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Le Destin des étoiles/Préfaces

La bibliothèque libre.
Traduction par Théophile Seyrig.
Félix Alcan (p. i-v).

PRÉFACE DE L’AUTEUR
À LA PREMIÈRE ÉDITION SUÉDOISE

J’ai présenté au public successivement deux livres sur l’Évolution des Mondes et sur la Vie de l’Univers tel que l’homme l’a comprise depuis les temps anciens jusqu’à aujourd’hui. — Ces livres ont reçu un accueil et une approbation que je n’avais osé espérer. Depuis lors, j’ai eu diverses occasions de traiter de nouvelles questions concernant la cosmologie, questions suscitées par le progrès et les découvertes modernes, et concernant la science astronomique. De larges vues nouvelles se sont présentées à nous par l’étude de la Voie lactée, et des relations qui lient ses étoiles les unes aux autres ; puis aussi par les études faites sur nos compagnons de route du système solaire, les planètes. Celles-ci ont fourni à l’observation des indices certains et clairs de l’évolution planétaire, et ont par là ouvert quelques vues sur le destin changeant et sur l’état futur de notre terre. Dans un opuscule encore récent, qui n’a paru qu’en allemand, Das Schicksal der Planeten (1911), j’ai traité une première fois quelques-uns de ces problèmes. D’autre part, l’évolution de notre système Solaire à partir de la Voie lactée comme origine a fait l’objet d’un certain nombre de conférences, soit dans ma patrie, soit à l’étranger. Elles forment en quelque sorte la préhistoire de l’évolution des planètes et j’ai cru pouvoir les grouper dans un ensemble d’études cosmogoniques, qui peut recevoir pour titre Le Destin des étoiles. — J’ai cru intéressant d’y joindre une étude que j’ai présentée au quatrième Congrès International de Philosophie, à Bologne, en 1911. Cette conférence avait pour sujet l’Origine du culte des étoiles, et se trouve avoir une connexité certaine avec le sujet général de ce petit volume.

J’espère que ce petit opuscule remplira suffisamment les lacunes que peuvent présenter mes études antérieures, et c’est dans cette confiance que je le présente au public, dans sa forme nouvelle, avec les additions que m’a commandées le très rapide progrès des sciences physico-astronomiques.

Svante Arrhenius
Stockholm, novembre 1915
PRÉFACE DU TRADUCTEUR

Les progrès accomplis par la science astronomique pendant les cinquante années qui viennent de s’écouler nous ont fourni un spectacle merveilleux. Si l’on embrasse d’un regard d’ensemble l’histoire de cette belle science on trouvera que les résultats acquis entre l’ère des astrologues chaldéens ou des premiers philosophes grecs, et celle de Kepler et de Copernic, — soit en 2 à 3000 ans environ, — ont fourni moins de renseignements sur le ciel que la période de trois cents ans qui s’est écoulée depuis ces derniers. L’on pourrait en dire autant si l’on compare cette période aux temps récents qui ont pris date à la découverte en 1860, du spectroscope, par Kirchhoff. L’observation, l’étude de quelques lignes noires dans une bande de lumière coloriée a été comme l’ouverture d’une porte sur l’immensité de l’univers ! D’observateur et de calculateur le savant astronome est devenu physicien, et il a appelé à l’aide cette autre science qui était parvenue à lui révéler la nature intime, la constitution des corps célestes qu’il n’avait su, jusqu’alors, que mesurer et que suivre dans leurs mouvements mesurables.

Les conséquences de cette collaboration ont été immenses. Nous avons acquis des notions certaines sur le mouvement intense qui agite, qui anime l’univers stellaire, sur la vie et sur l’avenir de beaucoup d’entre ses éléments. Nous venons enfin, tout récemment, de voir s’agrandir notre univers par la mesure des distances qui nous séparent des corps les plus lointains que la vision ou la photographie nous permettent d’apercevoir. Partout aujourd’hui la collaboration du physicien et de l’astronome, — souvent réunis en un même personnage, — produit des fruits abondants et savoureux à tous ceux qui s’intéressent aux problèmes généraux du monde.

Un des plus notables d’entre ces savants, l’éminent directeur de l’Institut Nobel, de Stockholm, a porté son attention sur ces questions de cosmologie, d’un intérêt si vif pour ceux qui pensent, et qui réfléchissent. Les résultats de ces études ont été une première fois réunis dans un volume qui a vu de nombreuses éditions en cinq ou six langues : l’Évolution des Mondes. Ce volume a sa suite dans le petit ouvrage que nous présentons aujourd’hui au public français. On y trouvera le même intérêt général, la même clarté de vues, la même sincérité que dans les précédentes études. Nous ne doutons pas que tous ceux qui prennent quelque intérêt aux problèmes cosmogoniques ne trouvent à sa lecture un rare plaisir.

Il convient de noter ici que la cruelle guerre qui vient d’ébranler le monde n’a pas arrêté les savants dans leurs travaux. Des résultats qu’on peut classer parmi les plus remarquables progrès de l’astronomie ont été acquis. M. Arrhenius a souhaité d’en voir profiter les lecteurs de ce livre et il a bien voulu mettre à jour certaines parties, tout particulièrement celles qui concernent la Voie lactée et la formation à laquelle elle appartient. On verra quelle impression de l’infini nous avons aujourd’hui acquise à la suite de ces découvertes récentes.

Le volume est illustré par les mêmes figures que celles qui ont orné l’édition anglaise ; l’une d’elles, qui n’était point exacte, a été remplacée. Nous devons à la gracieuse obligeance de M. Geber, l’éditeur de l’original suédois, la communication des clichés de ces illustrations.

T. Seyrig.