Le Correcteur typographe (Brossard)/volume 2/06

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Imprimerie de Chatelaudren (2p. 102-103).


CHAPITRE VI

CORRECTION



La rectification, sur le plomb, des erreurs commises par le compositeur, ainsi que l’exécution des changements apportés par l’auteur à la composition du texte primitif sont connus sous la dénomination de correction. De manière générale, ce mot s’emploie pour désigner toute modification, quelle qu’elle soit : ajoutés, suppressions, transpositions, changements de texte, rectifications orthographiques, rappels de règles typographiques, etc.

Toutefois, de ces diverses opérations, fort dissemblables au point de vue littéraire, mais cataloguées, en typographie, sous un nom d’ensemble, quelques-unes pour des raisons spéciales ont reçu une appellation particulière[1] :

1° Le bourdon est l’omission d’un ou de plusieurs mots, d’une phrase, d’un alinéa. Une des causes les plus fréquentes de bourdon est la répétition sur le manuscrit, à une ligne inférieure, du mot composé à la ligne supérieure.

2° Le doublon, au contraire, est la recomposition d’un mot, d’un texte antérieurement composé. Il provient fréquemment d’une distraction due à la cause, mais en sens inverse, qui produit le bourdon.

3° La coquille est la substitution d’une lettre, d’un signe erronés à la lettre ou au signe correct. À l’usage, le sens de ce mot s’est quelque peu étendu : c’est ainsi que l’omission, dans un mot, d’une ou de plusieurs lettres est désignée, un peu abusivement sous ce même nom de coquilles ;

coquilles également l’addition, l’interversion, les fautes dues aux erreurs de lecture, etc.

4° L’inobservation des règles typographiques est, après la coquille, l’une des causes les plus fréquentes de correction : ce fait tient à l’ignorance dans laquelle trop d’ouvriers se trouvent des principes les plus élémentaires de leur art, au dédain même qu’ils affectent à leur égard, à la volonté et au désir de certains auteurs de s’affranchir des prescriptions d’un métier dont ils ne connaissent que des « bribes », à la multiplicité et aussi à un défaut de précision et de fixité de ces prescriptions : celles-ci semblent en effet varier presque à l’infini, avec chaque région, avec chaque ville, avec chaque maison, avec chaque correcteur et, hélas ! presque avec chaque labeur : chacun ou chacune a une marche particulière, ou un ensemble de règles typographiques qui leur est propre : dédale sans fin où se perdent même les meilleures volontés et où s’égarent les esprits les plus avertis.

5° Les mauvaises divisions de mots, l’espacement irrégulier donnent également lieu à de nombreuses corrections ; on peut encore citer les lézardes produites par la terminaison, au même point dans un certain nombre de lignes successives, de mots, à la suite desquels se forme une sorte de ligne blanche inclinée ou verticale, — et dans ce cas appelée rue — du plus mauvais aspect.

De lui-même, à la lecture sur le plomb, le compositeur remédie à un certain nombre des erreurs ou des défectuosités que présente sa composition.

À l’aide de signes conventionnels, le correcteur signale les autres sur les marges des épreuves[2] ; le compositeur en effectue la rectification, suivant l’usage, soit en galée, soit sur le marbre.

  1. Voir le Correcteur Typographe : Essai historique, documentaire et technique, chap. vii, p. 274 et suiv.
  2. Voir le Correcteur Typographe : Essai historique, documentaire et technique, chap. vii, p. 277 et suiv.