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Le Paysan et la paysane pervertis/Tome 1/55.me Lettre

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55.me) (Pierre, à Manon.

[Lettre écrite pour entretenir l’union.]

1751.
10 mars.


Chère Sœur : Celle-ci eſt pour avoir-l’honneur de vous inviter, de la part de ma Mère, ainſi que de la nôtre, à ma Famme ét à moi, à venir paſſer ici les fêtes-de-pâques. Nous aurons beaucoup de plaisir à vous voir, ét ſurtout à faire une connaiſſance auſſi-ample qu’il conviént entre ſi-proches que nous ſommes. Ainſi donc, chère Sœur, ſur votre Reponse, mon Frère-Bertrand ſe-tiéndra prêt à vous aler prendre le ſamedi-ſaint, dans la voiture couverte. Sayez bién-aſſurée que de la part de notre Pére ét de notre Mère, il n’y-a qu’affection ét tendreſſe pour vous ; ét que de la mienne il y-a ce que je ne pourrai bién vous dire que de bouche ; car Edmond eſt mon Frère biénaimé, par une certaine ſimpathie, qui ſ’eſt-toujours-trouvée entre-nous ; d’après quoi, Jugez de ce que vous me devez-être !… Et voila ma Famme qui veut avoir la ſatiſfaction de vous écrire un mot auſſi.

De Fanchon.

Je me fais une fête de vous avoir ici ma chère Sœur : Le peu que je vous ai-vue, ét le bién que disent de vous Ceux qui vous consnaiſſent particulièrement, tout-ça me fait eſperer que nous alons devenir deux bonnes-amies. II n’y-a preſque pas de jour que la Mère de mon Mari ne me parle de vous et ne ſouhaite de vous entretenir, pour vous dire combién elle vous aime, ét qu’elle n’aura de contentement parfait dans la vie, que quand elle vous aura-montré combién elle veut vous être une bonne et tendre Mère.

Je ſuis avec un attachement ſans bornes, ma chère Sœur, &c.

Quant à moi, chère Sœur, je vous dirai de mon Père, ce que ma Famme vous dit de ma Mère. Nous ſommes de bonnes-gens, ét ſur qui le veritable merite a des droits, dont vous jouirez plûs, ét mieus que Perſone. J’ai l’honneur d’être, &c.