Le Livre d’un père/Les Petites Sœurs

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V

LES PETITES SŒURS




Elles vont, la main dans la main,
On ne les voit jamais qu’ensemble ;
Sans que l’une à l’autre ressemble,
Toujours sur le même chemin
Elles vont, la main dans la main.

Deux fleurs sur une seule branche !
S’embrassant toujours d’un côté,
Même quand l’arbre est agité ;
L’une étant rose et l’autre blanche,
Deux fleurs sur une seule branche !

Où sont donc les petites sœurs ?
Dit chacun de nous, qu’il demande

La plus petite ou la plus grande ;
Elles ont d’égales douceurs ;
Où sont donc les petites sœurs ?

L’une veut tout ce que veut l’autre,
Dans l’étude ou dans le plaisir ;
Chacune oubliant son désir,
Pour leur bonheur et pour le nôtre,
L’une veut tout ce que veut l’autre.

Aux œuvres du cœur ou des doigts
Promptes l’une et l’autre à bien faire,
Chacune est la petite mère,
La petite sœur, à la fois,
Aux œuvres du cœur ou des doigts.

Jamais de pleurs ni de querelles,
Au salon pas plus qu’au berceau ;
Les bijoux après le cerceau,
Tout gaîment se partage entre elles…
Jamais de pleurs ni de querelles.

Elles vont, la main dans la main,
On ne les voit jamais qu’ensemble ;
Sans que l’une à l’autre ressemble,
Toujours sur le même chemin
Elles vont, la main dans la main.


Septembre 1873.