Le Laurier noir/V/Dans leur ombre

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Société de la Revue Le Feu (p. 101-102).

DANS LEUR OMBRE


Mon amour, cette nuit ont-ils plus froid que nous ?
Comme nous grelottons au reflet de leurs peines !
Le charbon a beau luire et ton corps m’être doux,
Je sens qu’entre nos bras la joie est incertaine
Et que notre abandon est couvert de cailloux.

C’est sous leur pluie glacée que nos transports s’égouttent,
Que se croise le feu de nos désirs rivaux,
C’est sous l’enlisement de la boue de leur route
Que nous nous enfonçons dans nos propres sanglots
Et que nous les brisons pour qu’on ne les écoute.


Nos songes s’enfuyant jusques en leurs brouillards,
Notre cœur n’éclatant que dans leur sacrifice,
À notre volonté comment faire une part ?
Les portes sont fermées du cirque et de la lice.
Nous sommes prisonniers du sang de leurs regards.

Mon amour, ils ont mis nos émois dans leurs luttes.
Nous nous battons en eux, et la soie du divan,
Sur laquelle nos cris à leurs cris sont en butte,
Est, dans la chambre close, une sorte de camp
Où leur ombre blessée toujours nous persécute.