À valider

Le Mouvement libertaire sous la IIIe République/VIII

La bibliothèque libre.
Aller à la navigation Aller à la recherche
Les œuvres représentatives (p. 100-117).

VIII

LA TERREUR


Mais nos démêlés avec la Société des Gens de Lettres ne furent qu’un intermède. Arrestations et condamnations suivaient leur cours, ne faisant qu’augmenter l’exaspération des anarchistes.

La condamnation inique des manifestants de Clichy, surtout, avait porté cette exaspération à son comble.

Des bombes, à différentes reprises, éclatèrent dans Paris, faisant plus de bruit que de mal. Lorsque, fin mars 1892, un engin éclata dans une maison du boulevard Saint-Germain, habitée par Benoît, président du tribunal, qui avait condamné les camarades de Clichy. Sans compter celui de l’explosion, cette bombe fit quelque bruit. Ça devenait sérieux. Comment ! on s’attaquait à la magistrature ? Car, il n’y avait aucun doute, c’était bien Benoît que visaient les auteurs de l’acte.

L’émotion n’était pas encore calmée, qu’une seconde bombe éclatait rue de Clichy, dans la maison habitée par Bulot qui avait requis contre les mêmes camarades. Toutes deux ne firent que des dégâts matériels, mais, par les personnages visés, cela leur donnait une importance exceptionnelle. Les journaux en furent indignés. Dans une interview, Bulot déclare que « C’était la première fois que l’on s’attaquait à des magistrats ! Jusqu’alors les condamnés avaient tranquillement « encaissé » leur condamnation sans en vouloir à leurs juges. Vraiment ! le métier de juge devenait impossible si les anarchistes instauraient ces mœurs nouvelles ! »

Dans la Révolte, je relevai cette interview, terminant, l’entrefilet ainsi qu’il suit :

« Comment trouvez-vous le monsieur qui gagne sa vie à demander la tête des autres, et qui le fait sachant qu’il n’y a nul danger pour lui ? »

« Ces dernières explosions n’auraient-elles eu d’autre effet que de jeter ces individus bas de leur prétendue mission sociale, nous les montrant gagnant leur vie à faire couper des têtes comme d’autres font des cannes ou des manches de parapluies, qu’elles auraient encore du bon ».

Bulot n’oublia pas cet entrefilet — assez mal bâti lorsque je le relis — et il me le rappela dans son réquisitoire contre la Société mourante et dans le Procès des Trente.

On n’avait relevé aucun indice sur les auteurs de ces attentats ; mais tout de suite, on sut que c’était Ravachol. Quelqu’un, évidemment, avait mangé le morceau. Par la suite, il fut prouvé que l’un de ceux qui étaient dans la confiance de Ravachol, le nommé Chaumartin, s’était vendu à la police.

Ce Ravachol avait la police à ses trousses pour plusieurs méfaits accomplis dans la région de Saint-Étienne.

C’était, d’abord, le meurtre d’un vieil avare, vivant de mendicité et connu sous le nom d’Ermite de Chambles, la localité où il vivait. Puis, c’était la violation de la sépulture d’une vieille femme que l’on disait avoir été enterrée avec ses bijoux et pierreries.

Ces affaires firent grand bruit dans la région lyonnaise et stéphanoise. Beaucoup d’anarchistes étaient convaincus que Ravachol n’avait perpétré ces actes qu’en vue de fournir de l’argent à la propagande.

Plusieurs anarchistes avaient même été arrêtés comme complices. Mais, lorsqu’ils passèrent en jugement, l’attitude de ces comparses fut si piteuse, se rejetant mutuellement leur responsabilité, que cela nous dégoûta et nous rendit injustes envers Ravachol.

Ce fut sous l’impression du compte rendu de ce procès que Kropotkine m’envoya, là-dessus, deux articles intitulés : « Affaire de Chambles », où il disait tout son dégoût.

Cet article nous amena des lettres de camarades, de Ricard entre autres, nous affirmant la sincérité de Ravachol. Par la suite, par sa crâne attitude devant les juges, nous apprîmes à mieux le juger. On pouvait, évidemment, se cabrer devant l’assassinat, même d’un personnage aussi peu intéressant qu’était la victime, pour se procurer de l’argent. Mais c’était un homme sincère, d’une énergie peu commune.

Enfin, ce fut le vol de dynamite, dans un chantier de Soisy-sous-Etiolles qui vint porter la terreur à son comble. Plusieurs camarades furent arrêtés à cette occasion, parmi lesquels, G. Etiévant, Faugoux et quelques autres.

Cela me valut une nouvelle perquisition.

Un après-midi j’étais tranquillement en train de travailler lorsque je vis entrer deux policiers,

— C’est moi, Rossignol, fit l’un d’eux. Je suis déjà venu ici chercher deux anarchistes italiens qui avaient poignardé un mouchard. (Il voulait parler de sa visite lors de l’arrestation de Monod).

