Le Parnasse libertin/054

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Chez Cazals & Ferrand, Libraires (p. 46-47).

LA SŒUR GRISE.


Un gros paillard, c’étoit un Clerc d’Égliſe,
Pour certaine raiſon prit chambre à l’Hôpital ;
Près de lui paſſe une Sœur Griſe
Ayant un tein uni comme criſtal.
Je me mœurs, chere Sœur, & deſſous ſa chemiſe
Conduit ſa belle main, lui fait tâter ſon mal.
Quel mal ! Jeſus, s’écrie avec ſurpriſe

Sœur Iſabeau d’eſprit bien peu ſubtile.
Croyez-vous en mourir ? non : ma Sœur, répond-il ;
Car vous portez pour maux de telle miſe
Sous vos jupons la médecine exquiſe.
Pour lors le Clerc lui met la main ſous le nombril,
La Baiſe tendrement ; l’enjambe ſans remiſe,
Et dans la gaine enfile ſon outil.
Si peu penſoit, bien ſentoit la chrétienne ;
Tant que de rage & de feu toute pleine,
Prenant plaiſir comme une autre à ce jeu,
Dit alors au malade, au moins qu’il t’en ſouvienne,
Je prétends bien te guérir pour un peu,
Mais auſſi je prétends qu’après le mal revienne.