Le Mespris de la vie et consolation contre la mort/« Rameine en ton esprit combien d’affliction »

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Le Mespris de la vie et consolation contre la mort
Le Mespris de la vie et consolation contre la mortNicolas de Moinge (p. 61).

LXXIII.


Rameine en ton esprit combien d’affliction,
Combien de folle joye, & de vaine allegresse
Combien d'aigre douleur, & de forte tristesse
Ont divisez tes jours en diverse action :

Combien t'en a oste la conversation,
Combien du peuple sot la hantise, & la presse,
Combien le faus semblant d'une feinte caresse
Cenant d'un potentat espris d'ambition :

En fin du connoistra, avant que tu meurisses
Que tu meurs en verdeur, en mesmes precipices
Tresbuchans, & glissans, nous nous entre-suivons :

Nos jours sont si soudains, notre repos si fresle,
Et nostre aise si court, que la moindre parcelle
De toute nostre vie, est-ce que nous vivons.