— Ah ! qu’est-ce qu’il y a de cassé, encore ?

— Monsieur Goron va vous le dire.

S’adressant à quelqu’un qui était resté au bas de l’escalier :

— Vous pouvez monter, monsieur Goron, Grave est tout seul !

Et Goron fit son apparition, sortant un papier de sa poche.

— Nous venons chercher de la dynamite. C’est le Préfet de Police qui nous envoie. J’ai le mandat,

— Vous pourrez dire au Préfet de Police qu’il est un rude fourneau de s’imaginer qu’ayant de la dynamite à cacher, c’est ici que je la cacherais.

— Je ne vous dis pas. Mais on nous envoie.

Pendant ce temps les deux autres olibrius étaient en train, mais sans grande conviction, de remuer les paquets de journaux et brochures qui encombraient la pièce.

Au milieu de l’opération, Rossignol s’écria :

— Il est épatant ce Grave. Chaque fois qu’on le file, c’est au Palais de Justice qu’il vous emmène !

Était-ce une invention de Rossignol ? Jamais je ne m’étais aperçu que j’étais filé. Toutes les semaines, il est vrai, j’allais au Palais de Justice, au Petit Parquet, faire le dépôt des deux numéros obligatoires, signés. Peut-être était-ce un de ces jours-là !

En tout cas, j’étais bien innocent de la plaisanterie que m’attribuait Rossignol. Je me contentai de lui répondre : — Si vous croyez que je m’occupe de vous autres ! J’ai bien d’autres chiens à peigner.

À un autre moment, — car on faisait la causette — comme il était question de ceux qui venaient au bureau, il lança, sans avoir l’air de rien :

— Il vient beaucoup de compagnons ici, mais il doit bien s’en trouver de la boîte !

— Ceux de la boite ont de bien trop sales gueules et sont bien trop bêtes pour que j’aie grand mal à les brûler, rétorquai-je.

Le simulacre de perquisition — car elle n’eut rien de sérieux — ayant pris fin, Coron réunit une demi-douzaine de lettres qui se trouvaient sur la table et se préparait à les empaqueter pour les emporter.

— Il vous faut absolument emporter quelque chose où vous passez, Vous ne pouvez vous en aller les mains vides, lui dis-je.

— Et puis, ça lui ferait peut-être faute pour son journal, fit Rossignol, bon apôtre, ajoutant d’un air bonasse : Qui sait ? il y en a qui viennent peut-être de la boîte.

Était-ce un mot d’ordre pour me faire croire que nous étions entourés de mouchards ?

Goron hésita un instant, tourna et retourna les lettres dans ses mains, se décida à la fin à les laisser sur la table, et se retira avec ses acolytes.

C’était la première fois que des policiers quittaient le bureau sans rien chaparder.

Les camarades arrêtés pour le vol de Soisy passèrent en jugement. L’attitude de tous fut très énergique. Celle de Faugoux goguenarde. Ils furent condamnés à des peines très sévères. Pour sa part, Etiévant attrapa cinq ans.

Ce fut à ce procès qu’il lut cette magnifique affirmation de principes anarchistes que nous publiâmes dans le journal et en brochure sous le titre : « Déclarations », de G. Etiévant. Ce fut son père qui m’apporta le manuscrit.

Il me fut dit, plus tard, par quelqu’un qui semblait le connaître, que ces « Déclarations » avaient été écrites par un ingénieur nommé Jacquelines, ancien blanquiste rallié aux idées anarchistes, qui avait collaboré à divers journaux anarchistes, entre autres à la Révolution Sociale. Ses articles n’étaient pas mal, mais, de tous ceux que j’ai lus aucun n’avait l’envergure des « Déclarations » lues par Etiévant.

D’autre part, le peu que je vis d’Etiévant tendrait à me faire croire qu’il n’avait pas, seul, écrit sa défense. Lorsqu’il passa à nouveau en jugement pour l’affaire du poste de la rue Berzélius, il lut de nouvelles « Déclarations » qui furent publiées par le journal que faisait Constant Martin, Elles étaient loin de valoir les premières.

Mais cela n’a pas d’importance. C’était un garçon d’énergie, et indubitablement intelligent, qui fut quelque peu déséquilibré par la prison. Lorsqu’il fut arrêté à la suite de son attentat contre les sergots, il m’envoya, de Mazas, des problèmes de mathématique et d’algèbre qu’il avait résolus lui-même, sans avoir jamais étudié ni l’une ni l’autre.

Ne connaissant pas ces sciences moi-même, j’envoyai ces solutions à Leyret qui les trouva exactes.

À sa sortie de prison, il alla à Londres où il resta huit jours. Là-bas, des camarades l’avaient emmené à une réunion ou, comme de juste, on ne parlait qu’anglais. En en revenant, il confia aux camarades qui l’accompagnaient, que l’on n’y avait dit que des bêtises ! Le malheureux ne connaissait pas un mot d’anglais !

