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Le Nouveau chatouilleur des dames/Introduction

La bibliothèque libre.
Le Nouveau chatouilleur des dames traduction de New Ladies tickler
Traduction par Anonyme.
Imprimerie de la société cosmopolite (p. i-xvi).

INTRODUCTION



L a quantité d’écrivains et de graves personnages, philosophes, docteurs, professeurs qui ont traité ce sujet est vraiment prodigieuse, aussi ne faut-il pas s’étonner du nombre de livres sur la flagellation enfouis au fond des vieilles bibliothèques, preuve irrécusable que de tout temps cette singulière manie a été fort répandue. Je ne parlerai pas de Meibomius, de son vrai nom Johann Heinrich Meybaum, savant médecin né à Helmstadt en 1590 et mort à Lubeck en 1655 et dont l’opuscule remarquable intitulé : De flagrorum usu in re medica et venerea, lumborum renunque officio a été traduite en français avec notes très savantes par Claude Mercier de Compiègne en 1792 sous le titre suivant :

De l’utilité de la flagellation dans les plaisirs du mariage, dans la médecine, et dans les fonctions des lombes et des reins, ouvrage curieux traduit du latin de Meibomius, orné de gravures en taille-douce, et enrichi de notes historiques et critiques, auxquelles on a joint le texte latin. Paris, chez Jac. Girouard, 1792.

Trois autres éditions du même ouvrage parurent successivement en 1795, 1800 à Paris, et 1801 à Londres. Enfin la dernière fut donnée à Bruxelles en 1879.

L’abbé Boileau, docteur en Sorbonne, doyen et grand vicaire de Sens, puis chanoine de la Sainte Chapelle de Paris, publia aussi en 1700 sur la Flagellation un ouvrage fort égrillard, de près de 400 pages. Il est vrai qu’il l’écrivit en latin, mais on en donna presque aussitôt une traduction jugée encore plus indécente que l’original, et en 1732 l’abbé Granet la fit réimprimer après toutefois de nombreuses corrections.

Comme la présente publication est spécialement réservée aux bibliophiles, je veux citer les noms des principaux auteurs depuis l’ère chrétienne qui se sont occupés à divers points de vue de ce qui peut paraître au vulgaire une bizarrerie sadique et qui n’est au fond qu’une des mille variétés des phénomènes de notre organisme. Les voici à peu près dans l’ordre chronologique.

Titus, disciple d’Asclépiade, rhéteur et médecin à Rome sous le règne de Trajan ;

Aetius d’Amide (Mésopotamie) qui vivait dans le Ve siècle, le premier médecin chrétien qui laissa des écrits ;

Razès, célèbre médecin arabe du Ve siècle.

Nicolas Perrot, gouverneur de l’Ombrie et archevêque de Siponte (1458) ;

Le prince Pic de la Mirandole ;

Ludovicus Cælius Rhodiginus, professeur à l’Université de Milan, qui eut Scaliger pour élève ;

Othon Brunfiels, savant chartreux de Mayence, un des premiers disciples de Luther, reçu médecin, à Bâle en 1530 ;

Jean Névisan d’Asti, célèbre jurisconsulte, mort en 1540 ;

Le savant André Tiraqueau, de Fontenay le Comte, l’ami du chancelier de l’Hôpital, celui dont l’épitaphe disait :

Qui ne but jamais que de l’eau,
Eut vingt enfants, fit vingt volumes ;

Le Florentin Giuntino, mathématicien, carme puis apostat qui périt écrasé par l’écroulement de sa bibliothèque ;

Jérôme Mercurialus, professeur de médecine à Padoue, à Bologne et à Pise :

Un autre professeur de médecine, Marsilio Cagnati de Vérone, qui enseigna à Rome sous Clément VIII et Paul III ;

Le dominicain calabrais, Thomas Campanella mort à Paris en 1639 ;

Le docteur Joachim Olasius de Dantzick contemporain de Campanella ;

Et tutti quanti.

Il faudrait certainement remonter aux âges préhistoriques pour retrouver l’origine de la flagellation. Je ne parle pas bien entendu de celle infligée aux enfants et aux esclaves, mais de la flagellation volontaire, car celle que s’infligent encore les moines et les nonnes dans nombre de communautés vient en droite ligne du paganisme.

