Le Drageoir aux épices/Déclaration d’amour

La bibliothèque libre.

Pour les autres éditions de ce texte, voir Déclaration d’amour.

Le Drageoir aux épicesLes Éditions G. Crès et Cie (p. 21-24).


IV

DÉCLARATION D’AMOUR


Je sens sourdre dans mon âme une indicible rage, quand je pense à toi, Ninon. Qu’une fille à qui sa mère a dit : Tu es jeune, tu es belle, tu es vierge, cela se vend ; que cette fille se livre à un libertin riche et tombe de degré en degré aux excès les plus dégradants, je l’excuse ; qu’une fille se donne par amour à un homme qui, après l’avoir mise enceinte, l’abandonne comme un lâche qu’il est ; que cette fille s’étale devant le premier venu pour nourrir son enfant, celle-là, je la plains ; mais qu’une fille bien élevée, qui est à même de gagner honnêtement sa vie, se roule, de propos délibéré, dans toutes les fanges et dans toutes les sanies, celle-là, je la hais et je la méprise.

Entends-tu, ribaude infâme, je te hais, je te méprise… et je t’aime !