Il revint à Paris, désorbité, incapable de se remettre au travail ou n’en trouvant pas. Sans aucune raison connue, il attaqua, seul, à coups de revolver, un poste de police, rue Berzélius. Ce qui l’envoya au bagne où il mourut.

M. E. Reynaud, dans ses Souvenirs d’un commissaire de police, en parlant de cette affaire de Soisy, dit que Faugoux était la « casserole » de je ne sais plus quel commissaire de police. Je ne sais de qui M. Reynaud tient ces renseignements, mais ils sont, certainement, erronés en ce cas. Au tribunal, Faugoux se moqua continuellement de ses juges. Il fut envoyé au bagne où il mourut, si je ne me trompe, dans une des révoltes où furent tués plusieurs anarchistes. S’il eût été une casserole, Faugoux ne serait pas mort au bagne.

Il semble qu’il y eut bien un mouchardage dans l’affaire, mais si on s’en rapporte aux journaux de l’époque, c’était un nommé Drouhet qui avait vendu toute l’affaire. Je n’ai pas connu l’individu. Il n’était pas dans ma liste.

Il va sans dire que tout cela avait surexcité l’opinion publique. Les journaux à moitié littéraires, comme l’Écho de Paris, le Journal, voire même parfois l’Éclair, étaient remplis d’articles tout à fait révolutionnaires. Mirbeau, Séverine, Ajalbert, Bernard Lazare, Descaves, Geffroy, Arsène Alexandre, écrivaient des articles purement anarchistes. Notre supplément n’avait crainte de chômer.

Bernard Lazare, Paul Adam, Henry Fèvre, Francis Vielé-Griffin, H. de Régnier, avaient fondé Les Entretiens Politiques et Littéraires qui, à la fin, étaient devenus tout à fait révolutionnaires.

Dans un article « École de Ravachol », Paul Adam reprochait à la Révolte de n’être pas assez révolutionnaire ! Pour quelqu’un qui devait finir bourgeois et militariste, ce n’est pas mal !

H. Fèvre — celui-là aussi, hélas ! a bien mal fini — dans un des derniers numéros écrivit un article sur les députés. Il terminait ainsi : « O bombes de l’avenir ! » La semaine suivante Vaillant jetait la sienne dans l’enceinte du Palais-Bourbon !

Fèvre m’écrivit aussitôt que si j’avais l’intention de reproduire son article il me priait de n’en rien faire. Je le rassurai. Pas plus que lui, tout en appréciant l’article, je n’avais envie d’être poursuivi.

Mais le 1er mai approchait (1892). Fin avril s’amenèrent au bureau deux mouchards chargés de m’arrêter, soi-disant, pour non-paiement de l’amende de mon procès au sujet de l’article sur Fourmies.

Ils me dirent que si j’offrais un acompte je serais certainement relâché ; que ça se faisait d’habitude. Je pris donc une quarantaine de francs — toute la caisse — et, arrivé au Dépôt, je demandai à être conduit auprès du rond-de-cuir qui avait charge du département des amendes.

On me fit attendre assez longtemps dans un local rempli de « mouches ». Enfin, on finit par venir me chercher. Après avoir traversé je ne sais combien de pièces et couloirs, on nous introduisit, mes deux gardes du corps et moi, dans une pièce très exiguë, remplie de paperasses, dont le désordre pouvait se comparer avantageusement à celui du bureau de la Révolte, et où se tenait un monsieur très solennel, très prudhommesque.

Le bonhomme nous fit aligner, les deux chaouchs et moi, devant la cheminée, comme s’il eût voulu nous passer en revue.

Un des mouchards — qui avait de l’éducation — se trouvant devant un chef, ôta délicatement sa chique de sa bouche et la jeta derrière lui, dans la cheminée.

Mais, dans la cheminée, se trouvait un petit fourneau allumé, avec une casserole pleine d’eau où cuisaient deux œufs que le bureaucrate préparait pour son déjeuner. La chique alla tomber dans la casserole, commençant a teindre l’eau en jaune. Comme il s’était retourné en même temps, le gaffeur s’empressa d’enlever sa chique avant que le vieux « rombier » s’aperçût de ce qui était ajouté à son menu. Je dus me mordre les lèvres pour ne pas éclater de rire.

Enfin, après nous avoir fait pas mal poser, tout bien considéré, le bonhomme me déclara qu’il ne pouvait accepter aucun acompte, et que, par conséquent, je ne pouvais être libéré. Ce que j’aurais dû deviner si je m’étais donné la peine de réfléchir. Je fus donc reconduit au Dépôt, à la salle commune où je restai deux jours. Le deuxième jour je vis arriver Delesalle qui avait été, lui aussi, cueilli quoique n’ayant aucune amende à payer. Évidemment, c’était une rafle en prévision du 1er mai. Le paiement de l’amende n’était qu’un prétexte.

