Le Miroir des jours/La neige

La bibliothèque libre.
La neige (1912)
Le Miroir des joursMontréal (p. 97-98).


LA NEIGE


 
Je te salue, ô Reine immaculée et fine,
Souveraine que vêt un long manteau d’hermine !

Tu t’es vue à ma vitre, et ma vitre, en hommage,
A retenu captif ton radieux visage !

Ô Reine de blancheur, si fragile et si douce,
Le sol noir sous tes pas fleurit de blanche mousse !

Le Vent porte ta traîne et balance tes voiles,
La Nuit pose à ton front sa couronne d’étoiles !


Et l’arbre, qui n’a plus de sève ni de force,
Frémit quand tes bras clairs étreignent son écorce !

Si le petit enfant t’adore, ô pure Dame,
C’est qu’il peut comparer ta candeur à son âme !

Et pour te caresser, rieur, ses deux mains frêles
Ont la légèreté de deux petites ailes !

Tu marches sur les toits, secrète, à l’heure brune,
Et tu reçois le grand baiser bleu de la lune !…

En ce jour où tu vas en robe lumineuse,
Je te salue, ô Neige humble et silencieuse !