Tout le monde sait qu’à certaines fêtes en l’honneur de Diane, jeunes garçons et jeunes filles se fouettaient à nu devant son autel. Dans les mystères de Cérès, de Mithras, d’Isis, des dieux Cabires, de Cybèle et Bacchus comme dans les Lupercales, hommes et femmes se flagellaient mutuellement. Les jeunes mariées romaines qu’effrayait l’approche de premières couches se présentaient nues aux fêtes de Pan pour y être fouettées par les prêtres avec la main ou la verge dans l’espoir d’enfanter avec moins de douleur. À Rome, lorsqu’une vestale laissait par mégarde éteindre le feu sacré, elle était aussitôt saisie par un officier du temple, conduite dans un cabinet noir attenant à l’autel et fouettée par le grand pontife ou un prêtre désigné par lui.

Les juifs ne furent pas plus que les gentils exempts de ces aberrations mystiques ou de ces raffinements de luxure ; on en trouve encore des preuves dans les écrits des Rabbins du Ve siècle.

Cependant ce n’est guère qu’au XIe que la flagellation s’introduisit, officiellement du moins chez les moines chrétiens. La coutume s’établit dans les monastères d’Orient, d’où elle passa rapidement en Europe. L’ordre de Saint Benoît l’adopta le premier, puis Saint Colomban, Saint Césaire d’Arles et de là elle se répandit à peu près partout, principalement dans les couvents de femmes. Le clergé séculier ne tarda pas à l’adopter comme efficace moyen disciplinaire et il faut bien l’avouer aussi de corruption. Bientôt, dit le comte Lanjuinais, les évêques s’arrogèrent sur les clercs le même droit que les abbés, les prieurs exerçaient sur leurs moines ; les laïcs mêmes ne furent pas exempts de la fustigation publique donnée par l’évêque ou son official, ou enfin par les chanoines de la cathédrale, le prêtres pénitenciers, avec des verges que le pénitent devait leur apporter et leur présenter[1]. Elle eut lieu également entre confesseur et pénitente et passa si bien dans les mœurs qu’elle se pratiqua jusque dans la rue.

L’auteur anonyme de l’Introduction à l’édition de 1879, du livre de Meibomius raconte qu’un cordelier donna le fouet un jour en plein midi sur les fesses, soutane troussée, à un docteur en théologie qui venait de prêcher contre la conception immaculée de la Sainte Vierge et les femmes rassemblées criaient : „Mon père, donnez-lui-en quatre coups pour chacune de nous.” Il faut croire que ce théologien se prêtait à la besogne ou que le cordelier était un vigoureux gaillard, ou qu’il se faisait aider par les dames présentes.

Le poète Jehan de Meung, surnommé Clopinel, qui acheva le Roman de la Rose commencé par Guillaume de Lorris et fut un des frondeurs les plus hardis du XIIIe siècle, eut, dit-on, à subir le même châtiment dans une des chambres du Louvre, de la main des dames de la cour indignées du quatrain suivant :

Toutes êtes, serez, ou fûtes
De fait, ou de volonté, pûtes ;
Et qui très bien vous chercheroit,
Pûtes toutes vous trouveroit.

La fessée était, s’il faut s’en rapporter aux chroniqueurs, la punition ordinaire infligée aux pages, même à ceux qui avaient atteint l’adolescence, et accompagné leur seigneur à la guerre. Plus d’une grande et honneste dame se chargeait volontiers en ces circonstances de l’office d’exécuteur. „L’impératrice de Russie, celle que l’histoire a appelée la grande Catherine, raffolait de ce petit divertissement. Elle ne dédaignait pas de se servir personnellement de la verge et, par le fait, la cinglade était pour elle un passe-temps ou plutôt une passion. Elle fouettait ses filles de chambre, ses habilleuses, ses cuisinières, ses pages, ses valets de pied, lorsqu’elle était ennuyée et trouvait à cet exercice un grand confort et une amusante distraction ; les filles étaient hissées sur le dos des laquais, et les laquais à leur tour sur le dos des filles[2]…”

Des faits analogues sont rapportés par Brantôme. Il raconte entre autres dans les Vies des Dames galantes „qu’il a ouï parler d’une grande dame, qui ne se contenant de lascivité naturelle, car elle était grande putain et étant mariée et veuve, aussi était-elle très belle ; pour se provoquer et exciter davantage, elle faisait dépouiller ses dames et filles, je dis les plus belles, et se délectait fort à les voir, et puis elle les battait du plat de la main sur les fesses avec de grandes claquades ; et les filles qui avaient délinqué en quelque chose, avec de bonnes verges ; et alors son contentement était de les voir remuer et faire des torsions de leurs corps et fesses, lesquels selon les coups qu’elles recevaient, en montraient de bien étranges et bien plaisants. Autres fois, sans les dépouiller, les faisait trousser la robe, car elles ne portaient point de caleçons, et les claquetait et fouettait sur les fesses, selon le sujet qu’elles lui donnaient, ou pour les faire rire ou pleurer…

Mais une des manifestations les plus extraordinaires des folies humaines est celle qui parut en 1260 sous le nom de Flagellants.

