Le Jardin du Silence et la Ville du Roy/I/Bercée par la langueur…

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IV


Devant le tombeau de Rose du Perrier.

Bercée par la langueur de mornes litanies,
L’enfant de du Perrier que Malherbes chanta
Repose sous l’autel où des roses flétries
Tombent. L’église est froide et le jour qui s’en va

Ressemble à la pudeur dont mon esprit s’entoure.
J’ose à peine toucher le souvenir si blanc
D’une morte si jeune et dont les traits accourent
Pour garder mes pensées qui luttent tendrement.


Comme nous sommes seuls, ombre de jeune fille,
Ce soir, dans cette odeur d’encens et de piété !
Comme nous sommes seuls et que mon cœur vacille !
Je suis déjà l’automne et vous n’avez été

Que du printemps ! Il est des pommiers sur les routes
Qui sont les frais miroirs de votre enchantement.
Mais quoi, vous n’êtes plus et mon cœur vous écoute !
La mort n’est-elle donc qu’un vain éloignement ?

Nous sommes sans années, notre temps n’a plus d’âge
Puisque l’éternité ne nous sépare pas,
Jeune fille, au si pur, au si calme visage,
Qui rentrez dans ma vie en sortant du trépas.

Étranges fiancés unis par le mystère
Nous errons mollement sous les lampes du chœur
Et nous mêlons nos voix dans la double prière
Que reflètent nos yeux tournés vers le Seigneur.

Si les fleurs de l’autel se sont trop tôt fanées,
Qu’il vous reste du moins les roses de ma foi.
Ô mon amie, que votre tombe est descellée !
Ô mon amie, combien vous êtes près de moi !