Je fus ensuite mis en cellule où je restai plusieurs jours. Dans mes pérégrinations à travers le Dépôt, je vis des gamins qui n’avaient peut-être pas douze ans, enfermés avec des adultes dont l’aspect ne dénotait pas la crème de l’espèce humaine. Je l’écrivis à Mirbeau qui écrivit un article émouvant là-dessus dans l’Écho de Paris.

Mon premier soin avait été de me réclamer de ma qualité (!) de politique. Le directeur me fit appeler au bout de quelques jours, mais ne me prêta qu’une oreille distraite. Enfin, l’ordre vint de me transférer à Sainte-Pélagie, Là, ce ne fut qu’aux « dettiers » que je fus conduit.

Le régime y était meilleur qu’au quartier de droit commun, mais ça ne valait tout de même pas le Pavillon des Princes. Je fis une nouvelle réclamation.

Ce ne fut que deux ou trois jours après que le directeur me fit appeler. Il était assisté de l’inspecteur de la prison.

— J’ai reçu votre réclamation, fit le directeur. Savez-vous que vos camarades sont un danger public. Vous savez qu’ils viennent de faire sauter le restaurant Véry ?

C’était la première nouvelle que j’en avais. Même, sur le moment, je n’y étais pas. Véry ? Mais je fus sur la piste aussitôt.

Aussi impassible qu’ils semblaient graves, je leur répondis :

— Il n’avait qu’à ne pas se faire mouchard.

— Oh ! je ne veux pas discuter cela avec vous, reprît le directeur qui s’appelait Potin, Je vous ai fait venir pour vous dire que vous pouvez vous préparer à passer aux politiques. On ira vous chercher pour vous y conduire. C’est ainsi que j’appris l’attentat Véry.

Mais, non contents de m’arrêter soi-disant pour le paiement de mon amende, on avait profité de mon absence pour perquisitionner au bureau et enlever diverses choses. J’en fus informé par mes parents du 140. J’écrivis aussitôt au Procureur de la République :

Paris, 17/6 1892.
Monsieur le Procureur,

Arrêté le 20 avril, pour non-paiement d’une amende, on a, en vertu de je ne sais quel mandat, fait perquisition chez moi, en mon absence, deux jours après mon arrestation et on s’est emparé de lettres, manuscrits, brochures, volumes, mandats et d’un revolver. (Pauvre revolver ! il finissait par connaître le chemin du Palais de Justice).

Or, ces lettres se rapportent aux comptes du journal dont je suis l’administrateur ; les brochures — dont le dépôt légal a été fait lors de leur apparition — ne sont l’objet d’aucune poursuite ; les volumes ont été payés de mon argent, chez les éditeurs qui ne sont pas inquiétés ; les manuscrits ne peuvent être poursuivables puisqu’ils ne sont pas encore publiés.

Aussi, pour justifier cet abus de pouvoir, m’a-t-on fait appeler chez un juge d’instruction, en me déclarant que j’étais soupçonné de faire partie d’une bande de malfaiteurs ! C’est un comble ! C’est celui auquel on a pris ce qui lui appartient qui est un malfaiteur !

Je n’ai pas la naïveté de m’étonner du procédé : depuis longtemps je sais que la loi justifie tous les actes de ceux qui l’appliquent, lorsqu’ils ont la force pour la faire exécuter. Je ne récriminerai ni ne protesterai : je pense seulement qu’il suffira de vous signaler cette anomalie ; — un anarchiste forcé de rappeler à des magistrats qu’ils ont accompli à son égard ce qu’on lui reproche de penser seulement — pour que vous vous empressiez de faire rapporter chez lui les objets qui lui appartiennent ; sinon, ne pourrait-il pas dire que l’on n’a pas pour lui, respecté les formes de la légalité dont on prétend lui imposer l’observance ?

Je vous salue.
J. Grave.

Qui, à ce moment, était à Sainte-Pélagie ? Je l’ai totalement oublié. Tout ce que je me rappelle, c’est que Pouget venait d’en sortir.

Il avait été enfermé sur la réquisition d’un patron — du côté des Ardennes, je crois — qui, se jugeant diffamé par un article du Père Peinard, l’avait fait condamner à des dommages et intérêts que Pouget n’avait pas jugé nécessaire de payer. Son adversaire avait obtenu la contrainte par corps contre lui. Seulement, il devait payer le prix de la « pension » que réclamait l’administration pour détenir Pouget. Il devait payer une quinzaine d’avance.

Mais, comme pour les amendes, si le détenu n’est inscrit sur aucun rôle d’impôts, il peut tirer un certificat d’indigence, et alors il ne fait plus que la moitié du temps de la contrainte ; or, la veille de la libération de Pouget, il avait versé an greffe la quinzaine d’avance. On se garda bien de le prévenir que son ennemi devait être libéré, de sorte que, le lendemain, il fut religieusement remis à Pouget l’argent versé à son crédit par son persécuteur pour le détenir sur « la paille humide des cachots ! »

Pour les frais de mon procès et l’amende, je devais faire quarante jours de contrainte. Inutile de dire que, moi aussi, je me réclamai de la bienheureuse clause pour ne faire que vingt jours. Mais le temps passait, le vingtième jour approchait sans que, comme sœur Anne, je visse rien venir en réponse à ma requête.

