Le Nouveau Testament (Martin, 1861)/Le Saint Évangile selon Saint Marc/XII

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Société biblique américaine (p. 82-85).

CHAP. XII.

La parabole des vignerons ; la pierre rejetée par ceux qui bâtissent ; le tribut dû à César ; question des sadducéens touchant la résurrection ; quel est le plus grand commandement ; David a reconnu le Messie pour son Seigneur ; se donner de garde des scribes ; la veuve qui met deux petites pièces au tronc.


PUIS il se mit à leur dire par une parabole : Quelqu’un, dit-il, planta une vigne, et l’environna d’une haie, et il y creusa une fosse pour un pressoir, et y bâtit une tour ; puis il la loua à des vignerons, et s’en alla dehors.

2 Or en la saison des raisins il envoya un serviteur aux vignerons pour recevoir d’eux du fruit de la vigne.

3 Mais eux le prenant, le battirent et le renvoyèrent à vide.

4 Il leur envoya encore un autre serviteur ; et eux lui jetant des pierres, lui meurtrirent la tête, et le renvoyèrent, après l’avoir honteusement traité.

5 Il en envoya encore un autre, lequel ils tuèrent ; et plusieurs autres, desquels ils battirent les uns et tuèrent les autres.

6 Mais ayant encore un fils, son bien-aimé, il le leur envoya aussi pour le dernier, disant : Ils respecteront mon fils.

7 Mais ces vignerons dirent entre eux : C’est ici l’héritier, venez, tuons-le, et l’héritage sera nôtre.

8 L’ayant donc pris, ils le tuèrent, et le jetèrent hors de la vigne.

9 Que fera donc le seigneur de la vigne ? Il viendra, et fera périr ces vignerons, et donnera la vigne à d’autres.

10 Et n’avez-vous point lu cette écriture : La pierre que ceux qui bâtissaient ont rejetée, est devenue la maîtresse pierre du coin ?

11 Ceci a été fait par le Seigneur, et c’est une chose merveilleuse devant nos yeux.

12 Alors ils tâchèrent de le saisir, mais ils craignirent le peuple ; car ils connurent qu’il avait dit cette similitude contre eux ; c’est pourquoi le laissant, ils s’en allèrent.

13 Mais ils lui envoyèrent quelques-uns des pharisiens et des Hérodiens, pour le surprendre dans ses discours ;

14 lesquels étant venus, lui dirent : Maître, nous savons que tu es véritable, et que tu ne considères personne ; car tu n’as point d’égard à l’apparence des hommes, mais tu enseignes la voie de Dieu selon la vérité : Est-il permis de payer le tribut à César, ou non ? le paierons-nous, ou ne le paierons-nous pas ?

15 Mais Jésus connaissant leur hypocrisie, leur dit : Pourquoi me tentez-vous ? Apportez-moi un denier, que je le voie.

16 Et ils le lui présentèrent. Alors il leur dit : De qui est cette image et cette inscription ? Ils lui répondirent : De César.

17 Et Jésus répondant, leur dit : Rendez à César les choses qui sont à César, et à Dieu celles qui sont à Dieu. Et ils en furent étonnés.

18 Alors les sadducéens, qui disent qu’il n’y a point de résurrection, vinrent à lui, et l’interrogèrent, disant :

19 Maître, Moïse nous a laissé par écrit, que si le frère de quelqu’un est mort, et a laissé sa femme, et n’a point laissé d’enfans, son frère prenne sa femme, et qu’il suscite lignée à son frère.

20 Or il y avait sept frères, dont l’aîné prit une femme, et mourant ne laissa point d’enfans.

21 Et le second la prit, et mourut, et lui aussi ne laissa point d’enfans ; et le troisième tout de même.

22 Les sept donc la prirent, et ne laissèrent point d’enfans ; la femme aussi mourut la dernière de tous.

23 En la résurrection donc quand ils seront ressuscités duquel d’eux sera-t-elle la femme ? car les sept l’ont eue pour leur femme.

24 Et Jésus répondant, leur dit : La raison pour laquelle vous tombez dans l’erreur, c’est que vous ne connaissez point les écritures, ni la puissance de Dieu.

25 Car quand ils seront ressuscités des morts, ils ne prendront point de femme, et on ne leur donnera point de femme en mariage ; mais ils seront comme les anges qui sont aux cieux.

26 Et quant aux morts, pour vous montrer qu’ils ressuscitent, n’avez-vous point lu dans le livre de Moïse, comment Dieu lui parla dans le buisson, en disant : Je suis le Dieu d’Abraham, et le Dieu d’Isaac, et le Dieu de Jacob ?

27 Or, il n’est pas le Dieu des morts, mais le Dieu des vivans. Vous êtes donc dans une grande erreur.

28 Et quelqu’un des scribes qui les avait ouïs disputer, voyant qu’il leur avait bien répondu, s’approcha de lui, et lui demanda : Quel est le premier de tous les commandemens ?

29 Et Jésus lui répondit : Le premier de tous les commandemens est : Ecoute Israël, le Seigneur notre Dieu est le seul Seigneur ;

30 et tu aimeras le Seigneur ton Dieu de tout ton cœur, de toute ton âme, de toute ta pensée, et de toute ta force. C’est là le premier commandement.

31 Et le second, qui est semblable au premier, est celui-ci : Tu aimeras ton prochain comme toi-même. Il n’y a point d’autre commandement plus grand que ceux-ci.

32 Et le scribe lui dit : Maître, tu as bien dit selon la vérité, qu’il y a un seul Dieu, et qu’il n’y en a point d’autre que lui ;

33 et que de l’aimer de tout son cœur, de toute son intelligence, de toute son âme, et de toute sa force, et d’aimer son prochain comme soi-même, c’est plus que tous les holocaustes et les sacrifices.

34 Et Jésus voyant que ce scribe avait répondu prudemment, lui dit : Tu n’es pas loin du royaume de Dieu. Et personne n’osait plus l’interroger.

35 Et comme Jésus enseignait dans le temple, il prit la parole, et il dit : Comment disent les scribes que le Christ est le fils de David ?

36 Car David lui-même a dit par le Saint-Esprit : Le Seigneur a dit à mon Seigneur : Assieds-toi à ma droite, jusqu’à ce que j’aie mis tes ennemis pour le marchepied de tes pieds.

37 Puis donc que David lui-même l’appelle son Seigneur, comment est-il son fils ? Et de grandes troupes prenaient plaisir à l’entendre.

38 Il leur disait aussi, en les enseignant : Donnez-vous de garde des scribes, qui prennent plaisir à se promener en robes longues, et qui aiment les salutations dans les marchés,

39 et les premiers siéges dans les synagogues, et les premières places dans les festins ;

40 qui dévorent entièrement les maisons des veuves, même sous le prétexte de faire de longues prières. Ils en recevront une plus grande condamnation.

41 Et Jésus étant assis vis-à-vis du tronc, prenait garde comment le peuple mettait de l’argent au tronc.

42 Et plusieurs riches y mettaient beaucoup ; et une pauvre veuve vint, qui y mit deux petites pièces, qui font la quatrième partie d’un sou.

43 Et Jésus ayant appelé ses disciples, il leur dit : En vérité, je vous dis que cette pauvre veuve a plus mis au tronc que ceux qui y ont mis.

44 Car tous y ont mis de leur superflu ; mais celle-ci y a mis de son indigence tout ce qu’elle avait, toute sa subsistance.