L’Italie vit tout à coup surgir une secte de fanatiques dont jusque là on n’avait point eu d’exemple. Des populations entières semblaient prises d’un vertige religieux, et se livraient à des pratiques de piété d’une extravagance inconcevable. Pérouse avait été la première ville où s’était manifestée cette fièvre de fanatisme, qui bientôt gagna Rome, le reste de l’Italie, l’Allemagne, l’Espagne et l’Angleterre[3] ; des vieillards, de jeunes hommes, des femmes et jusqu’à des enfants, sous l’empire d’une fureur religieuse parcouraient sans vêtement les villes et les campagnes, se suivant deux à deux, et tenant à la main des fouets de lanières plombées avec lesquels ils se frappaient rudement sur les épaules et sur les reins. Ces processions avaient lieu le jour comme la nuit même dans les hivers les plus rigoureux ; et au rapport des historiens du temps, on comptait quelquefois jusqu’à dix mille flagellants faisant leurs dévotions, entièrement nus, et ayant en tête des prêtres, des cardinaux et des évêques portant la croix et les bannières. Dans les villages, dans les bourgs et dans les villes, la secte s’était propagée avec une rapidité extraordinaire ; les femmes, même des grandes dames et des jeunes filles, se montraient pleines de ferveur pour ces nouvelles pratiques religieuses, et déchiraient cruellement leur corps. Bientôt, cette singulière superstition dégénéra en hérésie, les flagellants se confessèrent les uns aux autres et se donnèrent l’absolution quoique laïques. Mais ce qu’il y eut de plus déplorable dans ces grandes réunions, où des jeunes hommes et des jeunes filles pouvaient se voir sans vêtements, ce furent des scènes de débauche, de sodomie et d’inceste, entre des frères et des sœurs, des mères et des fils ; aussi la secte des flagellants tomba dans le mépris public et fut bientôt anéantie[4].

On a vu que dès le XIe siècle l’usage de fustigation sur le derrière s’était introduit dans la plupart des communautés religieuses et faisait partie des règles disciplinaires. Il y avait dans cet acte même un raffinement de cruauté et de lubricité particulier à tous les êtres vivant en dehors des lois naturelles et dont le sens moral s’oblitère peu à peu. Au temps de la révocation de l’édit de Nantes, les religieuses chez qui l’on enfermait les jeunes filles protestantes arrachées à leur famille pour les contraindre d’embrasser la foi catholique, les fouettaient rigoureusement si elles se refusaient à entendre la messe ou à se soumettre à la confession, d’abord en cellule, puis devant le couvent réuni et enfin, si elles persistaient dans leur entêtement, l’abbesse requérait en vertu d’une autorisation royale l’aide d’une compagnie de grenadiers ou de dragons et l’exécution se faisait, militari manu en présence d’un officier

Dans un curieux et récent livre d’Hector France, les Nuits de Londres, où se trouvent d’intéressants détails sur la fessée encore en usage dans nombre de pensionnats anglais, on voit que cette punition y est parfois infligée à des jeunes filles de 14 à 18 ans, non pas, il est vrai, en présence d’un officier de la garnison, mais devant le vicaire de la paroisse !

Les verges dont on se sert encore dans ces pensionnats sont faites de scions de bouleau comme celles employées autrefois dans nos universités et dont fut cinglé au collège de St. Barbe le pieux derrière d’Ignace de Loyola qui vint s’y asseoir à l’âge de 33 ans. Voltaire, qui relate le fait, dit au sujet de ces fustigations scolaires, où les Jésuites passèrent maîtres :

Il est honteux et abominable qu’on inflige un pareil châtiment sur les fesses à de jeunes garçons et à de jeunes filles. C’était autrefois le supplice des esclaves, J’ai vu dans des collèges des barbares qui faisaient dépouiller des enfants presque entièrement ; une espèce de bourreau souvent ivre, les déchirait avec de longues verges, qui mettaient en sang leurs aines, et les faisaient enfler démesurément. D’autres les faisaient frapper avec douceur et il en naissait un autre inconvénient. Les deux nerfs qui vont du sphincter au pubis étant irrités causaient des pollutions ; c’est ce qui est arrivé souvent à de jeunes filles.” Et il ajoute : „Par une police incompréhensible, les jésuites du Paraguai fouettaient les pères et les mères de famille sur leurs fesses nues. Quand il n’y aurait eu que cette raison pour chasser les jésuites, elle aurait suffi[5].”