Enfin, le dix neuvième jour, les gardiens vinrent me prévenir de me préparer pour… aller à l’instruction[1]. La voiture cellulaire m’attendait. C’était une réponse du berger à la bergère que je n’avais pas prévue. De quel nouveau crime m’étais-je rendu coupable sans le savoir ?

Arrivé au Palais de Justice, je fus amené devant un juge nommé Doppfer.

Ce monsieur, très poli, me fit asseoir. Mais, lui et son greffier étaient d’un solennel à vous impressionner. « Le beurre ne leur aurait pas fondu dans la bouche », comme disent les Anglais.

Mais je n’étais guère impressionnable. Je commençais à être blasé sur les juges, même d’instruction. Pour tout dire, je commençais à en avoir assez.

Après les questions d’usage, sur mes nom, prénoms, âge, etc., nous nous mîmes à discuter socialisme.

Mais comme il en revenait aux attentats, la violence, etc., je lui répliquai :

— Vous, messieurs les juges, vous avez pris l’habitude de jouer avec la tête et la liberté des individus pour défendre ceux qui possèdent. Que voulez-vous ? Il s’en trouve quelques-uns qui ont le caractère mal fait et qui se vengent. Cela, vous ne l’empêcherez pas.

Après quelques escarmouches, M. Doppfer m’annonça que n’ayant trouvé aucune charge contre moi, je serais, le lendemain, remis en liberté… provisoire[2], bénéficiant de la clause dont j’ai parlé.

Le lendemain, je réintégrais le 140 de la rue Mouffetard.

Le 2 janvier 1893, des policiers se présentèrent chez Benoît, mon parent. Sa femme était seule. Ils prétendirent agir en vertu d’un mandat de perquisition. Ils emportèrent un paquet de lettres que j’avais mis chez eux, de crainte qu’elles ne fussent prises en cas de perquisitions chez moi. Non pas qu’elles fussent compromettantes en quoi que ce soit, mais parce que je tenais à les garder. Il s’agissait de lettres de littérateurs, quelques-unes de Darnaud (un ex-commandant de zouaves, retraité, maire de Roquefixade, qui était venu aux idées et en faisait la propagande dans sa région). Il y en avait une que Ravachol m’avait écrite de la Conciergerie. Plus un manuscrit que je n’avais pas lu, traitant de la fabrication des explosifs, remis par Perrare[3]

Ce ne fut que lorsque je descendis que Mme Benoît m’apprit la perquisition qu’elle venait de subir et la saisie du paquet de lettres. Comme les « perquisitionneurs » ne s’étaient pas fait connaître, ni n’avaient laissé aucun procès-verbal, je l’engageai à aller chez le commissaire du quartier pour réclamer ce qui avait été pris.

Le commissaire n’était au courant de rien, et l’engagea à écrire au Procureur de la République. Ce que je fis aussitôt. Sans recevoir aucune réponse, naturellement.

Mais comme je ne voulais pas laisser passer, sans protester, cette spoliation, dans la Révolte de la semaine suivante, en tête du numéro, sous le titre : Avis aux Collectionneurs, je publiai que, si jamais venaient en vente des autographes de Mirbeau, Barrès, Reibrach, et beaucoup d’autres, qui m’étaient adressés, ils ne pourraient provenir que du vol dont j’avais été victime.

Plus tard, lorsqu’il fut avec moi, aux Temps Nouveaux, Delesalle m’avisa un jour que, sur un catalogue d’une vente Charavay, il avait vu qu’elle comportait une lettre de Ravachol adressée à mon nom. Mais la vente avait eu lieu déjà.

J’écrivis à Charavay pour lui demander de qui il tenait cette lettre. À qui l’avait-il achetée ? Bien entendu, M. Charavay ne se rappelait pas la lettre, ni, par conséquent, de qui il la tenait.

La répression continuait. On arrêtait à tort et à travers. Les journaux révolutionnaires étaient poursuivis et aussitôt condamnés. Ce qui ne les empêchait pas de trouver autant de gérants qu’ils en avaient besoin.

Les lois sur la presse n’étant pas assez draconiennes, on augmenta les pénalités pour la plupart des cas. Mais ce fut un cautère sur une jambe de bois. La propagande révolutionnaire continuait de plus belle. Tous les jours il y avait quelque attentat plus ou moins sérieux, quelque acte de révolte. Non seulement en France, mais partout.

En août 1892, une grève éclata à Carmaux, il s’ensuivit des troubles qui durèrent quelque temps, et soulevèrent l’opinion.

