamation de stupeur, elle éprouva comme un vertige, elle chancela et machinalement sa main se crispa sur sa gorge, tandis que ses regards effarés tournaient autour d’elle. Miss Jane se trouvait-elle mal subitement ? oui… car la valise qu’elle avait l’instant d’avant déposée là à deux pas tout au plus du guichet, avait disparu !

Elle demeura, la pauvre enfant, terriblement frappée. Mais elle se ressaisit bientôt, car Miss Jane était une fille énergique que l’infortune ne pouvait abattre facilement. Elle se mit à dévisager les voyageurs qui se bousculaient autour d’elle, elle scrutait surtout les valises de ces voyageurs. Mais aucune de ces valises — et il y en avait de toutes les formes et de toutes les couleurs — n’avait de ressemblance à la sienne.

Fiévreusement et furieusement elle se mit à parcourir la gare, cherchant la valise et avec, peut-être, le secret espoir qu’un individu quelconque l’aurait prise par mégarde. Elle alla visiter la vaste salle des bagages, mais nulle part la valise fut visible.

Le sein palpitant, les yeux enflammés, lasse et découragée, Miss Jane pénétra dans la salle des dames et se laissa choir sur une banquette.

Or, pendant que la jeune fille cherchait par toute la gare sa valise si subitement et mystérieusement envolée, on aurait pu voir, s’engouffrant par la rue Saint-Antoine à quelques pas de la gare, un homme qui filait rapidement avec la valise en cuir jaune de Miss Jane, et cet homme, comme on a pu le deviner, c’était Grossmann.

. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .

Fringer était donc reparti à la suite de Kuppmein dans l’espoir de saisir quelque secret dont il aurait fait son profit. Mais il en fut pour ses frais, car au bout d’une demi-heure de marche il vit Kuppmein rentrer tranquillement à son hôtel, le Windsor.

— Bah ! se dit Fringer avec indifférence, j’ai besoin de voir Grossmann qui habite rue Saint-Antoine à cinq minutes d’ici, de sorte que je n’aurai pas perdu tout à fait mon temps.

Il gagna le Square Dominion. Là, vers le milieu du Square, certain de ne pas être observé, il replaça adroitement sous son nez la moustache postiche, puis traversa la rue Dorchester et par une ruelle gagna la rue Saint-Antoine. Il s’arrêta peu après devant une habitation de modeste apparence où il put lire le placard suivant « Maison de pension privée ». Il sonna.

Une jeune fille vint ouvrir.

— Monsieur Grossmann ? demanda Fringer.

— Il ne loge plus ici, monsieur.

— Ah !… Depuis quand donc a-t-il changé de domicile ?

— Depuis hier, monsieur.

— Savez-vous où il habite à présent ?

— Monsieur Grossmann ne nous a pas laissé sa nouvelle adresse.

Un pli de contrariété creusa le front blême de Fringer.

— Merci tout, de même, mademoiselle, fit-il aussitôt avec un sourire contraint.

Et il s’en alla en maugréant tout bas :

— Où est allé nicher cette brute de Grossmann ?… Lui m’aurait payé cinq mille dollars pour la valise du colonel et ce qu’elle contient.

Et tout en s’éloignant d’un pas saccadé il méditait, les lèvres remuantes, mais sans articuler aucun mot, et les traits de sa figure maladive affreusement contractés.

Après quinze minutes de cette marche à l’aventure, il parvint, à son insu tant il était distrait, à l’intersection de la rue Sainte-Catherine et de la rue Metcalf.

Il jeta autour de lui un regard surpris, comme s’il eût été égaré. Mais reconnaissant bientôt les lieux, il esquissa un haussement d’épaules indifférent et se dirigea vers l’appartement du colonel.

Arrivé à dix pas environ de la petite maison en briques rouges, il aperçut le vieil anglais en train de travailler dans son parterre. D’un geste rapide Fringer fit disparaître sa moustache postiche, et continua son chemin avec un sourire bonasse à ses lèvres.

En voyant survenir l’ordonnance du colonel Conrad, le bonhomme interrompit sa besogne pour s’écrier :

— Ah ! monsieur Tom, vous ne sauriez deviner la jolie visite que nous avons eue tout à l’heure.

— Une jolie visite ! répéta Fringer que nous continuerons d’appeler ainsi. Qui donc ça ?

— Devinez un peu.

— Je suis mauvais devin, monsieur Brown.

— Eh bien ! c’est la cousine du colonel qui est venue.

— Ah !… fit simplement Fringer qui ne put réprimer un vif tressaillement.

— Oui, monsieur Tom, Miss Ethel elle-même dont le colonel nous a souvent parlé.

— Elle est venue rendre visite à son cousin alors ?

— Nullement… puisque le colonel était sorti.

— Pourquoi est-elle venue donc ?

— Pour chercher la valise du colonel… comprenez-vous ça ?

Oui, Fringer eut peur de trop comprendre.

— La valise du colonel ! répéta-t-il d’une voix tremblante.

— Hein !… c’est assez drôle, monsieur Tom, se mit à rire le bonhomme. Oui, cette valise que le colonel croyait avoir été volée !

— Tiens ! tiens ! dit Fringer qui eut un étourdissement.

— Il paraît, continua le loquace bonhomme, que le colonel ne s’est pas rappelé ce matin qu’il avait déposé, hier, cette valise sur son armoire.

— Ah !… il ne s’est pas rappelé… redit machinalement Fringer dont la pensée trottait avec vertige.

— Mais il s’en est souvenu plus tard.

— Bon.

— Alors, vous comprenez si ça m’a fait plaisir qu’il l’ait retrouvée sa valise, car pour rien au monde, je ne voudrais qu’un vol fût commis dans ma maison au détriment de mes locataires.

— C’est juste, monsieur Brown, approuva Fringer qui peu à peu parvenait à se remettre de son émoi. Et il ajouta en plaisantant :

— Ainsi donc, cette Miss Ethel, vous l’avez trouvée jolie, vieux libertin ?

— Dame !… je l’ai plutôt devinée que trouvée…

— Que voulez-vous dire ?

— Je veux dire, monsieur Tom, que je n’ai même pas aperçu le bout de son petit nez, à cause de sa voilette noire.

— Ah !… elle était voilée ?

— Oui… et puis bien chiquement habillée… élégante… distinguée… une vraie demoiselle, quoi !

Et le vieux fait une description sommaire du costume de Miss Jane.

Fringer reconnaissait clairement ce portrait, et au fond de lui-même il rugit ce nom…

— Miss Jane !…

Aussitôt il s’élança vers la maison en disant d’une voix altérée :

— Je vous répète que vous êtes un vieux libertin, monsieur Brown… À tout à l’heure, je suis pressé !

Il disparut dans la maison.

L’instant d’après, il pénétrait tout essoufflé dans la chambre à coucher du colonel et dardait un regard aigu vers l’armoire.

La valise n’était plus là…

— Feu d’enfer ! vociféra Fringer avec un geste terrible vers le ciel.

— À nous deux, Miss Jane !