C’est un fait connu de la plus haute antiquité, que la flagellation dispose aux actes vénériens. Aristote et Galilée l’ont observé, et nombre de personnes, surtout celles épuisées par des excès de jeunesse ne peuvent goûter les plaisirs de l’amour sans être aiguillonnées de cette façon. Tous les poètes et les écrivains satyriques de Grèce et de Rome se sont plus ou moins étendus sur ce sujet.

Ce stimulant aphrodisiaque, jadis fort en usage en Syrie, l’est, dit-on, encore dans certaines provinces russes.

Dans son Traité du Mariage M. de Lignac raconte que le poète Cornelius qui, avec Virgile, Horace, Tibulle et Camille forma cette brillante pléiade, gloire du siècle d’Auguste, ne devait les transports d’amour frénétique d’une jeune fille passionnée pour lui, qu’aux fessées que lui administrait gravement un père sévère mais ignorant, qui croyant la punir de cette façon des fautes où la poussait un tempérament lascif ne travaillait au contraire qu’à augmenter l’ardeur de ses désirs, et faisait ainsi le jeu du poète ravi.

Si l’on en croit Voltaire, l’abbé Jean Terrasson, professeur de philosophie grecque et latine au collège de France et membre de l’Académie Française et de celle des Sciences, se faisait fouetter hebdomadairement par des courtisanes pour retrouver un peu de vigueur.

Mais de tous les pays où la flagellation publique et privée a été pratiquée avec le plus de science et sur les plus vastes étendues, il faut citer l’Angleterre. Singulière anomalie ! C’est précisément chez le peuple qui se pose vis-à-vis des autres nations comme le peuple vertueux par excellence où l’on conserve encore, précieuse et intéressante relique du passé, l’usage de fouetter les jeunes filles. Les campagnes récentes entreprises par plusieurs journaux de Londres contre les fessées dans les écoles enlèvent tout doute à cet égard. Mais cette vertu et cette moralité dont nos voisins d’outre Manche se targuent, les abominables scandales d’hier viennent de les réduire à ce qu’elles sont en réalité, une hypocrisie nationale. La morale du reste, je parle de la morale publique, n’est au fond que l’hypocrisie publique. Les anciens prêtres de l’Inde, qui n’étaient pas des sots, l’avaient bien comprise aussi, car la morale en langue sanscrite s’appelle andaniti, le régime du bâton.

Un jeune poète a parlé en vers de grande envergure de ces âges, inconnus aux vertueux à systèmes[6] :

Où sont-ils donc, les jours des cultes orgiaques,
Où l’homme s’enivrant de sa virilité,
Sculptait sur les phallus l’orbe des zodiaques,

Et pour axe du Cosmos donnait la volupté ?
 
On Savait pas encore inventé la morale,

La vertu n’avait pas encor châtié l’amour ;
Le mythe rayonnant en sa splendeur astrale,
Des baisers de la nuit faisait naître le jour.

Le Sage dont l’esprit plane au-dessus des préjugés routiniers de la foule imbécile sait trop que morale et vertu ne sont qu’affaire de milieu, de convention, de climat, de tempérament, d’occasion et presque de nourriture. Un homme vigoureux qui a eu dix maîtresses peut être plus vertueux et l’est d’ordinaire davantage que son voisin l’anémique qui n’en a jamais connu. Le poids de la vertu est plus difficile à supporter à une jolie femme qu’à une laide, à une mondaine qu’à une recluse, à une saine qu’à une rachitique, à une intelligente qu’à une sotte. Les vertueux au sang batracien qui ne trouvent rien de plus doux dans la vie que de se chauffer à l’aurore boréale de ce qu’ils appellent les bonnes mœurs, capitonnés dans l’édredon des convenances sociales, n’empêcheront jamais les natures plus ardentes de chercher de plus chauds soleils. Il est des estomacs qui ne peuvent s’accommoder des fades mets, il leur faut du piment, et du piment ils prennent. Sont-ils moins honnêtes ? Blessent-ils autrui ? Prétendre imposer à tous ses goûts, sa façon de vivre, de penser, d’aimer, d’agir est une de ces outrecuidantes naïvetés qui ne peuvent entrer que dans la cervelle étroite des moutons humains du troupeau de Panurge.