Un beau jour une bombe fut découverte au siège de la compagnie, avenue de l’Opéra. Elle fut transportée au poste de police de la rue des Bons-Enfants, où elle éclata entraînant la mort… de saisissement de l’un des agents.

La bombe qui, plus tard, fut attribuée à Émile Henry, avait été plus intelligente que ses auteurs. Eût-elle éclaté avenue de l’Opéra, elle aurait pu entraîner la mort de plusieurs ouvrières, un atelier de couturières étant, paraît-il proche voisin des bureaux où avait été placée la bombe. Cela n’aurait pu que soulever l’opinion publique contre les anarchistes. Tandis qu’au poste de police cela n’avait aucune importance.

Un peu plus tard, à Barcelone, ce fut au Liceo, un des plus luxueux théâtres de cette ville, qu’il en éclatait une autre, jetée par des inconnus, tuant une vingtaine de personnes, en blessant une cinquantaine. Aussitôt, on accusa les anarchistes qui avaient voulu venger un des leurs, Pallas, fusillé à la suite d’une tentative contre l’auteur de l’exécution d’innocents à Xérès.

Kropotkine m’envoya un article réprouvant l’acte.

Sans doute, Kropotkine avait raison à un point de vue. Se venger sur des innocents (je crois qu’il y avait eu des enfants de tués), jeter des bombes dans un lieu public, où elles tuent des gens qui, peut-être, ne valent pas cher, mais peuvent aussi en estropier d’autres fort estimables, n’est pas un moyen efficace de proclamer la fraternité, la solidarité, la justice.

Mais nous traversions une période troublée. L’autorité, en Espagne, avait été infâme. On avait, comme en France, arrêté des gens sans motifs valables, on les avait gardés indéfiniment en prison. De plus, on en avait envoyé au bagne. On en avait torturé d’une façon abominable. À mon avis, nous ne pouvions, avant de savoir, jeter par-dessus bord les auteurs de l’attentat.

J’écrivis dans ce sens à Kropotkine, lui demandant de retirer son article. Ce qu’il fit, du reste, sans hésitation. J’en écrivis un pour le remplacer, que j’intitulai : « La Vengeance » ! Il se terminait ainsi :

« Certes, pour en arriver à exécuter cet attentat, il faut avoir le cœur creusé par la haine, corrodé par les souffrances endurées. Pour qu’un anarchiste, dont la préoccupation maîtresse est celle de la justice, puisse arriver à concevoir froidement la mort de tant de personnes coupables seulement d’appartenir à la classe privilégiée, il faut qu’il soit bien profondément ulcéré.

« Que les bourgeois qui sont atteints lui jettent l’anathème, c’est dans la logique humaine.

« S’ils réfléchissent aux misères qu’engendre l’ordre social dont ils tirent leur profit, aux vies humaines fauchées par leur avarice, ils devraient s’étonner que Paris existe encore ».

Plus tard, nous apprîmes que l’un des auteurs de l’attentat était un de ceux qui avaient été atrocement torturés dans la prison de Montjuich. Cela ne justifiait pas l’attentat, mais cela l’expliquait.

Ce fut, enfin, l’attentat de Vaillant contre l’« Aquarium », comme le Père Peinard avait baptisé le Palais-Bourbon.

À cette occasion, j’écrivis l’article : « Leur Peur » qui fut poursuivi. C’était le premier numéro que le camarade Siguret signait comme gérant.

Mais, cette fois, c’était trop. C’est en rechignant, que les députés avaient consenti à voter les lois qui aggravaient les pénalités contre la presse. Jusque-là, les actes de révolte ne les concernaient pas. Mais, du jour où l’on s’attaqua à eux, ils devinrent enragés. Ce que l’opinion publique flétrit du nom de « lois scélérates », c’est-à-dire, les lois contre ce que l’on appelait « Association de malfaiteurs », et par lesquelles on pouvait faire partie d’une association sans s’être jamais vus ni avoir correspondu, furent votées dare-dare, sans rémission. « Ceux qui auraient eu connaissance de la préparation d’un attentat seraient poursuivis comme complices, s’ils ne dénonçaient pas les faits à leur connaissance ». Tout cela fut voté en cinq secs.

Quant aux journaux, non seulement, gérants, écrivains pouvaient être poursuivis, les pénalités augmentées à nouveau, les portant à 5 ans de prison là où auparavant on pouvait attraper 6 mois ; mais l’imprimeur, le vendeur pouvaient être poursuivis. Nous retournions à l’Empire.

À propos de Vaillant, M. Raynaud, dans le volume dont j’ai déjà parlé, affirme que lui aussi aurait agi — sans le savoir — sous l’inspiration d’un agent provocateur, nommé Jacot qui lui aurait été envoyé par un de ses camarades, nommé R… mais connu sous le nom de Georges.

Ce nommé R… est évidemment Renard qui, en effet, fut connu comme mouchard. Quant à Jacot, je n’en ai jamais entendu parler.

