Le Cartulaire de Pébrac

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LE CARTULAIRE DE PÉBRAC



M. l’abbé Payrard, ancien vicaire au Puy et maintenant curé à Saint-Julien-d’Ance, a fait paraître, dans le tome V des Tablettes historiques du Velay, un document d’une haute importance pour l’histoire de notre pays. C’est le cartulaire de l’abbaye de Pébrac.

M. A. Bruel a rendu compte de ce travail dans la quatrième livraison de la Bibliothèque de l’École des chartes (année 1879).

Le vif intérêt que notre Société attache aux publications dont notre petite patrie est l’objet, et la sympathie personnelle que nous éprouvons pour M. l’abbé Payrard, nous font un devoir de signaler cette œuvre, et nous ne saurions mieux la faire apprécier qu’en citant un extrait de l’article consacré par M. Bruel au cartulaire de Pébrac.

A. Lascombe.


Le manuscrit qui fait l’objet de cette publication était déjà connu des érudits par une bonne copie du XVIIIe siècle, conservée à la Bibliothèque nationale sous le no 9855 du fonds latin. Sans parler des extraits déjà publiés par divers auteurs, nous avions eu plusieurs fois la pensée qu’il méritait d’être publié en entier ; aussi avons-nous été bien aise d’apprendre que le manuscrit original, remontant, comme on va le voir, au XIIe siècle, existe encore, entre les mains d’un érudit qui, tout en désirant rester inconnu, a bien voulu le prêter pour la publication qui vient d’être faite par M. l’abbé Payrard. Ce travail, paru en 1875 dans les Tablettes historiques du Velay, a été tiré à part et forme une brochure que nous avons reçue récemment. Nous ferons connaître rapidement le plan de la publication, après quoi nous présenterons les quelques observations qu’elle appelle.

L’abbaye de Pébrac, de l’ordre de Saint-Augustin, fut fondée en 1062 par Pierre de Chavanon, archiprêtre de Langeac, qui en fut le premier prieur, et que l’église a rangé au nombre des saints. Voulant donner à son monastère, rapidement enrichi par les donations des évêques et des seigneurs d’Auvergne et des pays voisins, une protection efficace, Pierre le soumit à l’abbaye de Saint-Julien-de-Brioude, en 1070. Or le Terrarium est la source la plus importante de renseignements historiques sur l’abbaye de Pébrac.

Le cartulaire forme un volume in-4o de 38 feuillets ; la plupart des pièces sont précédées d’un titre, et l’éditeur leur a donné des nos de I à LXXVII. Le manuscrit n’est pas uniforme pour l’écriture : tandis que la partie principale est, au dire de l’éditeur, des XIIe et XIIIe siècles (nos IV à LXXVI, si on excepte les articles 3 à 38 du no  XLVI), le titre est du XVe ou du commencement du XVIe siècle ; la nomenclature des abbés fut écrite en 1511 (no  II jusqu’à l’article 31 ; la suite datant seulement des XVIIe et XVIIIe siècles) ; les nos III et LXXVII, (et non pas LXXVI comme on l’a imprimé par erreur) furent transcrits en 1713, d’après les originaux conservés alors chez les pp. jésuites du Puy. Malheureusement les folios XXVII à XXX manquaient et ils ont été remplacés par une copie faite sur le manuscrit latin 9855.

Mais, d’autre part, le cartulaire publié comprend en plus : 1o un extrait de l’ancienne profession de Pébrac, qui paraît se rapporter au XIVe siècle ; 2o la liste des prieurs, qui prirent le titre d’abbé à partir du quatrième, nommé Bernard de Chanac ; plusieurs extraits de ce catalogue ont été publiés dans le Gallia Christiana, t. II, col. 462 et suiv. ; 3o un bref du don fait à l’église de Pébrac par Armand de Polignac et son fils, de certains biens à Polignac, transcrit par le prieur Lacoudre en 1713, d’après une copie vidimée ; ce texte fournit quelques variantes utiles à celui qui est imprimé dans le Gallia, t. II, Instrum., col. 229.

Au no IV commence le cartulaire tel qu’il existe en copie à la Bibliothèque nationale. Il comprend, sous une forme un peu abrégée, outre les donations d’églises, celles des biens et des revenus qui furent attribués au monastère de Pébrac, depuis la fondation jusqu’au milieu du XIIIe siècle. L’éditeur a ajouté, en appendice, quelques actes du XIIIe et du XIVe siècle relatifs à Polignac et au prieuré de Saint-Pierre-de-Bilhac qui en dépendait.

L’importance de ce cartulaire, venant se joindre à ceux de Brioude, du Monastier et de Chamalières, est très grande pour l’Auvergne et le Velay ; c’est une source abondante pour la topographie, par le grand nombre de noms d’églises, de paroisses et de villages qu’il renferme, quoiqu’il ne mentionne pas, suivant la remarque de l’éditeur, les anciennes divisions territoriales tombées dès lors en désuétude. La biographie locale, l’histoire des mœurs trouveront dans ces documents des notions utiles sur les rapports des seigneurs séculiers avec les religieux. Nous signalerons seulement certaines redevances remarquables qui pesaient sur les terres données à l’abbaye : c’est ainsi que la ferme située dans le village de Longaval, que l’abbaye reçut de Lucie, épouse d’Étienne de Talhac, payait cinq setiers de froment, deux sous, un repas pour cinq chevaliers et deux écuyers (II clientibus) avec autant de chiens qu’il leur plaisait d’en amener, autant de poules qu’il y avait de maisons habitées dans le village, et une émine d’avoine pour les chevaux des chevaliers (et non cavaliers, comme dit l’éditeur, no XXV).

M. l’abbé Payrard semble avoir considéré le cartulaire comme un document littéraire ; il s’attache à relever quelques actes « poétiquement rédigés. » Mais il en trouve « la diction dure et embarrassée. » Nous aimons mieux faire remarquer que ce latin, qui est ce qu’il pouvait être au XIIe siècle, est mélangée[sic] d’une forte proportion de langue romane, qui est très semblable, remarque l’éditeur, au patois actuel des paysans de la Haute-Loire……

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