En dépit des lois pour la réglementation des bonnes mœurs (puisque bonnes mœurs cela s’appelle) quantité de gens continueront à en avoir de mauvaises, à commencer par ceux-là-même qui élaborent les susdites lois.

Le sage seul se tait ; il sait que chacun doit être libre d’accommoder sa femme à sa manière et de saler son potage à son goût.

Quoi qu’il en soit, et quoi qu’il en puisse être, nos vertueux voisins de la Pudique Albion, sont je le répète, les plus grands dégustateurs des plaisirs réprouvés pourvu qu’on les tienne secrets, et c’est dans les recoins mystérieux de leurs bibliothèques que l’on découvre, soigneusement embusqués, un nombre extraordinairement varié d’ouvrages sur ce sujet shocking and improper.

Un érudit de Londres caché sous le pseudonyme de Pisanus Fraxi a donné en deux volumes de 1877 à 1879 d’intéressants détails sur ce côté des mœurs de ses compatriotes, et déjà quelques années auparavant The Englishwoman’s Domestic Magazine publiait une série de Lettres sur la fessée des filles et les punitions corporelles infligées aux enfants.

Quantité d’ouvrages furent alors signalés, tous de fabrication anglaise, la plupart ornés de dessins érotiques et qui depuis plusieurs générations faisaient les délices secrètes des vieux et jeunes gentlemen. C’étaient les Curiosités de la Flagellation ; Aphrodisiac and Anti-aphrodisiac par John Davenport ; The Rod (la verge) par Henry Laïng ; la Vergiade par George Coleman ; The Charm, The Night school (l’École de nuit) ces deux derniers sans nom d’auteur ; Exhibition of female flagellants, qui eut nombre d’éditions ; Fashionable Lectures composed and delivered with Birch Discipline, aussi réimprimé et désigné par Pisanus Praxi comme un des plus curieux de l’espèce ; The merry order of Saint Bridget, Personal recollections of the use of the Rod ; (l’ordre joyeux de Sainte Brigitte, souvenirs personnels de l’usage de la verge ; Mysteries of the Flagellation ; Lady Bumtickler’s Revels, opéra comique assez spirituel ; Madame Birchini’s dance ; The Romance of Chastisement ; Révélations sur l’École et l’Alcôve par un expert ; Sublime of Flagellation ; Venus Schoolmistress or Birchen Sports ; et le dernier paru History of the Rod in all countries par le révérend William Cooper, pseudonyme de James G. Bertam !

On le voit, pour un peuple pudibond voici une assez jolie liste d’ouvrages traitant exclusivement de sujets répréhensibles. J’ai hâte de terminer cette Introduction déjà trop longue : mais avant de finir je dois dire que cette manie britannique ne se manifestait pas seulement dans la passion des livres vendus sous le manteau. À Londres, et dans la plupart des grandes villes, les amateurs connaissaient l’adresse de maisons meublées avec luxe, véritables Académies ou Gymnases de Flagellation.

On cite différents noms de matrones, entre autres celui de mistress Collet, aidée de sa jolie nièce mistress itchell, qui eurent comme principal client le Régent d’Angleterre, depuis, George IV ; Mistress James, ancienne femme de chambre de Lady Clanricarde ; Mistress Potier, morte en 1873. Toutes amassèrent des sommes assez rondes, car les prix de chaque séance étaient fort élevés et variaient de cinq à quinze guinées.

Mais la plus célèbre de toutes fut incontestablement Mistress Theresa Berkley qui inventa une machine à flagellation pour dames et messieurs et mourut en 1836 après avoir gagné en huit années seulement 10,000 livres sterling !

Le Bibliophile de Mirecourt.
Novembre 1885.

  1. La Bastonnade et la Flagellation pénales.
  2. Hector France. (La Pudique Albion)
  3. Ce fut Philippe de Valois qui empêcha cette secte de s’établir en France.
  4. Histoire des Papes, par Maurice La Châtre.
  5. Dictionnaire philosophique.
  6. Les cultes fauves par Émile Chevé.