D’après M. Raynaud, en haut lieu on désirait faire voter les lois scélérates, mais la Chambre s’y montrait rebelle. Puybaraud aurait inventé l’attentat en vue de forcer la main aux députés récalcitrants.

Comme moralité, ça ne laisse rien à désirer. Peut-être, après tout, cet état d’esprit existait-il au ministère et à la Préfecture de Police, puisque M. Raynaud prétend que son Jacot allait, se vantant dans les couloirs d’avoir fourni la bombe à Vaillant en vue de se faire bien voir des chefs.

Donc, selon lui, — et M. Raynaud répète ce qu’il a entendu — envoyé par ses chefs, — avec la complicité de Dupuy — il serait allé trouver Vaillant, se donnant comme anarchiste-cambrioleur, disposant d’argent pour la propagande. Vaillant était dans la misère, il lui aurait donné cinq louis, puis cuisiné et persuadé d’accomplir son attentat, mais prenant la précaution de lui fournir la bombe pour qu’elle fût inoffensive.

Cependant, je le répète, personne, parmi nous, n’a jamais entendu parler de ce Jacot. Le seul que l’on connût et qui était en relations étroites avec Vaillant, à cette époque, était un camarade nommé Pauwels. Ils durent combiner plusieurs affaires ensemble, car Pauwels sema, pour son compte, plusieurs bombes dans Paris, et fut lui-même victime de celle qu’il jeta à la Madeleine. Or Pauwels était un bon camarade, sincère et connu de nous tous.

Toujours est-il que les lois furent votées, et qu’à la suite de ce vote, Bourbier — le vendeur du Petit Parisien qui

Les Trimardeurs LACMA M.89.173.20
Les Trimardeurs LACMA M.89.173.20
VII
REPRODUCTION D’UNE LITHOGRAPHIE DE PISSARO
Ravachol à Montbrison
Ravachol à Montbrison
VIII
PORTRAIT DE RAVACHOL
faisait le service de la Révolte pour les libraires de Paris, — voulant se mettre à l’abri de ladite loi, me fit signer un engagement par lequel j’étais censé lui louer un de ses guichets. Je devais être présent à la distribution du journal aux porteurs.

Mercier et moi, pour être à l’heure, — la distribution commençait vers les deux ou trois heures du matin — nous nous rendions aux environs du Croissant, passant la soirée à prendre du café jusqu’à la fermeture des établissements, et rentrions le matin crevés de fatigue, après avoir fait acte de présence à la distribution aux porteurs.

Mercier était un drôle de type. Il m’était venu, recommandé par Reclus. Ritzerfeld étant mort, je le pris pour m’aider.

Je ne l’avais accepté qu’à cause de la recommandation de Reclus. À première vue, il ne m’avait pas été sympathique. Mais, l’habitude aidant, cette impression s’était atténuée, quoique, parfois, il émettait des aphorismes plutôt effarants. Mais j’attribuais cela au besoin d’épater les gens. Et il y avait, je crois, beaucoup de cela. Ce fut lui qui me remplaça lorsque je fus arrêté.

Arrêté à son tour, ce ne fut qu’au procès des Trente que je le revis et que j’appris son vrai nom : Ledot, et qu’il avait subi une condamnation pour quelque indélicatesse dans un emploi qu’il tenait à la mairie de Bourges.

Tant qu’il fut avec moi, je n’eus jamais à m’en plaindre. Plus tard, paraît-il, il aurait été se vantant d’avoir écrit mon livre La Grande Famille. Rien de bien méchant.

Les attentats continuaient. Il y eut, entre autres, les vols de la bande Ortiz. Nous sentions, chaque jour, se resserrer le filet policier autour de nous.

Le 1er janvier 1894, Benoît me fit avertir que l’on était en train de perquisitionner chez lui, et que l’on allait monter chez moi. C’était Touny qui menait l’opération.

Ne gardant rien, selon mon habitude, brûlant les lettres au fur et à mesure qu’il y était répondu, j’eus vite fait de mettre au feu la demi-douzaine provenant du courrier du matin. Je n’avais qu’à attendre les roussins qui ne tardèrent pas d’arriver.

Après avoir fouillé un peu partout par acquit de conscience, Touny s’empara d’une boîte contenant les fiches des derniers abonnés dont je n’avais pas encore fait imprimer les adresses.

Je lui fis observer que c’étaient des adresses d’abonnés, qu’elles m’étaient indispensables, qu’il agissait contre tout droit en les prenant.

« Vous n’aurez qu’à aller les réclamer, dans la semaine, au Palais de Justice », me dit-il. Et, tout en fouillant, il consultait continuellement des notes qu’il tenait à la main. Ça ne me disait rien qui vaille !

À la fin, il me demanda de le conduire à mon domicile particulier.

Le bureau étant de plus en plus encombré de paperasses, j’avais dû louer, rue Monge, une chambre où j’avais transféré mes meubles. Dans le vague espoir qu’elle échapperait à la police, je l’avais louée sous le nom de mon parent, Benoît. Mais, entre les pattes des limiers, cela devenait la « précaution inutile » !

J’essayai de m’en tirer en disant que je n’avais pas de domicile à moi, que je logeais chez une maîtresse.

— Alors, je suis forcé de vous arrêter.

Il n’y avait rien de compromettant rue Monge. Cela ne voulait pas dire que ça ne se terminerait pas quand même par une arrestation. Mais, tout considéré, arrêté pour arrêté, j’essayai ma dernière chance. J’emmenai les argousins rue Monge.

La visite ne dura pas longtemps. Ils ne trouvèrent rien, et s’en allèrent, me laissant libre, à mon grand soulagement.

Dans la journée j’appris que des centaines d’anarchistes avaient reçu, pour leurs étrennes, de semblables visites.

Pendant la perquisition faite chez elle, Mme Benoît reconnut un de ceux qui avaient pratiqué la précédente. C’était Fédé. De plus, après le départ des policiers, elle constata la disparition d’un volume de la Société mourante que j’avais dédicacé à son mari.

Le commissaire du quartier chez lequel je l’engageais à aller réclamer, jura ses grands dieux qu’il était impossible qu’un officier de police s’emparât de ce qui ne lui appartenait pas.

Le volume n’en avait pas moins disparu. Peut-être, lui aussi, sera-t-il allé enrichir quelque vente.

À part cela, les policiers, même gradés, sont des honnêtes gens !

Au commencement de la semaine, un employé de la poste me remit une liste de camarades dont la correspondance devait être saisie à la poste. Un coup de filet se préparait, évidemment. Il n’y avait qu’un moyen d’y échapper, prendre la fuite. Ç’aurait été prudent mais fort peu courageux. Il n’y avait qu’à voir venir.

Le samedi suivant, il n’était pas encore cinq heures du matin, on frappait à ma porte, rue Monge. Ayant demandé qui était là, ce fut la concierge qui me répondit. Elle avait quelque chose à me dire !

Quelque chose à me dire ! à cette heure de la nuit ! j’étais fixé. Cette fois j’étais pris. J’ouvris la porte et deux ou trois policiers se précipitèrent — c’est le mot — sur moi.

À la fin, ayant consenti à me laisser m’habiller, ils fouillèrent un peu partout, et finirent par découvrir un paquet de lettres. Toutes émanaient de littérateurs avec lesquels j’étais en correspondance pour le Supplément. Ça ne pouvait compromettre personne.

De la rue Monge, je fus mené au poste du Panthéon, où on me fit attendre le jour. Le commissaire me confia à deux acolytes pour me mener au Dépôt lorsqu’il serait une heure décente. En route, ces messieurs me proposèrent de prendre le tramway, mais je tenais à jouir du peu d’air libre qui me restait à respirer, je préférai marcher. Plus loin, ils m’offrirent d’aller prendre quelque chose, sur le zinc, me faisant remarquer avec quels égards ils me traitaient. Mais je déclinai leur nouvelle offre.

Arrivé au Dépôt, je fus bouclé. Comment cela se terminerait-il ?


  1. C’était la visite au juge dont il est question dans ma lettre.
  2. Nous étions toujours en liberté provisoire à cette époque.
  3. La lettre de Ravachol était une réponse à un pneu que je lui avais adressé.

    Quelque temps après l’arrestation de Ravachol, Mme Benoît, un jour que j’avais été absent du bureau, m’apprit que l’on était venu me demander. C’était Laborie qui tenait absolument à me parler, et me priait d’aller le voir chez lui.

    Je m’y rendis. Il me raconta que, à la Conciergerie, on était en train de manœuvrer pour imposer à Ravachol un défenseur du choix de l’administration ; qu’il fallait éviter cela. Que lui, Laborie, se chargerait volontiers de la défense de Ravachol.

    Qu’y avait-il de vrai ? L’homme me parut sincère. Je lui promis d’intervenir auprès de Ravachol.

    Le lendemain, je rencontrai Pouget, je lui racontai la chose.

    — Allons voir Atthalin, me dit-il.

    Atthalin était le juge chargé d’instruire le procès de Ravachol.

    Aussitôt dit, aussitôt fait. Nous voilà partis pour le Palais de Justice, Là, on nous dit que M. Atthalin est, justement, à la Conciergerie, en train d’interroger Ravachol. Nous allons à la Conciergerie, Atthalin en était parti. Retour à son cabinet, mais notre homme refusa de nous recevoir.

    Nous allons au bureau de poste, en face le Palais. Là, j’expédiai un pneumatique à Ravachol, lui conseillant de demander Laborie comme défenseur. Ravachol me répondit qu’il avait déjà choisi Me Lagasse.

    Ce fut cette lettre qui fut saisie.